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Dry Cleaning

Stumpwork

Dry Cleaning - Stumpwork
Chronique Album
Date de sortie : 21.10.2022
Label : 4AD
35
Rédigé par Bertrand Corbaton, le 21 octobre 2022
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Dry Cleaning est le type de groupe a se faire remarquer lorsqu'il a débarqué l'année dernière avec New Long Leg, son fulgurant premier album. Les esprits chagrins vous diront qu'il s'agissait d'un énième disque post-punk, où tout, ou presque, transpirait l'influence des divins The Fall.

Difficile en effet de ne pas penser à Mark E. Smith dans le style d'écriture journalistique de Florence Shaw. À y regarder de plus près Dry Cleaning, ont un petit quelque chose de particulier, que ce soit dans l'approche froide de leur musique, ou le ton monocorde du spoken word de Shaw. L'ambiance générale de ce New Long Leg était en tous cas assez singulière pour marquer les esprits et susciter assez d'impatience dans l'attente d'une suite à cet excellent album de 2021.

Les quatre amis n'ont pas vraiment pris leur temps puisque quelques mois plus tard seulement, voici que nous étaient présentés les premiers singles de Stumpwork, nouvel album du groupe à l'immonde pochette qui intéresse ici notre propos. Au programme, on retrouve toujours la voix monotone de Florence Shaw, déclinant à l'envi ses anecdotes du coin de rue ou du fond de son jardin. Ainsi, on s'inquiétera de savoir si a enfin été retrouvée cette foutue tortue sur le très pop et engageant Gary Ashby.
Certains fondamentaux du groupe sont ici conservés, et les structures propres aux morceaux de New Long Leg sont aussi présentes sur Stumpwork, comme sur ce Driver's Story qui évoquera quelque peu Unsmart Lady.

Par instant, Florence Shaw tente des légères vocalises comme sur le nerveux Don't Press Me ou Gary Ashby, mais ces écarts sont vraiment trop rares pour que ne soit évoquée une réelle volonté de s'éloigner du spoken word. Dans l'absolu, on sent que l'exercice ne sied pas vraiment à la raconteuse en chef, qui préfère largement se cantonner à son rôle de conteuse plutôt que de s'inventer un rôle de chanteuse. Certaines pièces méritent vraiment l'attention comme ce Conservative Hell intelligent, ou Liberty Log.

Malgré tout, jamais Dry Cleaning ne parviennent à se maintenir à la hauteur de New Long Leg. Si les textes de Florence Shaw sont toujours aussi percutants, le trio Dowse, Maynard, Buxton peine à nous emporter comme il était parvenu à le faire quelques mois plus tôt. En définitive, Stumpwork ne possède aucun titre qui le porte comme pouvait le faire l'imparable Scratchcard Lanyard ou Her Hippo.
Dans l'absolu, ça ne serait pas un problème si certains titres ne tiraient pas clairement sur l'ennuyeux, comme Stumpwork ou Icebergs. Même No Descent Shoes For Rain, pourtant cérébral et travaillé ne donne vraiment envie d'y revenir.

Ce sentiment pénible n'est heureusement pas un fil conducteur, et les tentatives du groupe de sortir des sentiers battus sont parfois réussies, comme sur Anna Calls From The Artic, surprenant et convaincant dans son approche moins organique qui lui donne un petit côté spatial plutôt séduisant. Hot Penny Day est également une réussite avec ce riff de basse faussement funk qui vient arpenter l'arpège glacial qui structure ce très bon morceau.
Sur Kwenchy Kups, Dry Cleaning s'essaient à une matière plus pop qu'à l'accoutumée. Mais l'apparente légèreté du titre ne fait illusion qu'un temps pour masquer les véritables dessous de ce morceau mélancolique. Une belle réussite. On ne peut cependant pas s'empêcher de se poser des questions à l'issue de l'écoute de ce nouvel album, et malgré des tentatives d'éviter une redite, Dry Cleaning semblent s'enfermer dans une voie où la marge de manœuvre semble limitée. Florence Shaw fait du Florence Shaw, et les musiciens doivent faire avec. Cette fois-ci, la volonté de coller au mieux au chant et aux paroles dans ce qu'ils ont de monotone semble les avoir fait s'oublier de façon dommageable et aucun titre ne décolle vraiment malgré de bonnes idées tout le long de l'album.

Car Stumpwork n'est pas un mauvais album, loin de là. Le travail de Dry Cleaning est toujours aussi qualitatif, les idées foisonnent, et l'exigence ne peut être mise en défaut. Mais tout laisse penser qu'il est désormais question d'habiller les paroles de Shaw, à tout prix, donner corps, et mettre en musique son travail quand jadis, c'est elle qui venait apporter des paroles aux instrumentaux. Le concept se défend largement, Dry Cleaning ont le droit de devenir ce genre de groupe. Ce qui est sûr c'est qu'il vous faudra plus de temps pour apprécier ce nouvel album, bien moins percutant au premier abord que le précédent.

Le risque de décevoir bon nombre de fans enthousiasmés par l'immédiateté de New Long Leg est ici à prendre en considération.
tracklisting
    01. ANNA CALLS FROM THE ARCTIC
  • 02. KWENCHY KUPS
  • 03. GARY ASHBY
  • 04. DRIVER'S STORY
  • 05. HOT PENNY DAY
  • 06. STUMPWORK
  • 07. NO DESCENT SHOES FOR RAIN
  • 08. DON'T PRESS ME
  • 09. CONSERVATIVE HELL
  • 10. LIBERTY LOG
  • 11. ICEBERGS
titres conseillés
    HOT PENNY DAY, GARY ASHBY, ANNA CALLS FROM THE ARCTIC, KWENCHY KUPS
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