The Kills

Les news au sujet de The Kills ne peuvent être toutes mauvaises. Ainsi, cette fois, personne n’aura la mauvaise idée de vous apprendre que le duo Alison Mosshart et Jamie Hince se décide à faire de nouveau la première partie de Metallica. Pardonnez ce trait d’esprit certainement un tant soit peu mal placé, mais combien d’entre vous n’ont pas le souvenir de ce regrettable épisode où un cerveau bien peu inspiré a pu imaginer que la musique de The Kills pourrait satisfaire 80 000 chevelus imbibés de mauvaise bière juste avant l’arrivée des Four Horsemen sur scène ? Cette fulgurance a pourtant traversé un esprit certainement en grande détresse un beau jour de 2012. On peut aussi s’étonner que Mosshart et Hince aient pu accepter le deal. Seule la perspective d’un chèque conséquent a pu engager ce mariage irrationnel qui a valu le désastre que l’on connaît, Alison Mosshart quittant la scène avec fracas saluant le public taquin d’un lever du majeur rageux.

Mais là n’est pas notre propos, puisqu’après un silence de six ans, uniquement troublé par la sortie de la compilation Little Bastards en 2020, voici God Games, leur nouvel LP. Il s’inscrit au final dans une certaine continuité de Ash And Ice, l’album précédent qui avait vu le groupe s’essayer à de nouveaux jouets en raison notamment de la blessure à un doigt de Hince.
Cette blessure avait poussé les deux protagonistes vers l’utilisation de samples, et de divers matériels électroniques permettant à The Kills de s’aventurer sur de nouvelles contrées. God Games fonctionne sur cette même ligne à l’image de ce qui est proposé sur le vaporeux et mélancolique Going To Heaven, et sur le très réussi LA Hex, aux volutes évanescentes qui mutent vers une ambiance gospel vraiment bien sentie.

Avec My Girls, My Girls, ou le très émotionnel Blank au charme désuet, le duo démontre une belle faculté à accrocher son petit monde, et prouve une nouvelle fois que sa musique dépouillée peut néanmoins regorger de petites choses qui suffisent à agrémenter son univers. Tout fonctionne également à merveille sur le titre éponyme, bien pensé et touchant au cœur sa cible. Tout cela est plutôt engageant, en dépit de la volonté affichée du groupe à sérieusement ralentir le rythme.
Faut-il y voir l’influence grandissante que prennent les machines, au détriment des guitares rageuses ? Possible, toujours est-il que les nostalgiques de Last Day Of Magic risquent de trouver le temps bien long, et le rock mélancolique de Better Days ou de 103 ne parviendra pas à faire illusion longtemps. Car malgré ces bonnes choses, le sentiment que le groupe ronronne est trop présent pour que God Games réussisse à convaincre totalement. Trop quelconques, New-York ou Kingdom Come laissent une impression de déjà-vu qui n’est pas forcément rédhibitoire, mais même ce Bullet Sound, pourtant bien pensé, ne maintient que trop difficilement l’ensemble à flot. La chute est assez raide sur Love And Tenderness, claudiquant jusqu’à l’effondrement, malgré les efforts vains d’Alison Mosshart.

L’empreinte de The Kills est indéniable, et on ne peut que louer une carrière où le duo a mené avec un brio évident un DIY qui lui a ouvert les portes d’une reconnaissance mondiale. Néanmoins, le constat à ce jour est assez implacable et malgré une redirection artistique plus ou moins forcée, Mosshart et Hince ne parviennent pas réellement à se renouveler ou apporter une plus-value à leurs précédents travaux. Pire, certains morceaux de God Games se révèlent clairement dispensables. Le problème est que les titres les plus intéressants peinent à remonter l’ensemble. Au final, ce nouvel album a tous les signes pour tomber dans l’oubli. Mais The Kills est plus qu’un groupe, c’est une marque, une marque qui permet de fréquenter la jet-set et assurer de belles premières parties.

À ce propos, si quelqu’un a le numéro de Dave Mustaine...