Blood Red Shoes

D’abord un, puis deux, et maintenant trois. Toujours aussi soudés après sept années de collaboration (et oui, déjà), les Bonnie & Clyde du rock indépendant reviennent une nouvelle fois aux affaires, faisant de plus en plus figure de chiens au milieu d’un énorme jeu de quilles : là où la majorité de leurs camarades usent, et parfois abusent, d’effets électroniques et autres fioritures rythmiques, Laura-Mary Cater et Steven Ansell persistent dans ce style minimaliste autant que frontal qui est le leur depuis 2006. Guitare, batterie, deux voix qui s’entremêlent... what else ?

Symbole de cette jeunesse qui leur colle décidément bien aux basques, nos amis de Blood Red Shoes sont du genre têtu, et In Time To Voices s’inscrit donc dans la parfaite lignée de leur modeste discographie. Pour être tout à fait exact, il assure même une délicate, car attendue, transition avec leur précédent album ; en résulte de fait une musique nettement moins agressive qu’à leurs débuts, et qui semble toujours plus emprunte de douceur, même si, ne nous y trompons pas, les guitares ne sont de loin pas encore grippées.
D’ailleurs, et ce parce que tout est histoire de paradoxes, c’est sur ce nouvel opus que le duo nous livre son morceau le plus féroce jamais écrit depuis Meet Me At Eight/Stitch Me Back, un Je Me Perds aussi punk qu’il est jouissif, et qui vient trancher, de sa lame affreusement acérée, avec le reste de l’album, des morceaux comme Slip Into The Blue, Two Dead Hours ou encore Silence And The Drones en tête.

Ceci étant, et malgré cette tendance forte à l'endormissement, Blood Red Shoes savent encore comment faire parler la poudre, et on se délecte ainsi sans mal de titres comme In Time To Voices, Lost Kids, ou Cold (premier single vrombissant, mais un brin poussif), devinant d’avance avec quelle facilité ils nous feront suer lors des prochains concerts du groupe.
Riffs de guitare tranchants, et ce même si certains ponts sont propices à l’accalmie, jeu de batterie impitoyable, chants puissants et parfaitement complémentaires, les meilleurs ingrédients sont là, et, pourtant, on ne peut s’empêcher de faire les rabat-joies. Parce que de ces moments là, il n’y en a pas assez, en fait. Et aussi parce que, même s’il y en avait plus, il serait maintenant temps que le duo enlève ses œillères au risque de s’étouffer dans sa propre musique.

Car en dépit de l'extrême sympathie que l'on a pour le groupe, et de ses bonnes intentions affichées (Down Here In The Dark coloré à la The Kills), le tout commence tout doucement à sentir le renfermé. Blood Red Shoes reste un peu trop Blood Red Shoes. Laura-Mary et Steven affirment vouloir continuer à faire ce qu'ils savent faire. Soit. Mais attention, car à être trop borné, parfois, on en devient aigri.