Tom McRae

Trois ans après son opus King Of Cards, Tom Mcrae est de retour avec un cinquième album, The Alphabet Of Hurricanes, qui vient marquer d'une certaine manière un tournant dans sa discographie. Les fans de ses premiers succès folk à l'eau de rose vont toujours sentir chez le songwriter anglais une sensibilité évidente mais aussi découvrir une facette plus profonde et exaltée de sa musique.

Tom McRae semble avoir tiré profit des deux dernières années qu'il a passées à New York pour faire le vide autour de lui et pousser encore plus loin son rapport à la musique. Dans sa maison londonienne, il a ensuite aménagé un studio d'enregistrement et fait l'acquisition d'instruments au son typique : banjo, ukulélé, mandoline, violons ou piano imprègnent totalement l'univers de ce disque, à la fois doux, virevoltant, ouvert et puissant.

A l'écoute de ces douze nouveaux morceaux, plus concis, Tom McRae a gagné en efficacité et en accroche. C'est d'ailleurs en quelques secondes qu'il parvient à charmer la plupart du temps, dés que sa voix angélique et si touchante se met à bercer l'auditeur sur fond de piano et de guitares folk. Le chanteur prouve ainsi son vrai talent de mélodiste sur le guitare-voix American Spirit, la mélodie bricolée au ukulélé de Still Love You, le piano en retrait d'Out Of The Walls, somptueusement arrangé de choeurs et d'une harpe, ou encore sur Fifteen Mile Downriver, morceau de clôture qui donne l'harmonica une magie incandescente.

Mais si le spleen émotif est souvent séducteur, il peut parfois tomber dans l'écueil de la sensiblerie et du pathos. Fort heureusement, Tom McRae évite le piège d'un sentimentalisme déprimant en offrant parfois une sensation de bien-être et de volupté via quelques titres à l'énergie bienvenue : Won't Lie invite ainsi à la danse avec sa mélodie binaire, sa clarinette folle, ses violons et son banjo balancés, et le dramatique Told My Troubles To The River séduit par son coté intriguant et bancal. Mais c'est encore Me & Stetson – sans doute son meilleur morceau – qui vient donner un zeste de force supplémentaire à l'album via son horde de cuivres, son chant vindicatif et sa guitare terriblement accrocheuse.

Ajoutez à cela un sens absolument maîtrisé de la production - Summer Of John Wayne en est l'exemple parfait avec sa batterie caverneuse et ses guitares bruitistes, tout comme Please et ses choeurs enivrants – et vous aurez une idée assez complète de ce que Tom McRae est en 2010 : un artiste qui ne fonctionne qu'à l'émotion ; qu'elle soit douce et fragile ou scintillante et plus à vif, elle procure en tout cas à cette œuvre une sincérité et une beauté redoutables.