logo SOV

Pitchfork Music Festival

Paris, du 27 au 29 octobre 2016

Live-report rédigé par Cassandre Gouillaud le 10 novembre 2016

Bookmark and Share
Troisième et dernier arrêt à la Porte de Pantin. Vient l'heure de refermer définitivement cette édition sur une journée qui comprend, comme les autres, son lot de surprises, mais aussi ses belles déceptions. Les limites, sans doute, d'une programmation qui laisse à désirer vis-à-vis de ce à quoi le Pitchfork Music Festival avait pu nous habituer.

À la suite des premiers sets de la journée, Joey Purp et Bonzai, intervient l'indie-rock des américains de Whitney qui ont signé cette année leur premier album, Light Upon The Lake. Le groupe amène avec succès un souffle de légèreté sur la Grande Halle, faisant chanter les guitares avec une trompette que l'on entend que trop rarement sur scène. Le charme du falsetto du batteur et chanteur, Julien Ehrlich, contribue également à l'originalité de la formation, partiellement constituée d'anciens membres de Smith Westerns et Unknown Mortal Orchestra. Cela dit, au fil des titres, il apparaît évident qu'il manque encore à Whitney une présence suffisante sur ces grandes scènes de festival - bien que les bases soient déjà bien assurées.

SOV
Ce sentiment n'est que confirmé par ce qui arrive à la suite, les anglais de Shame. Il s'agissait pour le groupe de leur plus important concert à ce jour, eux qui ne sortent que leur premier single en décembre. Cela ne signifie pas pour autant qu'ils ne maîtrisent pas leur partition punk. Loin de se laisser impressionner, Shame livrent un set nerveux et survolté, qui n'est pas sans rappeler de loin ceux de leurs aînés Fat White Family. Il reste à découvrir ce que cette joyeuse cacophonie peut bien avoir à nous offrir en studio, mais du côté de la scène, leurs premières preuves sont déjà faites.

SOV
Nouvelle formation anglaise, cette fois plus expérimentée. Le super-groupe Minor Victories constitue la première importante attraction de cette soirée. Après avoir révélé leur acclamé album éponyme, le formation s'est lancée dans une tournée qui passe pour la première fois par la capitale française. Cette réussie collaboration entre membres de Slowdive, Mogwai et Editors confirme sur scène son charme et pouvoir envoûtant qui faisait la force de l'album. Il éclate dès le morceau introductif, Give Up The Ghost, qui met en place une atmosphère doucement planante qui débouche sur l'épopée grandiose de The Thief, dont la montée en puissance justement maîtrisée s'offre comme une démonstration des grandes qualités musicales du groupe. Contrairement à Shame, il est peut-être plus difficile de pleinement se laisser prendre par ce concert qui joue dans la subtilité plus que l'extravagance, mais sa justesse est simplement incontestable. À l'image d'un album très fort, il est difficile de trouver une seule fausse note dans cet ensemble. L'une des plus belles démonstrations de la soirée, à côté de laquelle les américaines de Warpaint paraissent bien pâles, à l'image d'un dernier album par ailleurs tout aussi fade.

SOV
Il faut bien une artiste comme ABRA pour raviver l'énergie des festivaliers qui, à ce point de la soirée, contemplent leur bière d'un air dubitatif. Seule en scène, la nouvelle prodige du R'n'B venue d'Atlanta déploie un charisme simplement incroyable et assure à elle seule un set captivant. Elle pose avec assurance sa voix claire sur ses boucles tout en défiant presque son public du regard, imposant sa stature à ces regards ébahis par cette prestance. ABRA éblouit ici par un set transpirant de sincérité et de spontanéité - deux énormes qualités que celle qui a suivi a vraisemblablement manqué, M.I.A. ayant, quant à elle, livré un set étonnement faible vis-à-vis des attentes de tous.

SOV
Tout en ayant avoir révélé son cinquième album AIM il y a deux mois, l'artiste avait renouvelé son engagement en faveur de la cause des réfugiés parallèlement à l'intensification de la crise humanitaire en Europe, notamment à travers le clip de Borders qui mettait en scène des migrants tentant de grimper des grillages. Celle qui s'était imposée comme une figure de l'automne, tant musicalement que par cet engagement, n'était malheureusement que l'ombre d'elle-même en cette dernière soirée. En dehors d'un mur, symbole de la frontière, à l'arrière de la scène que des danseuses franchissent de temps à autres, M.I.A. semble de tous points de vue détachée de son set. Ce qui devait être le moment le plus fort de cette soirée devient le plus vide de sens. Les tubes Paper Planes et Bad Girls ne parviennent même plus à convaincre un public qui semble largement désabusé, voire même pressé de passer à autre chose. Il faut bien avouer qu'à ce stade, on en fait clairement partie.

Bien que le rendez-vous soit toujours donné avec plaisir, ce samedi ne fait que confirmer le fait que cette édition 2016 ne restera pas l'une des plus grandes du festival. Il n'est pas question d'oublier que quelques sets se sont détachés du lot et que certains noms, autrefois inconnus, ont réussi à faire leurs preuves, mais de reconnaître que le niveau de cette année n'atteint pas celui des précédentes. Il manquait à cette édition de grands noms qui auraient signé des sets dont l'on aurait parlé à longueur de journée. Espérons que l'année suivante redressera la barre comme il se doit, le Pitchfork Music Festival restant tout de même l'un des rendez-vous incontournables de l'automne parisien.
artistes
    Joey Purp
    Bonzai
    Whitney
    Shame
    Minor Victories
    Warpaint
    ABRA
    M.I.A.
    Acid Arab (live)
    Motor City Drum Ensemble
    Daphni
    Tale Of Us
photos du festival