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Southside Festival

Neuhausen Ob Eck, du 17 au 19 juin 2011

Live-report rédigé par François Freundlich le 23 juin 2011

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vendredi 17
Le Southside Festival s’est installé pour trois jours sur l’aérodrome de Neuhausen Ob Eck dans la campagne du Baden-Württemberg. L’arrivée se fait tant bien que mal au milieu d’un camping géant et tentaculaire composé d’allemands transportant leurs fûts de bière de vingt litres sur des diables à roulette. Essayons de ne pas se perdre et de trouver l’entrée du festival pour les tous premiers concerts.

Les anglais de Brother sont chargés d’ouvrir la Blue Stage sous un soleil radieux. Un peu de britpop repris par des kids plutôt déchainés rafraichit l’atmosphère. Le quatuor est plutôt convaincant avec un chanteur qui a de sérieux relents de Liam Gallagher dans ses intonations, ce qui peut faire sourire lors de certains passages se perdant dans l’imitation. On entend de bonnes chansons avec l’efficace Darling Buds Of May dont le public s’est immédiatement approprié les chœurs. Difficile d’électriser une scène en plein après-midi de début de festival mais on assiste à de bons débuts pour Brother, un groupe à revoir en salle.
Laissons les quelques instants pour la Red Stage, sous un chapiteau déjà presque plein. Annoncés à la toute dernière minute, on comprend que Pete And The Pirates ont déjà débuté leur set. L’expérience de la scène du quintet de Reading est plus au rendez-vous que chez leurs compatriotes de Brother. Le public se défoule au son de la voix grave de Thomas Sanders et de guitares sombres et débridées. Les morceaux de leur dernier album sont plus fédérateurs et s’adaptent parfaitement à une grande scène de festival. On entend subitement une grandiloquence à la Interpol mais avec des compositions bien plus accrocheuses que les dernières livraisons des New Yorkais. Au final la première bonne surprise du festival est bien là, puisqu’on ignorait même qu’ils y jouaient en arrivant sur le site.

Pour continuer ce début d’après-midi très britannique, ce sont les énervés Pulled Apart By Horses qui ouvrent la géante Green Stage. Les capacités sonores de la scène où vont défiler les têtes d’affiches sont déjà mises à rude épreuve puisque le groupe de Leeds est à son maximum. Tom Hudson hurle toute sa rage dans son micro tandis que la guitare et la batterie lui répondent avec un tempo plus rapide que jamais. Les morceaux aux influences plus hardcore savent néanmoins se calmer quelques précieuses secondes avant de repartir de plus belle dans le défoulement. Les Pulled Apart by Horses livrent un set encore plus violent que ce qu’on leur connaissait, donnant l’impression d’avoir décidé de marquer le public du Southside. On en ressort conquis puisqu’ils seront le seul groupe de musique plus extrême à avoir vraiment convaincu.
Pour rester dans la thématique équestre tout en calmant le jeu, le duo australien An Horse prend le relai. Répondant au proverbe « Never miss an Aussie band », on se précipite pour les accueillir alors que la blonde chanteuse Kate Cooper distille déjà sa grave voix aux accents pop à des festivaliers attentifs. Elle est secondée par la batterie plutôt binaire de Damon Cox. Les mélodies douces et entrainantes délivrées par la guitare de Kate sont de la partie avec une touche de mélancolie offrant plus de profondeur aux compositions. Certaines en manquent néanmoins quelque peu et se ressemblent sur la longueur, mais les ardeurs électriques en crescendo parviennent à les réveiller. Des titres comme Camp Out donnent envie de sortir les lunettes de soleil et les planches de surf et parviennent à faire danser sous un soleil presque australien. Un groupe plutôt séduisant, notamment de par la voix féminine secondée par celle du batteur, et offrant un résultat tout à fait charmant.

 

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D’autres britanniques ont investit en nombre le chapiteau avec les sept musiciens de Young Rebel Set. Après ces quelques groupes électriques, l’ambiance se fait plus folk avec des touches de country qui ne sont pas sans rappeler leurs compatriotes de Mumford & Sons. La comparaison est plutôt inévitable à l’écoute de leurs compositions enjouées et acoustiques plutôt entrainantes. Malgré tout, ils proposent ensuite un virage pop assez lisse et beaucoup moins intéressant.
Il est temps de ressortir pour Warpaint qui ont déjà lancé les hostilités. Les quatre demoiselles font vibrer les guitares distordues, mêlant le psychédélisme de leur son à la douceur des voix. Les arrangements sont d’une telle précision que l’on reste subjugué par ce mélange de guitare saturées et de rythmes lancinants poussant à la rêverie. D’autant plus que ce délice auditif s’ajoute au visuel plutôt plaisant des mouvements de la jolie Emily Kokal. Les quatre amies sont parfaitement en cohérence et leur joie de vivre est communicative même si l’ambiance reste très sombre. De passages tout en délicatesse, on passe à un déchirement de guitares qui se mélangent autant que les voix des deux chanteuses. Undertow reste le moment clé du concert avec un final instrumental tourbillonnant et débridé. Warpaint signe le premier grand moment du Southside 2011, malgré l'apparition de la pluie à la fin du concert.
Toujours féminin mais dans un style différent, faisons un petit détour pour voir le début du concert de I Blame Coco. Coco Sumner, fille de Sting, fait revivre les synthés des années 80 de manière assez caricaturale avec un groupe dans son ombre. Très énergique à l’avant de la scène, sa voix a la même sonorité grave et voilé que son père, finalement seule touche de fraicheur d’un style qui a fait son temps. On aurait pu fermer les yeux et danser en imaginant assister à une prestation de LA ROUX mais rien n’y fait, le résultat est loin d’être aussi entrainant.

L’un des concerts les plus attendus de la journée commence au même moment : les américains de Band Of Horses (oui, les programmateurs aiment décidément les chevaux). Dés les premières notes chantées par le barbu Ben Bridwell, on sait que le set va être exceptionnel tant la pureté de sa voix prend aux tripes. On frissonne d’autant plus lorsqu’elle est relevée d’un accord électrique fiévreux qui tranche les bases folks des compositions. I Could Sleep est le premier instant de communion avec un public qui reprend en chœur le refrain. L’arrivée de la guitare dans le morceau et indescriptible de puissance et de tension. Ces déchirements subits participent énormément à la magie déployée par Band Of Horses. Les extraits des deux premiers albums ont beaucoup de succès à l’image de l’émouvante No One's Gonna Love You susurrée tout en douceur ou encore The Great Salt Lake déployée avec délicatesse. Le groupe parvient tout de même à intercaler quelques morceaux d’Infinite Arms, marquant les passages plus rock du concert. En guise d’au revoir à un public admiratif, les premières notes de The Funeral sont accueillies par une ovation pour un hymne qui restera comme le summum de grâce de cette journée. Il y a des instants qu’une légère pluie rend encore plus beau, cette chanson en fait partie. Band Of Horses, ou comment proposer le concert parfait.
Après ce décollage hors du temps, on retourne sur terre avec la fin du set de The Hives. Pelle Almqvist est en train de s’exciter sur une caméra qui n’a pas de cadreur en faisant crier « Film The Hives » à la foule. C’est finalement un fan chanceux de l’assistance qui peut se placer derrière la caméra alors que le groupe entame It Won't Be Long et son gimmick aiguë. Tick Tick Boom provoque un défouloir général devant les cinq lettres géantes placées à l’arrière de la scène. Le public est même appelé à s’asseoir, un exploit réalisé par les festivaliers du Southside compte-tenu de la foule présente devant la scène. Tout le monde se relève au même moment lorsque la chanson repart. On ne s’approche pas trop pour pouvoir rejoindre rapidement la Red Stage ou doit se produire une autre suédoise : Lykke Li.
Après avoir annulé une grande partie de sa tournée pour cause d’ennuis de santé, Lykke Li semble ravie de revenir sur scène et prête à offrir le meilleur show possible. Sombre et mystérieuse à l’image de sa musique, elle se présente couverte d’une toge avant de se montrer en justaucorps sous un tonnerre rythmique. Ces passages de batteries et de percussions sont omniprésents pendant tout le concert, la chanteuse allant même jusqu’à en jouer elle-même. Elle fait alors corps avec son groupe, dos au public. La voix frêle arrive tout de même à percer ces instrumentations et apporter l’essentiel de la mélodie. Une certaine froideur est perceptible dans ce son mais sa voix permet de l’humaniser quelque peu. Les deux albums de la sensuelle blonde son parcourus, des pas de danse tribaux pour Dance, Dance, Dance à des ambiances plus pop pour l’entêtante Get Some. On regrettera néanmoins l’absence de la très belle Tonight, qui aurait pu nous enflammer encore plus. Notons un passage plus posé ou Lykke Li se tient seul avec son autoharpe, s’excusant presque de ralentir la cadence face à un public qui ne fait que danser. Grave et sérieuse, elle plonge encore plus le chapiteau dans l’obscurité qui lui est familière et lui ajoute une touche de folie. Radieuse, Lykke Li émerveille une dernière fois le dancefloor avant de laisser le Southside rejoindre la lumière aveuglante du jour.

Retour sur la grande scène où les Arctic Monkeys remuent l’assistance avec I Bet That You Look Good On The Dancefloor et par la même occasion créent malgré eux les premières flaques de boue. Ces anciens titres comme l’entrainante When The Sun Goes Down, qui étaient des pièces maitresse au concert du Trabendo en 2006 par exemple, passeraient presque inaperçus tant le groupe a évolué vers un autre registre depuis. La voix anciennement adolescente d'Alex Turner, qui en prend encore les relents sur Fluorescent Adolescent, a gagné en intensité et le fait que les morceaux soit plus posés lui permet d’en jouer allègrement. Il ne faut plus assister à un concert des Arctic Monkeys comme à celui d’un groupe où l’on va danser sur tous les titres, sous peine d’être fortement déçu. Une fois l’adaptation mentale faite, on peut se focaliser sur l’écoute d’une subtilité différente dans leur musique. Les nouveaux morceaux y trouvent donc une place naturelle et leur adaptation en live est plutôt réussie. La base de fans est énorme chez les plus jeunes et ceux du Southside ont une préférence pour les morceaux à tempo plus rapide, même s’ils semblent s’accommoder aux nouveaux. Examen réussi pour les Monkeys à la hauteur de leur statut de tête d’affiche.
Le chapiteau s’apprête à résonner au son du folk de I Am Kloot proposant l’adaptation live de leur superbe dernier album Sky At Night. Dix ans déjà se sont écoulés depuis le premier album et les premières parties de The Divine Comedy. Les morceaux de l’époque ont de fait été quelque peu oubliés. On se réconforte avec un John Bramwell particulièrement en forme, interprétant une version frissonnante de I Still Do en atteignant des aiguës délicieux. La simplicité reste leur maître mot et un état de plénitude se dégage de leur musique, avec des arrangements entre les cordes, le piano et même l’accordéon ou la trompette particulièrement soignés. Une intensité rare est atteinte pendant From Your Favourite Sky qui comble nos attentes d’anciennes chansons. Le folk apaisé crée un cocon douillet à l’intérieur même de ce chapiteau tandis que les compositions les plus intemporelles comme To The Brink sont sublimées. John n’oublie pas de sympathiser avec le public allemand en précisant qu’il s’agit d’une chanson sur la boisson, annonce suivie d’un hourra général. La douceur est subitement perturbée par plusieurs déflagrations sonores assez fortes qui feront stopper le groupe en pleine interprétation de Fingerprints. On croirait que tout va exploser où que la tente va lâcher sous le poids du déluge qui tombe à l’extérieur (comme lors de la tragédie de 2007 qui avait détruit cette scène). Entre détente extrême et angoisse subite, tout s’arrange et les anglais reprennent là où ils s’étaient arrêtés. I Am Kloot est toujours un groupe majeur de la scène folk anglaise, auteur d’un album magistral en 2010 qui aurait mérité bien plus de louanges.
L'envie de rester bien au chaud se ressent mais il va bien falloir sortir pour affronter le déluge de pluie et de décibels déversés par les Foo Fighters. On arrive en plein milieu du set alors qu’il est difficile de s’approcher de trop près en raison de la foule, mais il faut se tenir à distance en cas de retraite anticipée. Dave Grohl est bien en train de déchainer la fureur de sa guitare tandis que le pogo bat son plein à l’avant de la fosse. Monkey Wrench met l'ensemble du public d’accord, ça sautille dans tout les sens en reprenant en chœurs le refrain. Dave est en forme entre jumps incessants sur scène et boutades avec le public entre les morceaux. Generator calme le jeu avant que Taylor Hawkins, monstrueux à la batterie sur tous les morceaux, ne se targue d’un solo affolant sur Time Like These. Ce même Taylor chante ensuite avec classe Cold Day In The Sun, le seul titre où Dave ne fait que les chœurs. Une reprise d’un vieux morceau de jazz Young Man Blues (également jouée par The Who et récemment chantée en duo avec Roger Daltrey) permet à Dave d’haranguer la foule a capella avant de déchainer sa guitare. All My Life lâche définitivement les chevaux sur la fin d’un concert épique de plus de deux heures : on ne peut que remuer le moindre bout de chair. La température commence sérieusement à se refroidir malgré la chaleur humaine alors que le rendez-vous donné avec Bright Eyes à 00h30 est déjà manqué.

 

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Conor Oberst s’installe debout devant son clavier pour jouer l’introduction de Lover I Don’t Have To Love : une arrivée avec un bon timing. Vêtu d’un poncho marron en hommage aux K-Way qui ont fleuri dans la soirée, la voix toujours aussi déchirante, Conor fait frissonner dés qu’il susurre « I picked you out ». Il n’est peut-être pas l’interprète le plus sympathique de la soirée mais il est certainement le plus impressionnant dans son écriture et sa manière de faire sonner les mots. La claviériste de Bright Eyes donne une couleur différente aux extraits du dernier album, comme le single Haile Selassie. Cynique, Conor ose quelques remarques sur le fait qu’on entende le concert des Foo Fighters en fond sonore, parlant d’un mashup spécial avec eux pour l’occasion. Leur dernière parution, The People’s Key est mis en avant dans la setlist alors qu’il faudra attendre le dernier morceau pour entendre ce que Conor annonce comme son split album avec Beethoven : Road To Joy. Au cri de « Make some noise », c’est le défoulement général sous forme de final et les demoiselles de Warpaint rejoignent le groupe pour frapper sur des tambours à l’arrière de la scène. Les américains sont toujours aussi impressionnants, même si on aurait apprécié plus d’anciens morceaux qui auraient peut-être réveillé un public fatigué par sa journée.

Une première expérience avec le Southside riche, entre la magie de Band Of Horses ou d’I Am Kloot, les danses de Lykke Li et les décibels des Foo Fighters et de Warpaint. Place à la nuit pour retrouver la tente dans le camping géant...
artistes
    Pulled Apart By Horses
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    Flogging Molly
    The Hives
    Arctic Monkeys
    Foo Fighters
    Brother
    An Horse
    Warpaint
    Band Of Horses
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    Clueso
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