Dry Cleaning

Décidément on n'arrête plus Dry Cleaning. Les quatre londoniens du sud semblent décidés à conserver l'inertie qui les fait avancer. Qu'on en juge : formation en 2017, premier album en 2021, puis successeur en 2022. Voici aujourd'hui que nous est présenté Swampy, EP de cinq titres, quelques mois seulement après la sortie de Stumpwork.

Avec Swampy, la bande de Florence Shaw dévoile un morceau à l'ambiance poussiéreuse et sombre, comme si les grands espaces américains s'étaient immiscés dans leurs esprits et leur musique. Non pas que Dry Cleaning se soient mutés en Wovenhand, pourtant il y a bien ici une atmosphère singulière, assez inédite et éloignée de ce qu'avait montré le groupe jusqu'alors, mais nous y reviendrons.
Il faut dire que sans appréhender Stumpwork comme une redite de l'excellent New Long Leg, les risques de voir Dry Cleaning se retrouver coincés dans une impasse paraîssaient importants tant le chant parlé de Shaw est stéréotypé, tant le groupe fonctionne sur une dynamique qui pourrait paraître immuable. Ainsi, sur Swampy, la même recette est appliquée dans ses fondamentaux. Pourtant, la nuance se dessine de façon assez évidente dans les couleurs posée ici. C'est bien évidemment du Dry Cleaning, mais la volonté de s'éloigner de la grisaille anglaise des premiers essais apparaît assez nettement. C'est en tous cas très réussi et ne trahit en rien tout ce qui a été réalisé depuis les débuts.

L'instrumental Sombre Two, bien nommé s'il en est, semble confirmer les intentions de Swampy dans son approche. Ici, la guitare slide est déchirante et le thème fort, à tel point qu'une exploitation plus en profondeur n'aurait pas été à regret. Le dernier titre original se nomme Peanuts mais n'est rien de plus que la reprise instrumentale de Anna Calls From The Arctic, morceau d'ouverture de Stumpwork. La démarche peut surprendre même si elle n'est pas inédite sur un EP. Arrivé ici, d'aucuns seraient tenter de se dire qu'il est surtout question de faire du remplissage et il est difficile de ne pas s'interroger sur la raison d'être de cet EP.

Pour écarter nos doutes, il faudrait de belles surprises avec les deux remixes qui complètent ce Swampy, et à ce stade de notre affaire, personne n' y croit vraiment. Malheureusement, ce n'est pas le remix de Hot Penny Day par Charlotte Adigery et son compère Bolis Pupul qui nous fera revoir notre copie. Le travail du duo ne fait pas vraiment hommage au titre original, et se perd dans des méandre électroniques et rythmiques qui ont de quoi laisser perplexes les amateurs de Dry Cleaning tant il s'éloigne de l'essence qui fait la renommée de la formation.
Il faudra donc entendre reparler de cette impayable tortue et de ses déambulations anarchiques dans ce jardin anglais pour nous faire faire machine arrière. Avec le remix « Nourrished By Time » de Gary Ashby, on retrouve le titre original dans son ambiance. L'ajout d'une voix masculine, n'est pas déplaisant et se mêle avantageusement au spoken word de Florence Shaw. Surtout, les nappes de claviers délicates apportent une nouvelle perspective tout a fait satisfaisante et plaisante sans amener une relecture totale de l'original qui risquerait de tout dénaturer.

Vous serez toujours à temps de disserter sur l'intérêt de sortir un EP avec au final un seul véritable morceau original si vous excluez le court instrumental Sombre Two. Ce n'est pas toujours le cas, loin s'en faut avec les remixes, mais cette nouvelle version de Gary Ashby est tout à faire réjouissante et vaut le détour. Mais point essentiel, Swampy EP, via son titre éponyme, a le mérite de présenter de nouveaux horizons pour le groupe qui pourraient lui permettre d'échapper à la redite qui lui semblait destinée. Swampy est un morceau qui ouvre peut-être une nouvelle ère pour ce groupe talentueux. Voilà de quoi vous donner une bonne raison de prêter une oreille à cette histoire, et d'attendre la suite avec impatience.