Mush

Leeds est le nouvel Eldorado anglais pour le rock. Que de talents issus de cette ville du Nord qui a longtemps porté en unique étendard Kaiser Chiefs ces vingt dernières années. Sans aucune méprise, grand bien lui en a pris, mais depuis le glissement de ces derniers dans la catégorie pop FM des bacs à disques, c'est un réel soulagement de sentir que Leeds redevient un terreau fertile à la pousse de talents iconoclastes et définitivement plus borderline. Yard Act, The Cribs, English Teacher... La source d'approvisionnement ne fait que s'agrandir et c'est tant mieux. Ainsi, Mush, quartet toujours mené par le chevelu Dan Hyndman, nous propose en ce début d'été rayonnant son troisième album Down Tools qui, en plus de souligner son activité prolifique (un disque tous les ans), crante définitivement le groupe dans la catégorie « valeur sûre » de la grande ville du Yorkshire.

Nous avions quitté Mush en novembre dernier, lors de leur prestation parisienne au Supersonic à dans le quartier de la Bastille, et ce dans les meilleures conditions qui soient : un club plein comme un œuf et un accueil des plus chaleureux, les mouvements légendaires de sa petite fosse battant leur plein et la queue à l'extérieur laissant sur le carreau les retardataires. L'album présenté alors, Lines Reducted, avec ses accents revendiqués « Fall-ien », prouvait qu'il fallait prendre au sérieux le groupe grâce à des références solides et cette capacité à les retranscrire dans un son qui était bien le sien.


Qu'attendre par la suite du difficile troisième album ? Eh bien, selon Dan Hyndman lui-même, le disque revendique un esprit plus léger et cherche de façon simple à nous divertir. Un peu fatigués des diatribes certes justifiées contre la politique désastreuse de son pays, Mush proposent une transition vers un rock qui, pour cette fournée, nous ramène en plein dans les années 90, au moment où le grunge de Seattle commençait à s'essouffler, tout comme ses chemises à carreaux et ses jeans déchirés (vous noterez que les modes vestimentaires sont, comme les modes musicales, un éternel recommencement), pour ouvrir grandes ses portes à la mode du rock slacker, où le DIY dominait tant dans les guitares dissonantes que dans les chants plus qu'approximatifs. Les rois en étaient Pavement et, ici, Mush nous prouvent que les leçons du passé ont bien été apprises.

Les douze titres de Down Tools reflètent cette (presque) sortie du tunnel à la suite de la pandémie et ses multiples confinements. Un ras le bol général qui amène ainsi les musiciens à se défouler et à se faire tout simplement plaisir. Les thèmes abordés se concentrent sur les petites péripéties du quotidien (Human Ressources, Group Of Death, Dense Traffic), le tout mis en musique avec ce duel de guitares entre Dan Hyndman et Myles Kirk créant tout du long cette espèce d'anarchie très bien maitrisée. Le chant, ou plutôt les oscillations vocales de Dan Hyndman, reflète cet esprit foutraque et désinhibé qui tape dans l'oreille dès la première écoute.


Cependant, une certaine linéarité se fait sentir au bout de quelques titres. Peut-être cette bouffée d'oxygène assez délirante aurait elle méritée un timing plus court afin de gagner en précision, l'empreinte musicale étant fortement ancrée dans ce revival indie 90 qui pèse un peu sur la longueur. Mais on ne boude absolument pas son plaisir avec ce disque qui apporte une sacrée bonne dose de fun et d'énergie.

Les membres de Mush se préparent à une belle tournée française avec pas moins de sept dates en octobre qui les mèneront à Angers, Bordeaux, Nantes, Lyon, Tours, Paris et Lille. Aucune excuse donc pour ne pas aller découvrir sur scène un groupe aujourd'hui reconnu par ses pairs et qui, après un premier passage à Glastonbury réussi cet été, ne cesse de se déployer au Royaume-Uni et on l'espère vite par chez nous.