Sea Power

Voilà maintenant sept ans que British Sea Power a sorti son premier album. Depuis le groupe a appris à aiguiser sa musique, la faire murir, la faire évoluer sans que les modes d'un quelconque milieu musical n'influent sur son sens de la composition. Aujourd'hui, et pour nous faire patienter jusqu'à la sortie d'un cinquième album, le groupe revient avec un EP plutôt bien garni, Zeus, que l'on ferait mieux de considérer comme un opus à part entière vu le nombre de titres (huit) et surtout leurs durées respectives, trois d'entre eux dépassant notamment les sept minutes.

Zeus. Un titre qui pourrait connoter des morceaux épiques et puissants, voire divins ou mythiques, si l'on forçait un peu le trait. Dans ce qui nous est proposé, on dira plutôt que British Sea Power offre avec ce disque un sentiment de surprise et d'étonnement et qu'il fait émerger notre curiosité. Car il faudra remarquer (sinon admirer) la souplesse ingénieuse qu'ont ces musiciens de Brighton à passer d'un rock aux profondes résonances sur le titre Zeus - efficace avec son chant saturé, sa tension, son articulation - à une pop hybride et vitaminée à l'électronique et à l'Auto-Tune (ou au vocoder, difficile à discerner) sur l'ovni techno-rock KW-h.

S'il ne fait désormais plus l'économie du violons (écoutez le shoegazing rêveur de Cleaning Out The Rooms, quelque part entre Slowdive, Smashing Pumpkins et My Bloody Valentine), le combo sait aussi jouer la carte du rock n'roll et de la déconne en transformant une simple phrase (« Can We Do It? » du titre éponyme) en véritable accroche musicale. Dynamique, Mongk l'est aussi, parfois proche d'Interpol, dont la batterie incessante fait corps avec la basse et ses divers sons et mots qui viennent s'entrechoquer au reste.

Plus reposant (mais plus lassant aussi) sur le slow pop Bear, dont la mélodie pourrait rappeler celles d'Adam Green en moins séduisante, les britanniques s'affichent aussi avec un un titre complètement down-tempo, Pardon My Friends, qui a son charme : articulée par des notes de piano qu'on penserait jouées au hasard, la chanson envoûte par ses chœurs de cathédrales, son côté mystérieusement bancal et son épure. Enfin, dans un genre contemplatif, Retreat, morceau de clôture dont les cordes hautement réverbérés pourraient presque le faire passer pour du classique, est audacieux, mais au bout de huit minutes, la méditation a assez duré.

Ni rock, ni foncièrement pop, folk ou noise, British Sea Power se font une place au carrefour de ces genres. Sans doute est-ce pour mieux nous perdre ou nous guider à la sortie de leur prochaine galette.