Pourquoi ? Une question existentielle mais caduque à laquelle PleasureInc. ont toujours préféré répondre par « Et pourquoi pas ? ». Pourquoi se pointer sur scène avec des lunettes mouche, une jupe, un crop top floqué Arse! et un mulet ? Pourquoi pas ? Pourquoi mettre dans un seul concert cinq à six styles musicaux différents et n'avoir aucune ligne directrice si ce n‘est celle de faire n'importe quoi ? Pourquoi pas ? Alors qui ou quoi que vous soyez, bienvenue au Point Ephémère pour vivre un voyage à travers le temps et l'espace jusqu'à l'île du plaisir, une dimension qui laisse les prises de tête sur le pas de la porte, dans la maison funky-pop-rock-hip-hop-disco-rap-métal sortie de la cuisse des frangins Kenny Pleasures et Jonny Silver !

Un duo originaire de Norwich et accompagné de Babyface Killa aux claviers et de Burger à la basse, un freluquet surexcité à côté d'un playboy qui se croit dans un clip de Lenny Kravitz, et un premier effaçage en règle du fichier cohérence.exe au son de l'inédite
Buzz Baby. On s'attendait à un petit concert de funk-pop rigolote sans prétention, et pourtant le son est lourd, la guitare sature un espace déjà bien rempli par la basse, Babyface Killa tape sur sa cloche à vache plutôt que sur les touches de son clavier, et le bordel ambiant nous ramène à une autre époque dans une autre ville, une époque où tout le monde portait des baggys et des chaussettes sur la teub dans la cité des anges : la fin des années 80 et le début des nineties.
2:45 mélange funk, disco, et phrasé hip-hop à l'ancienne, east et west coast apprécient,
For The Fun Of It rajoute à la moiteur de l'ambiance quand à son contact l'air est humide, qu'à son contact on devient liquide et que l'on coule dans la foule jusqu'à la plage arrière de la benz benz benz.
Lies rappelle l'énergie turgescente et désordonnée des premiers albums des Red Hot Chili Peppers,
Trousers With Fake Pockets, Why? fait briller les jantes chromées en militant le retour des pantalons cargo, les basses jaillissent avec vigueur et tâchent le Point Ephémère des draps au plafond, avant que
Chew My Mouth ne transitionne sans prévenir vers la partie presque nu metal du set et un
5/4 de Gorillaz retapé façon Limp Bizkit. La foule pompe en l'air, saute sur la corde à linge, le bras tendu battant l'air de bas en haut sur un rythme aussi fun et bancal que celui d'un concert qui retombe comme si de rien n'était sur ses pattes. De Norwich à Los Angeles la même passion et le même maillot, un Magic Johnson 87 violet et or, et voici
Fool qui déboule pour nous rappeler à quel point les Red Hot Chili Peppers étaient bons, avant le final
Plastic People, la foule qui descend et qui remonte, qui saute et danse comme Burger le bassiste danse le kazatchok sur scène.

Si vous pensiez avoir tout vu, voici le rappel ! Avec
How Deep Is Your Love des Bee Gees en guitare solo, parce que Paris est la ville de l'amour, enchaînée par le
Without Me d'Eminem et un numéro de rap entre les deux frangins, Jonny à la guitare et Kenny à la batterie. Alors que le titre est un des raps les plus rapides du dénommé Marshall Matters, le faire en jouant des baguettes comme le meilleur boulanger de France tient autant de la performance artistique que du numéro de cirque, un truc imaginé à cinq heures du matin en sortant de boîte qui se termine sur quelqu'un qui jongle avec des couteaux enflammés en équilibre sur un lion en équilibre sur un cheval qui fait de la moto les yeux bandés. Bref, les paroles volent et le public fait na-na-na-naaa en tirant la langue, et voici déjà terminé le deuxième passage parisien de l'histoire de PleasureInc., un groupe dont on aurait dit dans les années 90 qu'il était top délire méga groove, et qui dans les années 2020 est quand même top délire méga groove. Le genre de groupe qui vide la tête et qu'on ne se lassera jamais de voir sur scène, et comme en plus les derniers singles tendent à dire qu'ils savent aussi enregistrer un truc ou deux en studio, l'avenir de PleasureInc. semble à la fois assuré et déjanté, sensationnel et loufoque.
Si même ces qualificatifs surannés de comédie française bas de gamme ne portent pas la poisse au groupe, c'est que derrière les lunettes de guignol, les chapkas, et les teintures blondes, il y avait un vrai gros et beau talent pour le... le quoi déjà ? Ah oui, le funky-pop-rock-hip-hop-disco-rap-métal. Et comme diraient PleasureInc., et pourquoi pas ?