logo SOV

Berlin Festival

Berlin, du 6 au 7 septembre 2013

Live-report rédigé par Amandine le 12 septembre 2013

Bookmark and Share
vendredi 6
Est-il encore utile de rappeler à quel point la capitale allemande est désormais un fleuron du rayonnement culturel européen et mondial ? Pour ceux qui ne l’auraient pas encore compris, Berlin a décidé de mettre les petits plats dans les grands pendant sa Berlin Music Week. Histoire de se mettre dans le bain, le quartier de Kreutzberg, rappelant le destroy de l’Est londonien, est pris d’assaut pour le First We Take Berlin dès le mercredi soir. Ainsi, une dizaine de salles, de Kulturhaus et autres lieux insolites verront défiler des concerts dans un contexte privilégié : de Parquet Courts aux excellents Jagwar Ma, nous ne pouvions que bien débuter cette semaine berlinoise faite de chopes de bières, de currywurst et de musique à foison.

Le point d’orgue de cette semaine berlinoise était le fameux Berlin Festival ; situé sur le site de Flughafen Tempelhof, l’ancien aéroport de Berlin. Il paraît difficile de ne pas faire un aparté tant le lieu est insolite et imposant.
Précurseur par son architecture massive mais permettant également de structurer les départs et arrivées des avions d’une manière optimale, Tempelhof a connu ses heures de gloire jusqu’au milieu du vingtième siècle. Périclitant ensuite face aux deux autres aéroports berlinois plus modernes, il ferme ses portes pour rouvrir en 2008 sous la forme d’un parc gigantesque, dépassant même par sa superficie le Central Park. Jamais à court d’idées, le Berlin Festival envahit donc les lieux le temps d’un week-end pour la reconversion la plus rock’n’roll qui soit.

Dès notre arrivée en début d’après-midi, nous sommes guidés depuis la sortie du métro par un personnel déguisé en contrôleur aérien avec gilet réfléchissant, faisant de grands gestes pour nous montrer l’entrée : pas de doute, le ton est donné. Nous nous retrouvons donc dans l’immense hall des arrivées, avec comptoirs d’enregistrements des bagages aujourd’hui reconvertis en guichet pour récupérer son bracelet et panneau d’affichage qui, au lieu de nous prévenir des prochains vols, nous renseigne sur le déroulement des concerts sur les différentes scènes. Déambuler dans les couloirs quasi déserts d’un lieu qu’on imagine encore bondé il y a quelques dizaines d’années procure un sentiment étrange et difficilement explicable. L’imposante architecture de béton nous enveloppe et lorsque nous descendons les derniers escaliers pour nous retrouver sur le tarmac, éblouis par le soleil radieux, le dépaysement est total : la « grande scène » à une extrémité (allons-nous réellement voir Blur et Björk sur une si petite scène ?!) et les trois autres sous les hangars alors qu’au milieu, les nombreux bars et stands fleurissent un peu partout. Comme il y a encore très peu de monde, nous pouvons jouir dans les meilleures conditions du lieu et nous imprégner de l’atmosphère si particulière.

SOV

C’est donc sans nous presser que nous nous rendons vers la Grande Scène pour le lancement de ce Berlin Festival cru 2013. C’est sur le Twin Peaks Theme d’Angelo Badalamenti que déboulent Bastille. Le phénomène Outre-Manche ne déchaîne pas les foules et d’ailleurs, la pop sucrée trempée dans le miel pour en rajouter une couche ne parviendra jamais à nous charmer. Nous préférons donc traverser le site afin de nous rendre sur la scène la plus excentrée qui verra défiler du très beau monde durant ces deux jours. Comme à sa désormais habitude, c’est Pitchfork, géant de la musique indépendante, qui sponsorise cet espace et pour l’inaugurer, ce ne sont ni plus ni moins que les talentueux Parquet Courts qui viennent mettre le feu durant une quarantaine de minutes.

SOV

Le hangar est désespérément vide et sage, si ce n’est le chanteur de The Blood Arm qui brandit des panneaux à la gloire des énergiques Américains. Affublés de leurs tee-shirts Neil Young et Dinosaur Jr, ils déroulent leur rock garage crasseux, enchaînent les brûlots devant une assemblée quasi amorphe. Le jeune groupe confirme son talent et la désinvolture de ses deux chanteurs, couplée aux riffs endiablés de guitare, laisseront un petit goût amer : les voir jouer un peu plus tard, devant des spectateurs plus réactifs aurait mieux rendu justice à ce groupe encore trop méconnu.

SOV

Changement de hangar et d’atmosphère avec NYPC, ex-New Young Pony Club, et leur chanteuse charismatique. A la batterie, nous retrouvons Sarah Jones, récemment aperçue sur scène en compagnie de Bloc Party ou encore Hot Chip. Si le trio ne lésine pas sur l’énergie, le public, lui, peine encore à se faire entendre et arrive un moment où il est difficile de savoir si l’ambiance manque à cause des groupes ou des spectateurs qui, en plus d’être peu nombreux, ne montrent que peu de signes d’enthousiasme et de motivation. Comme nous l’avions constaté un peu plus tôt dans la semaine lors des showcases du First We Take Berlin, les Berlinois ne se sont pas déplacés en masse, malgré une affiche très alléchante ; la faute à la crise ?

SOV

Sur ces questionnements de premier ordre, nous repartons sur la Pitchfork Stage pour profiter d’une énième représentation de Villagers. En tournée depuis maintenant plusieurs mois, leurs prestations se multiplient et se réinventent, comme nous aurons à nouveau l’occasion de le constater aujourd’hui. Les réorchestrations d’anciens titres comme The Pact ou de nouveaux comme Nothing Arrived viennent magnifier les compositions du charmant Conor O’Brien. D’habitude très introverti, le jeune homme profitera d’une version épique de The Waves pour monter sur les enceintes et tomber ses lunettes de soleil avant de terminer, crescendo, sur Earthly Pleasure et Shape Of Promises. Lyrics, mélodies, charisme, Villagers ne manque pas de virtuosité et ils réussiront à réveiller le public grâce à un concert magique, d’une beauté toujours plus grande avec le temps.

SOV

On continue d’ailleurs dans la sensibilité avec les grandes stars germaniques de Get Well Soon. Si leur succès en France reste confidentiel, il l’est beaucoup moins en Allemagne où ils sont accueillis comme de véritables stars. Get Well Soon, c’est un peu comme Arcade Fire sans le côté mégalo et ayant préféré rester sur le crédo de la pop lyrique : harmonies vocales, profusion d’instruments, on ne peut rien leur reprocher, si ce n’est l’heure qui avance et avec elle le début de l’ultime concert de la journée, tant attendu.

SOV

Nous décidons donc de rejoindre la Grande Scène pour danser et chanter avec les Pet Shop Boys. La foule est compacte, chantante et dansante, ce qui est de très bonne augure pour le spectacle du duo anglais. Avec une setlist remaniée par rapport à celle de leur Electric Tour, ils réussissent à mettre le feu, malgré de gros problèmes de son récurrents, à coups de West End Girls ou It's A Sin : toujours aussi efficaces mais notre cœur s’emballe déjà à l’idée de ce qui va suivre.

SOV

La malédiction : pas pour vous, vous êtes bien au-dessus de ces superstitions de bas étage et pourtant, force est de constater que depuis plus de quinze ans, vous multipliez les rendez-vous manqués avec l’un des groupes qui a bercé votre adolescence et que vous n’espériez même plus voir. Avec une honte à peine dissimulée, vous devez bien avouer que si vous avez passé cette semaine à Berlin, c’était tout de même en grande partie pour eux et à quelques minutes du début du concert, fébrile, vous vous rendez compte que finalement, le moment est venu. La tête d’affiche de ce premier soir a amené son lot de fans d’Angleterre et d’ailleurs, arborant les tee-shirts à l’effigie de Damon et ses acolytes. C’est sous le coup de 22h30 que Blur arriveront sur scène en entamant, pied au plancher, Girls and Boys. Niveau setlist, peu de surprises puisqu’elle est la même que sur les dates précédentes, Popscene ayant simplement été remplacée par To The End, mais pourquoi bouder son plaisir en entendant des There's No Other Way, Country House ou Coffee & TV ? Les quatre compères, après une remise en forme méritée, sont aussi frais qu’il y a un peu plus de vingt ans : on retrouve Alex James, clope au bec et sourire en coin, gratouillant sa basse, tandis que Graham Coxon, lunettes de geek vissées sur le visage, maltraite sa guitare et que Dave Rowntree s’acharne sur ses fûts. Quant à Damon Albarn, il est en grande forme : mutin, il asperge de bouteilles d’eau photographes et spectateurs, saute de partout et s’accapare la scène en l’espace de quelques secondes. L’ambiance est quant à elle à son paroxysme : les spectateurs chantent et dansent, hurlent lorsque Damon Albarn vient chanter dans les premiers rangs, attrapant et revêtant les lunettes d’un jeune homme. Entre titres survoltés et ballades, nous avons droit, durant plus d’une heure trente, à un florilège de pépites issues de la discographie de Blur pour l’apothéose sur un final The Universal/Song 2 où l’on ne sait finalement plus qui et où on est, un immense sentiment de bonheur nous parcourant.

Il nous faudra de longues minutes pour atterrir de cette fin de journée riche en émotions. Rapidement, le site se vide, de nombreuses personnes partant continuer les festivités dans les différents clubs. Ébahis, assis au milieu des gobelets vides qui jonchent le sol, les derniers survivants partagent un dernier verre, rêvant déjà aux futurs souvenirs qui viendront s’ajouter demain.
artistes
    Blur
    Pet Shop Boys
    Villagers
    Parquet Courts
    Get Well Soon
    Bastille
    Capital Cities
    The Sounds
    MIA.
    Bosnian Rainbows
    Tomahawk
    John Talabot (live)
    Big Black Delta
    Blitzkids Mvt.
    OK Kid
    NYPC
    FENECH-SOLER
    Dumme Jungs
    Left Boy
    The Majority Says
    Caracol
    Brodka
    Say Yes Dog
    Asbjorn
photos du festival