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Wolf Alice
Florence Road

Paris, Zénith - 25 novembre 2025

Live-report par Adonis Didier

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Elle fuite, elle fuite, la maladie du Zénith. Après les Viagra Boys, Morcheeba, Loyle Carner ou The Hives, c'est au tour de Wolf Alice de se lancer à Paris au Zénith plutôt qu'à l'Olympia. Sans doute une histoire de gros sous et de concordance des dates qui mène ce mardi soir à un hangar dont les gradins sont aux trois-quarts bâchés et la fosse au tiers vide, heureusement que les fans de Wolf Alice sont des acharnés et que le milieu de fosse est déjà plein à vingt heures quand rentrent en scène Florence Road, jeune quatuor irlandais alt rock du comté de Wicklow.

Au fond de la salle, le Zénith sonne comme une grosse boîte de conserve sans les petits pois, alors on avance sous les façades pour profiter de la musique Cranberries-pop terriblement nineties de Florence Road, et découvrir le groupe pour la première fois sur une très grande scène. Un groupe encore jeune, timide et figé, plus à l'aise au Molotow de Hambourg qu'au Zénith de Paris, dont le son va heureusement compenser l'inexpérience, et ça se lance comme leur premier et seul EP Fall Back par Figure It Out puis Hand Me Downs. Lily Aron au chant et à la guitare, Emma Brandon en guitare lead, Ailbhe Barry à la basse et Hannah Kelly à la batterie pour un rock à la fois puissant et extrêmement pop, parfois lourd comme le final du récent single Miss dans la droite ligne de leurs ancêtres The Cranberries, parfois niais et adolescent comme sur Heavy, une chanson bien mieux terminée en piano-voix à fleur de peau que toutes guitares dehors. Florence Road, un groupe en apprentissage dont les derniers singles dénotent d'une nette progression et qui voit sa première fois à Paris se faire dans une de ses plus grandes salles, merci Warner Music et merci Wolf Alice. Une première fois suivie d'effet, le groupe annoncera le lendemain un retour parisien à la Boule Noire fin avril 2026, avant une conclusion qui enchaînera un Break The Girl aux airs de KT Tunstall avec la bien plus convaincante et californienne Goodnight, mais il n'est pas encore temps d'aller au lit car le main event nous attend.

Quand le loup n'est pas là les chaperons dansent, alors on met notre capuche sur la tête et on attend jusqu'à 21h10 en gigotant que le quintet londonien daigne honorer de sa présence la grande scène chatoyante et pailletée du Zénith. Un grand rideau de franges argentées resplendissantes tiré derrière le groupe, deux étages de scène et beaucoup de chantilly pour la pièce montée, le gâteau aux couleurs du dernier album The Clearing est prêt, les années 70 et le justaucorps vert à paillettes ressortent du placard sur une Ellie Rowsell qui entre en scène en cosplay d'elle-même et de sa très jolie pochette. La pochette du dernier album, un avant-goût de l'ambiance de ce concert qui débute comme le disque par Thorns puis l'explosive et funky Bloom Baby Bloom : Ellie prend tous les spots sur elle, chante en mode Lana Del Rey de son promontoire les chansons les plus lentes et distinguées, descend d'un étage lorsque le rythme et les guitares l'exigent, et c'est avec la géniale White Horses que l'étrange concert va tenter de se lancer.

Etrange car le groupe oscille désormais depuis quelques années entre des chansons très pop, classieuses et raffinées, et de manière aussi ponctuelle que s'abat le tonnerre sur le parc de la Villette, des décharges de saturation foudroyantes les ramenant à leurs premiers accords amoureux. Ainsi, Formidable Cool est formidablement cool et déchire l'espace d'un instant le masque et le maquillage propret d'un groupe qui ne semble plus tout à fait sûr de ce qu'il veut être en live. Qu'il est loin le Nouveau Casino de juin dernier maintenant qu'on le vit dans cet immense hangar sans âme qu'on appelle le Zénith, le soleil s'est couché et Just Two Girls repart dans la pop seventies à pieds joints dans le pantalon pattes d'eph'. Clic, clac, la lumière s'éteint et la boule à facettes prend le relais, une quinzaine de spectatrices rentrent sur scène et dansent avec le groupe, Leaning Against The Wall remet toute la lumière sur Ellie pour faire onduler son ombre sur un rideau de franges, avant que la dite lumière ne descende directement du plafond et que le public ne chante en chœur How Can I Make It OK?.

Visiblement un des moments et une des chansons préférées du groupe, Ellie rigole de ses problèmes techniques, The Sofa sera elle aussi reprise par une fosse qui bouge beaucoup au milieu et beaucoup moins autour, Bros et le guitariste Joff Oddie rappellent d'ailleurs à la foule qu'elle a le droit de taper dans les mains, preuve s'il en était besoin que les chansons qui fonctionnent le mieux sont évidemment les anciennes. You're A Germ redécouvre l'usage des pédales de distorsion avant de couper directement par la magnifique Safe From Heartbreak (If You Never Fall In Love), et on pardonne mais c'est bien parce que le groupe joue en acoustique assis autour de sa chanteuse, avec un Zénith allumé de toutes parts par cette centaine de petites étoiles sorties des téléphones portables de la foule. Safe In The World reprend la vibe groovy avec toutes les guitares en formation rapprochée sur l'étage supérieur, Bread Butter Tea Sugar est toujours la meilleure chanson du nouvel album, même en live, avant qu'enfin le groupe lâche les chevaux presque jusqu'à la fin, bienvenue dans l'envers du décor, passez avec Alice de l'autre côté du miroir, la prochaine s'appelle Yuk Foo.

Le mégaphone, les sirènes de police, l'ambiance en rouge et bleu couleurs Paris Saint-Germain, la salle explose, la façade qui se remettait à peine du concert de The Hives doit repartir à la guerre, et enfin le groupe va jouer ses plus gros hits. Play The Greatest Hits poursuit la fusillade, tout le monde fait n'importe quoi, Ellie finit en hurlant et en remuant des fesses sur la batterie, voici enfin le Wolf Alice qu'on aime. Silk en transition pour reprendre son souffle, Play It Out parce qu'il fallait bien un dernier moment Lana Del Rey avec un tabouret et un piano, avant le morceau de bravoure officiel du groupe depuis son premier album : Giant Peach. La foudre ne tombe jamais deux fois au même endroit, et ça tombe bien parce que le tonnerre lui il s'en fout et il gronde partout où il veut.
Giant Peach est un final qui vaut à lui seul l'argent que vous aurez mis dans un concert de Wolf Alice, rarement quarante-cinq secondes de musique auront autant ressemblé à une falaise qui s'effondre, à une avalanche en cavale, à un raz-de-marée en cinquante mètres nage libre, et ce n'est pas l'envie qui m'en manque de m'arrêter là et de vous souhaiter une bonne soirée. Mais bon, sachez que le groupe terminera sur Smile puis reviendra seulement pour Don't Delete The Kisses, The Last Man On Earth ayant sauté de la setlist pour cause de temps ou d'envie (ndlr : petit rappel, le concert a commencé dix minutes en retard).

En conclusion, un bon concert assez décousu de Wolf Alice, un concert qui marque, au même titre que The Clearing, un possible tournant dans la carrière du groupe et son approche du format live. Comment concilier efficacement une direction artistique beaucoup plus pop et léchée avec les titres râpeux et abrasifs qui parsèment la discographie du groupe ? Un questionnement existentiel qui devra faire partie des préoccupations majeures du futur de Wolf Alice s'ils tiennent à garder le haut de l'affiche. M'enfin, reste que ça aurait quand même eu plus de gueule dans un Olympia... et puis de toute façon la musique c'était mieux avant !
setlist
    FLORENCE ROAD
    Figure It Out
    Hand Me Downs
    Miss
    Something
    Storm Warnings
    Heavy
    Caterpillar
    How Does It Make You Feel
    7563
    Break The Girl
    Goodnight

    Wolf Alice
    Thorns
    Bloom Baby Bloom
    White Horses
    Formidable Cool
    Just Two Girls
    Leaning Against The Wall
    How Can I Make It OK?
    The Sofa
    Bros
    You're A Germ
    Safe From Heartbreak (If You Never Fall In Love)
    Safe In The World
    Bread Butter Tea Sugar
    Yuk Foo
    Play The Greatest Hits
    Silk
    Play It Out
    Giant Peach
    Smile
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    Don't Delete The Kisses
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