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Smoke Fairies

Paris, Flèche d'Or - 18 novembre 2010

Live-report par Olivier Kalousdian

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En ce gris jeudi, la Flèche d’Or nous a concocté un programme en partenariat avec météo France ! Folk et mélancolique (en ce qui concerne les deux premiers groupe), c’est un soir à ne pas mettre un rockeur dehors ; pluie fine et température plus humide que froide. Le remplissage de la Flèche d’Or en souffre encore plus que moi sur mon scooter alors que j’arrive rue de Bagnolet à la limite de la pneumonie ! Heureusement, ce soir, ce ne sont pas moins de trois groupes qui jouent – Smoke Fairies, Tom Baxter et Telekinesis – mais malgré cela, la salle ne dépassera jamais les cinquante personnes toutes mouillées. Dur pour un jeudi soir !

Katherine Blamire et Jessica Davies sont les deux leaders - je devrais dire gourous - guitaristes et chanteuses de Smoke Fairies sur scène. Grandement influencées par le blues Américain et le folk Anglais, à entendre leurs premiers titres, on pourrait se croire revenu à un concert des Cowboy Junkies. Les guitares barrées pleurent sur de chaudes voix féminines, ce qui ne manque pas de réchauffer nos corps engourdis. D’autant que ni Katherine, ni Jessica ne sont désagréables à regarder, si l’on met de côté leur absence totale d’animation sur scène, les rapprochant, de fait, beaucoup plus d’une Joan Baez que des Violent Femmes !
Jessica, qui a voilé la discographie de sa maman, fan des standards américains des années 70s, a également passé une année à la Nouvelle Orléans avec sa copine d’école, Katherine ; automatiquement, leurs inspirations s’en ressentent. De retour en Angleterre, elles découvrent le folk Anglais au Festival folk de Sidmouth - où elles travaillent au parking - et repartent passer une année à Vancouver. Les Smoke Fairies sont comme les éponymes brouillards d’été du Sussex d’où elles sont originaires, un mirage vaporeux vers lequel on court en espérant trouver de l’eau. Une eau froide, une eau de tourbe Irlandaise incitant à la consommation d’un pur malt de douze ans d’age ! Passant parfois par des états et des guitares Hawleyienes, quelques titres comme Frozen Heart rendent hommage à la fois à l’ouest Américain, façon Blue Moon et au folklore Anglais ou Irlandais ; un grand écart plutôt réussi, toutes de dentelle dix neuvième vêtues.
Leur premier « hit », Hotel Room, fermant la marche, elles obtiennent ce soir un succès seulement limité par le nombre de mains disponibles dans la salle mais que le NME et The Times ont déjà grandement contribué à entériner.

Mais quelle mouche a donc piqué l’équipe de programmation de la Flèche d’Or ce soir ? Avec un nom et un pedigree pareil, on peut facilement se mettre le doigt dans l’œil ceci-dit ! Tom Baxter, pourtant frère de Charlie Winston et musicien sur un album de Shirley Bassey en 2009, est au Folk ce que Murray Head était à la variété de bon goût des années 80, un OMNI (objet musical non identifié) jouant à contre-courant, à contre-marée et même à contre-sens !
Mélangeant flamenco (si si !) et ballades anglo-américaines, version Cock Robin, Tom est plutôt beau gosse et un très bon guitariste jouant seul, accompagnée d’une seule chanteuse pour l’occasion, et pousse la chansonnette sur des accords quasi Andalous, pour ne pas dire Tziganes... curieux. Ça pousse tellement dans les aiguës sur des titres comme Tell Her Today que la salle, refroidie pour l’occasion, se réveille en sursaut d’une léthargie hivernale qu’avaient déclenché ses premiers morceaux. Ce qui est sûrement une première sur des accords de Flamenco !
On prendra en compte une certaine sincérité musicale qui passe parfois par des compositions se rapprochant, les soirs où tous ses musiciens sont là, de titres honnêtes et de ballades sentimentales anachroniques mais qui ne change rien au constat... personne n’écoute. Dure soirée décidément !

Green Day n’a qu’à bien se tenir (aux dernières nouvelles ils sont toujours englués dans le lac pollué de Springfield dans le film des « Simpsons » !), Telekinesis est là. Trois gars, qu’on imagine sortir de la cote ouest des Etats-Unis, ont installé leurs instruments et leur énergie sur la scène de la Flèche d’Or après deux premières parties, pour le moins opposées. Une basse, une guitare et surtout, pour une fois, un batteur siégeant au milieu et au devant de la scène, chantant, tapant et dodelinant du couvre chef, en l’occurrence recouvert d’une tignasse blonde s’agitant tel les petits chiens des pares brises de voiture, et tapant comme un Rafael Nadal du rock Californien !
Non seulement, c’est du rock sérieux et tapageur, mais, de plus, ce sont de parfaits showmen pour leur âge, réussissant à animer un public très restreint. Entre deux titres, Michael Benjamin Lerner, garçon sage originaire de Seattle et qui ressemblait à d’Harry Poter à ses débuts, fait son show et raconte sa tournée française pendant laquelle il pense mourir d’indigestion de pains et de fromages bien de chez nous !
Le petit Michael, dont les moulinets et les mouvements de tête fascinent la salle, a bien changé depuis son passage au prestigieux institut d’arts scéniques de Sir Paul McCartney (excusez du peu) à Liverpool. Il s’est épaissi, physiquement et musicalement, c’est certain. C’est dans cette école ultra hype qu’il aurait rencontré ses acolytes ; un guitariste qui n’a rien oublié des attitudes et du son punk et un bassiste qui suit un rythme infernal tout en réussissant l’exercice très difficile de changements de tempos et de mélodies dans des titres plus complexes qu’à l’habitude avec ce genre de groupe. Un savant et intéressant mélange de rock de la côte ouest américaine, de punk anglais et de recherches mélodiques sûrement lorgnées chez des aînés comme Radiohead et qu’on ne demande qu’à scruter de près dans un futur proche.

Telekinesis fait se remuer l’audience par sa seule volonté et, ce soir, ce n’est pas une mince affaire !