Chronique Album
Date de sortie : 27.10.2014
Label : FatCat Records
Rédigé par
Julien Soullière, le 26 octobre 2014
The Twiligt Sad ou la renaissance du Phénix. Si le groupe écossais a su paver sa route de quelques belles pièces d'orfèvrerie depuis Fourteen Autumns And Fifteen Winters (I Became A Prostitute, Sick...), difficile pour les justes d'admettre autre chose que la triste réalité : peu habitués à la haute montagne, James Graham et les siens ont emprunté un chemin des plus difficiles, abrupt, et qui faute de visibilité nous semblait jusqu'ici sans fin, ni fond. Mais le brouillard s'est aujourd'hui estompé et, surprise, ça n'est pas dans le ventre d'une crevasse lugubre que l'on retrouve notre trio, mais bel et bien de l'autre côté de cette cavité béante. Mesdames, messieurs, voici donc Nobody Wants To Be Here And Nobody Wants To Leave.
Si le groupe se défend d'écrire des morceaux pop, ce nouvel opus n'en reste pas moins la résultante d'un choix, celui de la clarification de ligne éditoriale, de la mélodie reine, d'un plaisir plus franc et immédiat que par le passé, et en ce sens, The Twiligt Sad ne pouvaient se montrer plus judicieux dans leur approche. Nobody Wants To Be Here And Nobody Wants To Leave est une petite réussite, et plus que d'affirmer qu'il est le meilleur disque du groupe depuis son premier fait d'armes, on dira tout simplement qu'il est son meilleur. Homogène, mélodique, et même embarrassant tant ses intentions sont pures et lisibles, l'album nous décoche une flèche qu'il était difficile de voir venir.
Nobody Wants To Be Here And Nobody Wants To Leave peut donc se targuer de belles mélodies, mais ce qui rend l'ensemble si efficace, c'est le sacrosaint équilibre autour duquel ces dernières évoluent. Il aura fallu attendre 2014 pour voir le groupe transcender sa musique, lui éviter une pénible asphyxie, mais ça y est, The Twiligt Sad ont enfin trouvé le chemin vers l'harmonie, et c'est désormais avec beaucoup de naturel que le léger psychédélisme inhérent à leur musique côtoie cette froideur héritée de Depeche Mode et des élans rock autrement plus sémillants. Le titre qui doit son nom à l'album en est d'ailleurs l'une des plus belles preuves, entremêlant à la perfection l'accablement propre à la complainte, notes distordues, et, en arrière-plan, une chaleur aussi sourde que persistante.
Ici, il est donc question de justesse, et ce jusqu'à dans la voix de James Graham. Avant, c'était surtout son accent à couper au couteau qui nous séduisait, aujourd'hui, c'est bien plus que ça. En parlant de lui d'ailleurs, on ne pourra qu'acquiescer quand il affirme que son groupe a peu de chance de connaître un jour les faveurs du grand public : Nobody Wants To Be Here And Nobody Wants To Leave a beau être une belle machine, elle ne distribue pas le genre de morceaux destinés à truster la bande FM, du moins pas en France. C'est dommage, car pour relever le niveau général, on y écouterait bien des morceaux rock graciles et enlevés comme Last January ou I Could Give You All That You Don't Want, on pleurerait bien tous un coup à l'écoute de la superbe It Never Was The Same, et on est prêt à parier que les accents fantomatiques qui habillent Leave The House hanteraient les auditeurs longtemps encore après la fin du morceau.
On les attendait à notre porte, ils ont finalement décidé de passer par la fenêtre. Tel un bon gros éléphant, The Twilight Sad ont déboulé dans notre magasin de porcelaine alors qu'on avait déjà mis sur étagère bon nombre des prétendants au top 10 2014. Avec leur album plein d'émotions, de doutes et d'étrange, ils viennent de bousculer un bon paquet de certitudes. Comme quoi, il faut toujours rester sur ses gardes.