Duran Duran

Même si leur chanteur vient de fêter ses soixante-cinq ans, à côté des Rolling Stones, de Paul McCartney ou d'Elton John, Duran Duran peuvent encore passer pour des gamins. Aussi Danse Macabre se situe entre l'exercice de style et la blague potache d'ados qui adorent Halloween. Il ne fait d'ailleurs aucun doute que le groupe aime les déguisements et les fêtes comme le montre leur impressionnante vidéographie jusqu'à l'excellent Anniversary, morceau éponyme de leur précédent album.


A l'occasion d'un concert pour Halloween 2022 à Las Vegas, le groupe avait offert un show mélangeant nouveaux titres, classiques revisités de leur répertoire et reprises. Pour le plus grand plaisir de leurs fans, Duran Duran ont poursuivi l'expérience en studio pour sortir ce concept album au fil conducteur gothique empruntant aux comédies d'épouvante kitsch des années 80 et au clip Thriller de Michael Jackson.
On retrouve leur son signature sur des rythmiques un peu funk, la voix unique de Simon LeBon et des nappes de synthés. Pour que la fête soit plus folle, ils ont rappellé deux guitaristes qui avaient quitté le groupe depuis vingt ans : Warren Cuccurullo et Andy Taylor, qui officiait sur leur premier album. Plus qu'un retour aux sources, il y a dans ce nouveau disque une envie de se faire plaisir sans la pression d'un quelconque renouvellement ou de devoir accoucher de douze nouveaux titres.

Ici, pas besoin d'effets créatifs pour jouer la surprise, celle-ci vient plutôt du choix des reprises ou des morceaux réinterprétés comme Secret Oktober, une face B de 1983, un trésor caché que les fans adorent mais qui n'a jamais eu jusqu'à aujourd'hui l'exposition qu'elle méritait. Reprendre Billy Eilish ou chanter en duo avec Victoria De Angelis de Måneskin est aussi attendu que leur partenariat de trente ans avec Nile Rodgers qui est aussi de la fête.
En revanche, entendre les champions du néo-romantisme reprendre les Specials, Siouxsie and The Banshees et les Talking Heads, des groupes issus de la branche punk ou plus indépendante de la new wave, est complètement inattendu.
Et ça marche ! Duran Duran s'approprient complètement ces titres. Spellbound se trouve accéléré et relevé de disco funk, Psycho Killer est couvert de paillettes glam, alors que Paint It Black est au contraire assombri. Le paroxysme de l'exercice est atteint sur le mash-up entre leur Lonely In Your Nightmare, très proche de l'originale, qui vire en Super Freak de Rick James.


Il est souvent difficile pour les artistes de se réinventer tout en restant fidèle à leur style. Trop souvent le résultat déçoit les fans qui ne reconnaissent pas "leur" groupe ou ne voient pas l'intérêt des nouvelles chansons si elles ne sont pas aussi fortes que celles qui les ont fait vibrer depuis des années. Avec ce pot-pourri, Duran Duran ne forcent pas l'écriture de nouveaux titres (ndlr : il n'y en a que trois), mais en revisitant leurs compositions et les classiques des autres, ils apportent tout de même de la nouveauté qui ravira les fans et les profanes qui ont une bonne occasion de passer outre les idées préconçues qu'ils pourraient avoir sur ce fleuron de la pop new wave.