A l'heure où les festivals se multiplient, se concurrencent et se font la guerre pour l'exclusivité d'un artiste ou d'un autre, il devient rare de voir des grosses affiches comme il y a quelques années, avec cinq superstars sur le même site. Dour ne souffre pas trop de cet état de fait, n'ayant jamais été un festival qui fonctionne sur les têtes d'affiches. Il prétend convaincre d'abord par l'éclectisme de sa programmation, pariant sur le désir de découverte plutôt que sur le grégarisme des fan-bases. En quatre jours et six scènes, on mélange le métal (pluôt bien représenté), le dub, le rock et l'électro; pour le meilleur comme pour le pire, évidemment.
La tente posée, on commence par le duo anglais
Joe Giddeon & the Shark : un gars, une fille de Londres, lui à la basse et elle à la batterie. La voix, c'est lui aussi, pas de chant, mais une narration posée, assez envoûtante, qui rappelle un peu Bauhaus ou certains titres des Talking Heads, en plus minimaliste et un poil poseur. Assez intéressant quoiqu'un peu répétitif, on se dit que c'est un groupe à suivre.
On passe ensuite à la
Jim Jones Revue. Imaginez un quadra londonien qui se prend pour la réincarnation de Little Richard. Du look jusqu'au son honkytonk du piano, c'est là du pur rock'n'roll d'époque, avec voix rauque, rythme binaire et énergie brute. A force d'assumer le rétro, les gars de Jim Jones prennent un gros risque : on se surprend à se demander si l'on n'est pas à un concours de sosies ou dans un mariage branchouille. Et puis, plus personne dans le public ne sait danser le rock'n'roll comme dans le temps, et ça, c'est bien dommage. Heureusement, l'ensemble est suffisamment bien troussé pour que ça marche. Bientôt dans nos colonnes, une interview du groupe...
Après un bref passage chez les métalleux d'
Amenra et une oreille distraite pour les potaches
Fatals Picards sur la grande scène, on subit une petite déception devant
Qemists, dont le hip-hop gentiment métissé pue un peu trop fort le politiquement correct.
Changement d'humeur et d'atmosphère avec
Isis, dont le métal shoegaze déploie sa force tranquille et renversante. Une voix superbe au calme souverain laisse souvent la place à des moments instrumentaux où le groupe entier semble en transe sur scène, emporté par la puissance douce-amère de leurs compositions.
Friendly Fires ayant dû annuler leur prestation, on passe directement à
Santigold, sur la grande scène. La diva, dans une étrange combinaison dorée, enchaîne les tubes, efficaces et dansants, et très attendus. Mais elle sait aussi tirer son épingle du jeu là où on l'attendait moins, à savoir une reprise de The Cure plutôt bien réussie. C'est là aussi que l'on apprend que pleuvoir se dit « dracher » en belge, et les rock critics n'étant plus des vrais durs comme dans le temps, on se contentera d'écouter l'excellent
Matthew Herbert depuis sous la tente.