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Andrew Hung

Paris, Olympic Café - 19 février 2018

Live-report par Julien Soullière

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Temps de chien. On est mieux à l'intérieur, on se réchauffe tant bien que mal. Vite, une table, une chaise, un verre (rempli), et de quoi grignoter. Je n'ai rien mangé depuis la fin de matinée, j'ai besoin d'un petit quelque chose de rapide, pas nécessairement de très sain, et j'ai le temps pour ça. En fait, même si je ne l'avais pas eu...

Il est maintenant 21h30, et je ne sais pas si le fait d'être désormais rassasié, mais je me décide enfin à gagner la cave de l'Olympic Café. J'agrippe une dernière fois mon verre, le vide, et l'abandonne sur une table des plus bancales, non sans manquer de le faire tomber, la faute aux chips de plantain qui ont souillé mes mains autant qu'elles auront calmé mon infatigable estomac.

A mon arrivée, c'est Alto Clark qui occupe l'espace scénique. Le bonhomme s'observe de haut en bas sans l'ombre d'une difficulté, la faute à une assistance peu fournie à cet instant de la soirée, si ce n'est inexistante. Le plus gênant dans cette histoire, c'est que d'un point de vue géographique, les convives sont clairement plus proches de la sortie que des pieds de l'artiste. Ce dernier n'hésitera d'ailleurs pas à leur faire remarquer, et voilà qu'à force de lancer des perches, la magie opère, la foule s'approche enfin, et Clark peut alors arborer un sourire plus franc. La seconde est enclenchée.

J'ai toujours eu de l'admiration pour des gens capables, dans ses espaces si réduits, devant si peu de monde, de se lancer, seuls et sans filet. Vu de l'extérieur, je trouve ça franchement plus angoissant que de se lancer devant un Zénith bondé, mais j'imagine qu'on me répondra, et à juste titre, que c'est tout simplement différent, que cela dépend d'un tas de paramètres plus ou moins décisifs. Bref, moi je trouve ça fortiche, d'autant que Clark déroule ses boucles électroniques et son phrasé hip-hop avec une certaine aisance. C'est plutôt entraînant, mais intense au point d'en flirter avec le redondant. Et puis, il y a l'anglais très « frenchy » du Monsieur. Je ne sais pas si c'est fait exprès, et qui cela a pu gêner, mais en tout cas, mes oreilles trop sensibles en ont eu pour leur grade. J'ai écouté en ligne : c'est pire encore.

Le set de Clark s'est achevé, et voilà qu'au bout d'une bonne poignée de minutes, le débonnaire Andrew Hung fait son apparition, accompagné d'une demoiselle au sourire aussi large que ses cheveux sont bleus, et d'un bassiste qui, sur le moment, me fait l'effet d'un Fred Abbott fraîchement revenu du coiffeur.
C'est fou comme l'attitude de Hung tranche avec celle de son acolyte de Fuck Buttons, Benjamin John Power, bien plus acérée et sévère. Paraît-il que les contraires s'attirent. En tout cas, d'un point de vue musical, là aussi, on s'éloigne des faits d'armes de Fuck Buttons, de leurs plus récents LP surtout, et de ce qu'a pu présenter Blanck Mass, projet solo de Benjamin John Power. Chez Hung, on est sur des mets moins vigoureux, les transitions sont moins abruptes, et sans vouloir faire dans la facilité, encore moins passer pour un bon gros raciste, j'ai l'impression de participer à un karaoké niché dans le 13ème arrondissement. Il y a quelque chose dans l'attitude, les mimiques de Hung, sa manière de hausser subitement la voix, de chanter sans savoir véritablement chanter, dans le look de sa comparse aussi...

Musicalement parlant, les beats, claviers et autres cordes grattées se complètent parfaitement, le son craché par les enceintes se montre stimulant, mais le plaisir ressenti n'aura cesse de se faire violenter par les vocalises d'Andrew Hung. Déjà qu'elles sont difficiles à appréhender en temps normal, mais le bonhomme se permet d'en rajouter, hurlant brièvement dans son microphone quand il ne travestit pas sa voix grâce à ses machines pour mieux imiter l'ami Donald Duck. Il y a de la folie, c'est certain, mais elle n'est pas franchement de bon goût. Je me dis qu'il devrait laisser plus souvent le micro à la demoiselle qui l'accompagne, dont le timbre de voix est autrement plus agréable.

Le concert est fini, il est temps de m'éclipser. Andrew Hung et ses collègues sont toujours dans la salle, sauf que l'envie de leur parler ne m'est pas apparue. Il n'y a pas grand monde, mais ils ne sont pas seuls, c'est rassurant, car toujours plus agréable pour les artistes qui font la tournée des caves. Peu importe qu'on ait aimé une chose ou non, le respect de l'autre devrait être universel.