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stay lunar
Zo Lief
Dim Imagery
Pennine Suite
Hot Face

Paris, Supersonic - 24 août 2023

Live-report par Adonis Didier

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C'est la rentrée ! Une rentrée annoncée par les premières files d'attente devant le pont de Saint-Cloud et l'arrivée de Rock en Seine, à la manière d'un Ça cartoon débarquant avec une précision horlogère chaque dimanche pour nous remplir de rires et du sentiment que, demain, c'est école. Tous les parisiens sont donc, en cette fin de semaine, bien évidemment rassemblés sur la pelouse de Saint-Cloud pour admirer le bedonnant chanteur des Viagra Boys et l'entrain légendaire de Brian Molko, à même de faire passer l'enfant de François Fillon et d'une huître de Marennes pour un parangon de charisme. Tous, vraiment ? Non, car quelques irréductibles rockeurs d'intérieur se sont encore donné rendez-vous dans l'incontournable Supersonic, pour le classique qu'est désormais la soirée TGBB, a.k.a They're Gonna Be Big, numéro 13 de son prénom.

Numéro 13, mais ça va, c'est jeudi, et on a Zo Lief pour mettre en branle le contre-sort, dès 20h, in the Supersonic Records. Un duo jeune femme / jeune homme tout droit sorti des années 60, foulard à fleurs autour du cou, harmonie pantalon blanc cassé et top orange pour la chanteuse et guitariste néerlandaise Laura Chen, veste en lin et slim noir pour le guitariste, claviériste, et lanceur de boîte à rythmes anglais James Attwood. Une petite douceur pour bien commencer la soirée, leur musique est un kaléidoscope de bonbons, une pop brillante, cotonneuse, sublimant la lumière qui s'en échappe par des volutes de voix enfumées. Alors on ferme les yeux, et on se laisse porter, en demandant une chaise longue et une piña colada au serveur, qui nous répondra aimablement « mais vous êtes qui vous, je suis pas serveur moi ! ». On souhaite en tout cas une longue carrière à Zo Lief, dont le premier EP sucré nous a déjà transportés, et dont on comprend bien mieux maintenant ce qu'ils faisaient en première partie de Temples au début de l'année.

Une fois n'est pas coutume, changement de salle et changement d'ambiance, ce sont les mystérieux Hot Face qui reprennent le doux flambeau laissé par Zo Lief, tout ça pour l'éclater par terre comme des sauvages. Bas les masques, les trois animaux à l'imagerie carnavalesque nous dévoilent enfin leurs visages, et leurs intentions, alors que le riff d'Interstellar Overdrive (ndlr : pièce maîtresse du meilleur album de Pink Floyd) version stoner leur sert d'introduction en page 1. Un batteur-chanteur avec un bandana à fleurs sur la tête, un guitariste à rouflaquettes tout droit sorti de Good Morning England, et pourtant c'est surtout une bande de punks vénères que l'on retiendra de ce concert, un concert où déboitages à la Frankie & The Witchfingers s'entrechoquent avec des instants plus enfumés, voire chaloupés, comme sur une Monster House magistrale aux tiroirs et cassures infinis, que le public reprendra toutefois timidement, et bien parce qu'on lui a demandé. Un public plutôt tranquille, comprenez-le il est à peine 21h, qui ne s'enverra pas plus en l'air que ça malgré une fin en trash punk fumant les pneus à 200bpm. Sentiment mitigé donc, pour un groupe énergique mais décousu, dont on attend d'en savoir un peu plus sur eux avant de complètement pouvoir les juger, pas aidés par une « foule » encore en plein digestion.

Mais la soirée est loin d'être finie, et c'est une très belle découverte qui nous attend à deux pas de là, au... wait for it... Supersonic Records ! OK, un effet de surprise bien plus mauvais que ne l'était l'entrée de Peninne Suite sur la petite scène du Records, une scène qui s'agrandira à chaque chanson et à chaque intervention du frontman chanteur Nick Aldous, animal social animé par les dieux de l'ambiance, pour un concert rafraîchissant, fun, sans prise de tête si ce n'est pour la secouer dans tous les sens au son d'une pop-rock simple et terriblement efficace. Une pop-rock rappelant sans conteste les Killers, ou plus récent et britannique, Catfish & The Bottlemen (RIP) et The Luka State, que l'entrain des cinq musiciens jouant les uns sur les autres nous envoie pleine balle dans les conduits auditifs, sans consentement ni préliminaires. Vous étiez venus vous emmerder, dommage pour vous, les natifs du Yorkshire en ont décidé autrement, et puis soyez gentils et hurlez Yorkshire bien fort with the rest of us. Une standing ovation suivant la magnifique prestation vocale de la claviériste Louise Watkins qui conclut Make Up, et les superbes Scottish Snow et Pass On You pour boucler une prestation déjà très adulte d'un groupe dont on attend maintenant impatiemment un premier EP, histoire de réchauffer nos cœurs pour l'hiver à venir, après avoir réchauffé la clim pourtant poussée à fond du Records.

En manque de transition, voici venir Dim Imagery, imagerie pas ouf en VF, un nom au niveau des métaphores qu'il me reste pour les deux derniers groupes de cette soirée, vous êtes prévenus. Débarquant leur post-punk de Leeds, c'est avec l'impression d'avoir déjà entendu cette chanson six-cent-vingt fois que l'on reçoit l'introductive You're Doing So Well. Une très bonne chanson au demeurant, et un Matt Bond habité comme jamais au chant qui, s'il n'avait fait de la musique, aurait pu finir prédicateur sur la place publique, du genre à vous enjoindre à passer au bûcher tous ces hérétiques imperméables à la culture punk. Un concert assez « déjà-vu » dans lequel on a du mal à rentrer, ce qui n'est visiblement pas le cas d'un public qui cherche les pogos même là où il n'y en a pas, la faute à un couple basse-batterie qui, faute d'originalité, bounce le sol de la salle comme une balle sur le plexiglass d'un terrain de squash (vous étiez prévenus, faites pas les surpris). Mais voici maintenant le plat de résistance, Fishing In An Empty Stream et son “home is where the heart is, but you're also far from home”, le mantra d'un chanteur possédé, nous renvoyant au souvenir de TV Priest une année plus tôt. On commence seulement à s'éclater que déjà les guitares se taisent, nous laissant sur notre faim après une petite demi-heure d'un groupe dont on attendra plus qu'une intéressante première expérience live pour se souvenir du nom.

Et c'est sans transition, et sans bouger du Supersonic Club, que se présente le dessert de la soirée, la petite mousse légère à la framboise surmontée d'une cerise et d'une feuille de menthe (nan vraiment vous étiez prévenus), stay lunar. Cinq petits gars de Bristol se définissant comme des chansons tristes sur de petites scènes, et on ne contredira ici que l'une des deux parties, car quelle que soit la tristesse des chansons, elles n'en sont pas moins de petites passerelles dream pop vers le bonheur, des ailes de nuage poussant de part et d'autre des Converses qui, sans que l'on s'en rende compte, les yeux fermés, les paupières couvertes de lumière mauve, nous auraient déjà amenées au septième ciel si seulement le plafond du Supersonic n'était pas plus bas que le paradis. Un concert passé dans un rêve, un rêve dans lequel le peuple parle japonais, espagnol, anglais, dans lequel un spectateur offre une couronne d'épiphanie au chanteur Harry Leigh, mi-gêné mi-ému de ce couvre-chef inattendu, un rêve dans lequel Distance succède à la sublime I Like It When You're Around. Décidément il faudrait savoir, surtout quand la dernière chanson s'appelle Dreaming That I'm Not in Love. Car nous aussi on aimerait ne pas tomber amoureux du premier groupe de dream pop venu, touriste anglais de passage pour une nuit dans la ville lumière, repartant au petit matin avec sa musique enjôleuse et ses chansons romantiques sur les ponts de Paris.

Au final, stay lunar et Zo Lief, deux coups de cœur dream pop pour un plan à trois dans la lune, et puis Pennine Suite, qui donnent déjà l'impression de n'avoir plus rien à prouver sur scène alors qu'ils n'ont même pas sorti un EP. Une soirée bien remplie en somme, qui ne met que plus de hype sur la prochaine, alors rendez-vous le 20 septembre prochain au Supersonic pour, encore une fois, crusher sur des groupes avec trois chansons au compteur, une chose que l'on s'était promis d'arrêter, mais l'amour a ses raisons que la raison ignore !
setlist
    Zo Lief
    Non disponible

    Hot Face
    Non disponible

    Pennine Suite
    M.O.W.O
    Only Human
    Coming Up For Air
    Far
    Typical Fantasy
    Make Up
    Impatience
    Scottish Snow
    Pass On You

    Dim Imagery
    You're Doing So Well
    Ghosts
    Violence
    Name
    Fishing In An Empty Stream

    Stay Lunar
    Immediately
    Anywhere / Everywhere
    I Like It When You're Around
    Distance
    Before You Go
    Car Seat
    Keeping Me Up All Night
    Dreaming That I'm Not in Love
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