Chronique Album
Date de sortie : 25.05.2018
Label : Merge Records
Rédigé par
François Freundlich, le 4 juin 2018
On avait un peu perdu de vue Tracyanne Campbell, magnétique chanteuse des Écossais de Camera Obscura depuis leur très bon 5ème album sorti en 2013. Elle avait pris un peu de recul depuis le décès tragique de la claviériste du groupe, Carey Lander, d'un cancer des os en 2015. La voilà de retour sous le forme d'un duo avec Danny Coughlan, musicien de Bristol connu en tant que Crybaby. Tracyanne explique qu'elle voulait produire un album avant tout joyeux et il est vrai que le terme gentil n'a jamais été aussi adapté à cette twee pop sucrée.
Nous retrouvons avec joie la voix chaude et captivante de Tracyanne, très mise en avant d'orchestrations millimétrées. Les chœurs de Danny semblent apporter ce coté rugueux et détaché. Leurs deux voix à l'unisson, comme amoureuses, possèdent parfois un coté désuet, comme la B.O. d'un film 80's un peu kitsch. On y pense notamment sur It Can't Be Love Unless It Hurts où le saxophone langoureux jaillit sur des chœurs en « palapala ». Des petites touches instrumentales s'ajoute constamment aux morceaux, que ce soit en section de cuivres, flûte traversière, tambourin ralenti ou violons trainants. Nous voilà transportés au pays des bisounours sur des mélodies feel good autant influencées par les girls bands 50's que par Serge Gainsbourg ou Lou Reed. On n'échappe cependant pas à un coté mièvre très prononcé comme sur Deep In The Night qui pourra nous faire sourire dans un moment d'oisiveté à siroter un diabolo noisette. Danny y prend le lead vocal sur une ballade aux accents bluesy redondants.
L'ambiance change quelque peu sur Alabama, une réflexion sur la vie de Carey Lander, rythmée par une steel guitar dérivante ou les influences americana ressortent davantage. Le texte est aussi triste que le morceau n'est joyeux (« when i'm an old lady, i'll still miss you like crazy »). La pop doucerette reprend ses droits sur la berceuse Jacqueline et la très laid-back 2006 où quelques notes de piano s'amusent à se lier au xylophone et au saxophone ronflant. Une certaine mélancolie ressort dans les orchestrations de The Honeymooners avec cette guitare électrique déviante et ce clavier vintage 70's psychédélique à trémolos, très cinématographique. On pense à Sonny & Cher sur Anybody Else But You avec cette jolie mélodie où tout va bien, conclue par les décalages vocaux de Tracyanne que l'on connaissait dans Camera Obscura mais qu'on ne retrouve que très peu dans ce disque très linéaire. On tourne parfois en rond sur la longueur avec un disque manquant d'emballement ou de décollage émotionnel pour nous sortir de l'easy listening.
Tracyanne & Danny parviennent à nous séduire avec ce disque qui réchauffe l'âme mais les arrangements précieux ne suffisent pas à combler totalement la monotonie de certaines mélodies mignardes. Ce disque est délicat mais ne durera pas aussi longtemps que My Maudlin Career ou Desire Lines qui hantent encore notre platine.