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The Maccabees
Willie J Healey

Paris, Trabendo - 27 juin 2025

Live-report par Jordan Meynard

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Il fait chaud. Très chaud. Paris transpire, poisseux, comme un morceau de coton imbibé oublié sur un radiateur. C'est la fin de semaine, on devrait être ailleurs : en terrasse, à Sète, sous un ventilateur. Et pourtant, ce soir, tout le monde veut être ici. Dans cette salle loin de tout, mal climatisée, pleine à craquer, pour voir un groupe qu'on avait rangé au grenier des belles choses finies : The Maccabees. Rien que leur nom, en ces temps étranges, sonne comme une prophétie. Huit ans après leur séparation, les Londoniens sont de retour. Pas encore pour une résurrection annoncée, mais pour ce qu'ils appellent officiellement des « concerts d'échauffement ». Et pourtant, officieusement, c'est une démonstration de force.


Dès les premières secondes — Latchmere, Lego, X-Ray —, l'affaire est pliée : pas de mise en scène, pas de glose, pas de relecture vintage. Une attaque franche, sèche, sans gras. Le son est resserré, nerveux. L'énergie, brute. À l'image d'un public (à moitié anglophone) compact, incandescent, qui anticipe les breaks, hurle les refrains, vibre d'un même souffle. On ne regarde pas un concert, on y participe. Après une première partie nerveuse, les titres de Colour It In laissent place à l'apaisement avec Feel To Follow et Kamakura, avec une tension à peine contenue. La section rythmique - Sam Doyle, à la batterie chirurgicale, Rupert Jarvis, à la basse funky et ancrée - assure le socle. Les frères White, eux, se partagent les extrêmes : Felix, le feu ; Hugo, la glace. L'un harangue, l'autre scrute. Deux pôles qui tendent l'arc. Au centre, Orlando Weeks, toujours aussi insaisissable, chante sans forcer. Il n'est pas là pour séduire. Il est là pour dire.

Et ce qu'ils disent ce soir, sans même avoir à l'expliciter, c'est qu'ils n'ont jamais été aussi bons. Can You Give It monte comme une fièvre, glisse vers Spit It Out, morceau devenu cri primal. Puis No Kind Words, plus menaçant que jamais, finit de faire basculer la salle dans une sorte de trance collective. "If you've got no kind words to say..." résonne comme une prière laïque. Les guitares saturent l'espace, la basse râpe le sol. La tension est palpable, mais maîtrisée.


Le set est pensé comme un crescendo sans répit. Marks to Prove It et Something Like Happiness achèvent de prouver que la nostalgie n'est pas au programme. Il ne s'agit pas ici de revivre un passé, mais de jouer ces morceaux comme s'ils avaient été écrits hier. Et le plus étonnant, c'est que ça tient. Tout tient. Le rappel n'adoucit rien. Toothpaste Kisses, en mode manifeste. Love You Better, tendue jusqu'à l'os. Grew Up At Midnight, sublime retenue. Et Pelican comme point final : brut, éclatant, sans bavure.

Les Maccabees n'ont pas cherché à écrire un nouveau chapitre. Ils ne sont pas venus faire acte de rédemption. Ce qu'ils offrent, c'est un présent dense, charnel, habité. Ils se tiennent simplement là, avec musique débarrassée de ses oripeaux indie pour retrouver sa substance au présent, et une justesse rare. Ce n'est pas un retour, c'est une affirmation. Et peut-être qu'ils n'ont jamais été aussi bons.
setlist
    Latchmere
    Lego
    X-Ray
    Feel To Follow
    Kamakura
    Wall Of Arms
    First Love
    Precious Time
    Can You Give It
    Spit It Out
    No Kind Words
    Marks To Prove It
    Something Like Happiness
    ---
    Toothpaste Kisses
    Love You Better
    Grew Up At Midnight
    Pelican
photos du concert
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