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The Pop Group

Citizen Zombie

The Pop Group - Citizen Zombie
Chronique Album
Date de sortie : 23.02.2015
Label : Freaks R Us
2
Rédigé par Olivier Kalousdian, le 20 février 2015
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Trente-cinq ans qu'on n'avait plus entendu un nouveau titre de The Pop Group. Rappelons-le, The Pop Group font partie de ces météores du post-punk qui ont traversé l'univers contestataire en un éclair, le temps pour eux de produire deux albums (Y, en 1979, puis For How Much Longer Do We Tolerate Mass Murder en 1980) puis de se séparer, en désaccord sur de nombreux sujets – comme nombre de groupes de l'époque – l'année suivante.

Bien avant le trip-hop et Massive Attack ou la série TV Skins, Bristol la multiculturelle s'était faite remarquer pour sa scène musicale reggae, ses live mêlant de nombreuses culture et, parfois également ou pour ses émeutes (1981/1986) qui prirent à chaque fois racine dans la communauté jamaïcaine, accusée, souvent à tort, d'être pourvoyeuse de trafics de drogues dures. Dans quelle galère, un des groupes les plus abstraits du post-punk se sera-t-il fourré en choisissant de sortir un nouvel album, trente-cinq ans après le dernier en date, et alors que son aura est devenue, au fil du temps, légendaire pour des artistes essentiels comme Nick Cave (qui n'hésite pas à les citer comme source d'influence du Birthday Party à la fin des années 70) ?
Certes, Mark Stewart avait tenté, dès 2010, une reformation hasardeuse en conviant ses ex-collègues, Gareth Sager, Dan Catsis et Bruce Smith à quelques concerts en Europe (quelques passages en France comme à l'Étrange festival à la Machine du Moulin Rouge), mais cette tournée était passé quelque peu inaperçue. Laissant planer le doute sur de nouveaux titres sur lesquels ils travaillaient, voici que sort leur tant attendu nouvel album, Citizen Zombie. Ni punk, ni pop, The Pop Group explorent et combinent des styles qui vont du funk à l'expérimental en passant par le dub, l'avant-jazz et le proto-punk. Un fourre-tout aventurier et musicalement dissonant dans lequel, les Bow Wow Wow, pour ne citer qu'eux et dans une veine plus mélodique, avaient également excellé.

Enregistré dans le studio de Paul Epworth à Londres, Citizen Zombie fait perdurer les velléités provocatrices de ce groupe quelque peu oublié. Onze titres (aux noms bien trouvés) et une déferlante de guitares noisy, de percussions syncopées ou synthétiques, agrémentées d'un chanteur qui emploie encore et toujours la modulation (aiguë) de voix en guise de marque de fabrique. Free jazz robotique sur, Box9, répétitions synthétiques sur le punk rock androïde de Nations (le meilleur titre de l'album) ou encore noisy rock sur le titre éponyme, Citizen Zombie, l'album est un condensé de ce que savaient faire The Pop Group à une époque de « no future » où le message et l'engagement comptaient bien plus que la ligne mélodique et le groove d'un titre.
En cela et pour ses textes politico-poétiques, Citizen Zombie est une suite logique – même si trente-cinq ans après, on ne peut pas vraiment parler de suite – à leur carrière éclair de la fin des années 70. Car la fusion des genres qu'affectionnait Malcom McLaren et qu'affectionne toujours Johnny Rotten au sein de PiL (notamment dans leur dernier album, This Is PiL), à moins que ce ne soit l'inverse, c'est là tout le talent de The Pop Group qui confirment un faible pour les basses lourdes et slappées (Age Of Miracles) et les compositions hétéroclites appelant au rassemblement de maniaques en tous genres. Comme au temps de We Are All Prostitutes, ce sont les textes et la voix nasillarde de Mark Stewart qui font office de fil rouge dans cet album volontairement incohérent. Notamment, dans le titre quasi indus St Outrageous.

On ne reprochera pas à The Pop Group leur engagement, toujours viril et barré à cinquante ans passés d'âge moyen, ou une capacité à produire un rock constamment criard, mais les simples curieux d'une époque post-punk trop souvent lissée et imagée par quelques groupes beaucoup plus sages (Buzzcocks, Gang Of Four...) risquent de passer leur chemin, au pas de course. Bien produit (et pour cause, Paul Epworth le mutli-récompensé au Grammy n'est pas le premier venu) et bien mixé, les versions live de ces onze titres paranoïdes et parfois douloureux à l'écoute donneront sûrement du fil à retordre aux contestataires en pré-retraite quand il s'agira de convaincre un public rajeuni et bercé de rock plus accessible sur les scènes déjà programmées pour la tournée 2015 (un tour du monde qui ira du Japon à l'Australie en passant par les USA) et dont la France est la grande oubliée, pour le moment.

Il faut espérer que l'énergie excessive, en rapport avec la mouvance post-punk de l'époque que dégageait Mark Stewart dans les années 79/80, soit encore au rendez-vous, trois décennie plus tard. Sinon, cela risque de tourner au bouillon trouble pour pré-retraités et à la reformation de circonstance.
tracklisting
    01. Citizen Zombie
  • 02. Mad Truth
  • 03. Nowhere Girl
  • 04. Shadow Child
  • 05. The Immaculate Deception
  • 06. s.o.p.h.i.a.
  • 07. Box 9
  • 08. Nations
  • 09. St. Outrageous
  • 10. Age of Miracles
  • 11. Echelon
titres conseillés
    Nations ; The Immaculate Deception
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