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Rock en Seine

Paris, du 21 au 25 août 2024

Live-report rédigé par Fab le 25 août 2024

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En dépit des risques d'orages et pluies évoqués pour la fin d'après-midi, le moral des festivaliers est toujours au beau fixe en ce samedi 24 août. La veille, les découvertes ont été nombreuses et l'affiche de qualité, un programme similaire bien que plus hétéroclite se profilant pour les heures à venir avec les venues notamment de Massive Attack, The Offspring, 2manydjs ou encore Glass Beams.

L'une des formations les plus singulières et atypiques de cette édition 2024 de Rock en Seine ouvre ainsi les hostilités sur la scène de la Cascade : Astéréotypie, collectif réunissant musiciens post-punk et vocalistes atteints de trouble du spectre de l’autisme. Précédés par une réputation grandissante et flatteuse, portés par le succès de l'album Aucun mec ne ressemble à Brad Pitt dans la Drôme, les français livrent une prestation surprenante, décalée et touchante, à mille lieux des spectacles calibrés au millimètre près. Déclamé par trois chanteurs et une chanteuse se relayant d'un titre à l'autre opérant plus sous forme de spoken word que de chant, les textes, souvent naïfs et décalés, surprennent autant qu'ils font sourire, à l'image de Du vélo à Saint-Malo, du kayak à Saint-Briac, de l'hypnotique Que la biche soit en moi ou bien entendu Aucun mec ne ressemble à Brad Pitt dans la Drôme. Un concert rafraîchissant en dépit de ses limites.


Après trente années de carrière et rien de moins que onze albums publiés depuis leurs débuts, Sleater-Kinney font leurs débuts aujourd'hui dans le domaine national de Saint-Cloud. Avec les seules Carrie Brownstein et Corin Tucker désormais aux commandes, bien qu'accompagnées de trois musiciennes supplémentaires sur scène, le duo entre punk et riot grrrl, pourtant réputé pour ses qualités scéniques, rencontre aujourd'hui toutes les peines du monde à se faire entendre par un public il est vrai semblant peu concerné. Les titres s'enchaînent à vive allure, les échanges avec la fosse se font rare, et un manque criant de nuance tout long du set font régner une certaine monotonie de laquelle le groupe ne parviendra jamais à s'échapper aujourd'hui. Sans remettre en question les qualités intrinsèques d'une formation n'ayant plus rien à prouver, leur présence sur la Grande Scène en ce début de journée aura finalement eu tout d'une erreur de casting.


Portés par une hype certaine depuis plusieurs mois désormais, en témoigne le concert mémorable donné à guichets fermés à la Bellevilloise à Paris plus tôt cette année, Glass Beams sont aujourd'hui à l'épreuve du festival et de la scène de la Cascade alors que les cieux tendent à se couvrir progressivement. S'avançant comme de coutume les visages dissimilés derrière des masques de perles, les trois musiciens désormais signés chez Ninja Tune vont livrer durant quarante minute un concert centré sur les deux seuls EPs que compte leur discographie à ce jour. Essentiellement instrumentale en dépit de la présence chœurs lointains et aériens, la musique des australiens mêle psychédélisme, rock et funk avec un beau savoir-faire, l'influence indienne insufflée par leur fondateur Rajan Silva renforçant un peu plus l'unicité de la formation. Après une entame de set des plus planantes, la seconde moitié du concert verra le groupe passer la vitesse supérieure, notamment lors d'un Rattlesnake acclamé par la foule ou d'un final électrique au groove irrésistible via la reprise du Raga Bhairav de Charanjit Singh. Quarante minutes menées tambour-battant et suffisantes pour confirmer tous les espoirs placés en Glass Beams depuis leurs débuts.


Après deux apparitions ces derniers mois à la Gaîté Lyrique puis à l'Olympia, The Kills fêtent aujourd'hui leurs grandes retrouvailles avec Rock en Seine, sept années après leur dernière venue en date. Présentant aujourd'hui leur récent God Games, c'est sous les premières averses de la journée que Jamie Hince et Alison Mosshart vont offrir près d'une heure durant une rétrospective de leur carrière, bien qu'une grande place soit accordée à leur dernier disque en date. Très appliqué à la guitare, Jamie Hince laisse ainsi comme souvent à Alison Mosshart l'animation scénique, cette dernière arpentant les lieux, chevelure blonde au vent, ne manquant toutefois aucune occasion d'interagir, notamment au chant, avec son compère artistique depuis plus de deux décennies. A l'évidence dans un bon jour, The Kills mêlent aujourd'hui tension et complicité, seuls quelques titres plus dispensables venant provoquer un léger trou d'air à mi-concert. On préfèrera retenir les inauguraux Kissy Kissy et U.R.A. Fever et la paire Doing It to Death / Future Starts Slow proposée en fin de set, meilleurs symboles des qualité du répertoire d'un duo plus uni que jamais.


Pendant que Blonde Redhead attirent une foule nombreuse sur la scène de la Cascade, Nation Of Language, invités de dernière minute suite à l'annulation de la venue de Eyedress, leur répondent quant à eux sur la scène du Bosquet. Les averses s'intensifiant n'ont pas raison de l'intérêt d'un public plus modeste, mais l'on reste circonspect face au spectacle proposé de la part d'un groupe à la popularité croissante depuis la sortie de l'album Strange Disciple en 2023. Leur synth-pop répétitive, peu variée et somme toute déjà vue et entendue ne convainc guère, au point de quitter les lieux après une petite demi-heure pour rallier la Grande Scène. Don't believe the hype.


Une Grande Scène quant à elle prise d'assaut pour la troisième venue à Rock en Seine de The Offspring, stars américaines de la soirée dont la réputation n'est plus à faire. Plaisir coupable et régressif pour certains, choix has been pour d'autres, la présence du groupe mené par les vétérans intemporels Dexter Holland et Kevin 'Noodles' Wasserman ne laisse personne indifférent, et certainement pas un public qui n'aura de cesse de s'enflammer tout au long du concert au son des Come Out And Play, Gotta Get Away ou Self Esteem d'une part, et de l'irrésistible trio Why Don't You Get A Job?, Pretty Fly (For A White Guy) et The Kids Aren't Alright, tous tirés d'Americana, et lancés dans les dernières minute avant le rappel. Un concert porté autant par la qualité des brûlots punk amassés par la formation durant sa carrière que par un show à l'américaine durant lequel les échanges avec le public, images sur écran géants ou canons à serpentins n'auront fait que renforcer la capital sympathie d'un groupe intemporel.


Retour à la scène du Bosquet pour un spectacle tout autre avec la venue de Kae Tempest. Exit les guitares, place au spoken work, à la poésie et au hip-hop, le temps d'un instant suspendu aux lèvres d'un artiste atypique mais avant tout sincère et foncièrement impliqué dans son art. Accompagné d'une unique musicienne derrière ses claviers et samples, Kae joue de son phrasé précis et d'un débit vocal continu pour supplanter la musique et capter l'attention d'un public tout aussi fasciné que spectateur. Temps fort du set, More Pressure est acclamé par la foule à sa grande surprise, avant que la tension ne retombe quelque peu durant le reste de la prestation, Ketamine For Breakfast ou Europe Is Lost ne manquant toutefois pas d'impact. Une prestation intense et emplie d'émotion, conclue après des remerciements fournis par un inédit puis la touchante People's Faces au piano. Kae aura bien été la seule tempête à planer surplomber domaine national de Saint-Cloud en cette journée.


Grands habitués du festival avec désormais pas moins de quatre apparitions au compteur depuis leur visite inaugurale en 2003, Massive Attack vont livrer ce soir un spectacle conforme à leur standing, bien que sans doute trop dépourvu de surprises pour en faire l'un des temps forts de cette édition. Quatorze années après la sortie de leur dernier album, Heligoland, Robert '3D' Del Naja et Grant 'Daddy G' Marshall continuent de jouer des mêmes ficèles : une setlist balayant leurs principaux faits discographiques, les diffusions de nombreux messages politiques, notamment ce soir en faveur de la Palestine, et de nombreux invités se relayant au chant au fil de la soirée. Parmi ceux-ci, on notera le retour de l'impeccable Elizabeth Fraser (Cocteau Twins), l'indémodable Horace Andy, Deborah Miller ou encore le trio Young Fathers, venu électriser le set de la formation de Bristol le temps de trois titres consécutifs. Une leçon de trip-hop trouvant son point culminant avec Teardrops, Inertia Creeps ou Angel, mais dont on regrettera l'absence de nouveauté et un sentiment certain de déjà vu.

Une journée qui n'aura au final pas manqué de variété, et dont on retiendra principalement les prestations de Glass Beams, The Offspring, Kae Tempest et bien entendu Massive Attack alors que les plus courageux auront laissé leurs dernières forces sur le dancefloor avec 2manydjs et Polo&Pan b2b Myd.
artistes
    MASSIVE ATTACK
    THE OFFSPRING
    2manydjs
    BLONDE REDHEAD
    GLASS BEAMS
    INHALER
    THE KILLS
    ASTÉRÉOTYPIE
    ASTRAL BAKERS
    CLARA KIMERA
    CVC
    DOG PARK
    ENTROPIE
    GEAGEA
    KAE TEMPEST
    LOVERMAN
    NATION OF LANGUAGE
    SLEATER-KINNEY
    VOX LOW
    SANAZA
    SPICY SUGAR
    POLO&PAN B2B MYD
photos du festival