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Festival Art Rock

Saint-Brieuc, du 20 au 22 mai 2010

Live-report rédigé par François Freundlich le 21 mai 2010

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jeudi 20
Le soleil s'est installé sur Saint-Brieuc pour une nouvelle édition du Festival Art Rock qui débute en ce jeudi avec des invités de luxe. Air & The Hot Rats vont interpréter dans le Grand Théâtre de la Passerelle la Bande Originale du film The Virgin Suicides de Sofia Coppola.

En première partie, le duo The Hot Rats entre en scène en essayant de réchauffer l’ambiance à l’avant scène. Le public acclame comme il se doit le chanteur et le batteur de Supergrass venus nous régaler pendant un court set de 25 minutes de reprises de groupes cultissimes. Un duo se voulant en réalité un quatuor puisque deux effrayants mannequins couverts de guirlandes lumineuses les accompagnent sur scène. J’essaye d’en faire abstraction alors qu’ils attaquent directement avec un son très puissant sur I Can’t Stand It du Velvet Underground. La voix de Gaz Coombes est à la hauteur de l’acoustique du lieu et l’on est à chaque fois surpris par l’interprétation de ces titres repris de façon très brute, parfois punk. De EMI des Sex Pistols à Damaged Good de Gang of Four en passant par les Beastie Boys avec Fight For Your Right (To Party), le duo enflamme un auditorium qui ne s’attendait certainement pas à une telle débauche de rock’n’roll.
Il est difficile de rester assis tant mes membres ont la bougeotte mais l’audience ne se lèvera jamais en dépit de l’appel de certains anglais au fond de la salle. Je les aurais volontiers suivis, mais je ne possède certainement pas le même charisme que l’homme au chapeau, à la marinière et à la voix profonde qui n’arrivera pas à bouger un public venu voir Air dans de confortables fauteuils. Malgré tout, la réponse entre chaque chanson est chaleureuse. Danny Goffey s’excite sur sa batterie, mise en avant, tandis que Gaz alterne les passages à la guitare électrique et surtout à l’acoustique, qu’il fait sonner assez délicieusement. Le tout donne un son qu’on aurait cru tout droit venu d’outre-Atlantique si la réputation des anglais ne les avait pas précédés. Un bon moment, à revoir dans des conditions plus appropriées.

Après une assez longue entracte, le duo se transforme en un véritable quatuor, vivant cette fois. Jean-Benoît Dunckel et Nicolas Godin, de blanc vêtus, sont acclamés dés leur apparition. Leur tenue contraste avec celle des Hots Rats, placés l’arrière de la scène, tout en noir : les voilà tous réunis dans l’îlot musical de Virgin Suicides.
Premier son de synthé de Jean-Benoît, rien d’autre que le crescendo d’introduction de Playground Love, accueilli par les cris d’une audience toute excitée. La voix de Gaz Coombes apporte une fraicheur à cette chanson déjà sublimée à l’époque par Thomas Mars (Phoenix). Avec sa guitare, il reste dans l’ombre des deux membres de Air à l’avant de la scène, Nicolas à la basse et Jean-Benoît enfermé par ses nombreuses machines. Malgré tout, c’est bien Gaz qui capte l’attention car il sublime l’interprétation d’une chanson inscrite dans la mémoire collective. Petit moment hors du temps, Time’s No Matter, pour une chanson qui transforme immédiatement l’auditeur en Highschool Lover. On ne peut que s’émerveiller. La Bande Originale de l’œuvre de Sofia Coppola est ensuite jouée dans l’ordre, comme il se doit, mais avec des interludes entre chaque chanson, lesquels tranchent malheureusement avec l’atmosphère particulière créée par les musiciens, d’autant plus que les titres sont assez courts.

Le set est bien entendu instrumental et l’on retrouve l’ambiance pesante, parfois oppressante, liée au film. Les interprétations respectent très fidèlement les versions studio, à l’exception de la batterie de Danny en surplus (bien que plus en retrait cette fois-ci) et une basse de Nicolas assez mise en avant. On redécouvre ces chansons si spéciales : les claviers mélancoliques de Bathroom Girl, la psychédélique Ghost Song et Highschool Lover, la version piano de Playground Love, parcourue d’un frisson encore plus profond que l’originale. Gaz ressort sa guitare acoustique claire pour Afternoon Sister et les scènes du film se rappellent à mon bon souvenir. Nous voilà projetés mentalement dans la chambre où les quatre adolescentes enfermées regardaient des catalogues de mode, ou dans une vision d’une Kirsten Dunst éclairée par le soleil.
Le tempo rapide de Dead Bodies permet une réminiscence de gestes épileptiques sur fauteuil moelleux alors que Danny Goffey peut enfin se lâcher à la batterie.
Gaz s’avance à cet instant à l’avant de la scène pour réciter le monologue de fin du film avec la voix grave et modifiée de la chanson Suicide Underground. L’occasion de repenser à certains détails oubliés de cette première œuvre qui en a fait réfléchir plus d’un(e). La voix robotisée termine seule, avant le silence et un public qui acclamera le quatuor par une standing ovation de plusieurs minutes. Un concert assez court, évidemment, compte-tenu la durée de la Bande Originale, et non prolongé par un rappel pourtant demandé. Le temps ne s’est néanmoins pas écoulé pendant ces quelques minutes de musique cinématographique.

Obviously doctor, you’ve never been a 13 year old girl…

La soirée n’est pour autant pas terminée puisque les programmateurs nous proposent une soirée danoise sur la scène du Forum de la Passerelle. Point de sirène ni de salami, mais un échange de bons procédés avec le SPOT Festival de Åhrus, se déroulant à la même date. Les concerts des groupes GaBLé et Montgomery sont retransmis en direct depuis le Danemark tandis que Oh No Ono et Lucy Love se succéderont sur la scène briochine.
Oh No Ono débarque sur la scène devant un public moins nombreux mais toujours présent. On s’attarde immédiatement sur le look spécial des compères, à mi-chemin entre des math-rockeurs effrayants et MGMT, ces derniers étant certainement leurs mentors musicaux. On est ensuite surpris par la voix très particulière de Aske Zidore qui n’a pas seulement le look du petit chaperon rouge mais également l’organe, à moins qu’il n’ait respiré plusieurs litres d’hélium avant le concert. Leur musique s’avère difficile à classer, entre The Beatles pour le psychédélisme et la basse de Paul Mc Cartney, Foals pour la précision, MGMT pour les accents synthé 80’s ou Radiohead pour la voix. Quoiqu’il en soit, un mélange qui n’a d’égal que leurs choix capillaires mais qui est parfois difficile à suivre sur certains passages. Ils parviennent néanmoins à entrainer un public assez attentif, sur certaines chansons plus efficaces. Leur pop foutraque séduit et la découverte est plaisante, malgré un son pas à la hauteur est une batterie trop omniprésente. A revoir dans d’autres conditions ; on espère en tout cas qu’ils auront retrouvé leur mère grand, sauf si elle s’appelle Yoko.

Après avoir accepté de redescendre du nuage Virgin Suicides pour applaudir Oh No Ono, se torturer les oreilles avec la rappeuse Lucy Love est trop demander. Beats électro frénétiques et répétitifs, flow envahissant et stressant, autant rester sur un bon souvenir et quitter Saint-Brieuc pour ce soir.

La journée d’ouverture a tenu ses promesses, à bientôt Art Rock !
artistes
    The Hot Rats
    Air & The Hot Rats play The Virgin Suicides
    GaBLé
    Montgomery
    Oh No Ono
    Lucy Love