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Transmusicales

Rennes, du 5 au 9 décembre 2012

Live-report rédigé par François Freundlich le 13 décembre 2012

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Après avoir abimé ses baskets dans tous les festivals de l’année, il fait toujours bon de terminer en beauté avec les Rencontres Transmusicales de Rennes, 34èmes du nom. Comme un point final à ces douze mois, l’occasion de voir ou revoir certains groupes bien connus et de découvrir ceux qui feront peut-être l’actualité en 2013. C’est également le week-end où Rennes se venge d’une vie musicale en déclin, ayant laissé la part du lion au voisin nantais. Mais la capitale bretonne n’est jamais aussi belle que lorsque ses rues sont remplies en ce week-end particulier où elle reprend des couleurs. C’est reparti pour trois jours de Trans' !

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Le festival fait la part belle aux groupes français, représentant une bonne moitié de la programmation. Une tendance qui va certainement se poursuivre dans les festivals de 2013 avec cette nouvelle scène pop en pleine ébullition. Nous débutons l’après-midi dans la salle de l'Etage, scène découverte de cette édition. Deux filles en robes roses et jaunes à l’avant, deux garçons enflammant une pop bubble-gum binaire et électrique à l’arrière : ce sont les lillois de Lolito. Malgré une énergie débordante, le manque cinglant de mélodies fait tourner le concert en rond et aucune chanson ne se détache réellement des autres. Les voix féminines criardes sans variation aucune sont à la peine et se révèlent au final assez irritantes. On attend la suite.

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Les caennais de Clockwork Of The Moon sont bien plus convaincants avec des morceaux à base folk pouvant parfois s’énerver rythmiquement. Les trois voix forment des harmonies rappelant Fleet Foxes même si celle du leader ressemble fortement à celle de Luke Pritchard (The Kooks). Leurs compositions font la part belle à une pop brute assez classique, teintée d’accords simples et accrochant directement l’oreille de l’auditeur. Voilà encore un groupe sympathique de cette talentueuse scène normande.

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De la Normandie en veux-tu en voilà, avec un autre quatuor : Bow Low. Le son se fait plus dansant avec des synthés mis en avant et des chœurs joyeux pouvant rappeler Kaiser Chiefs. Le chanteur s’énerve à l’avant de la scène en tentant de remuer un public un peu grippé. Ils signent malgré tout l’un des tubes que l’on entendra un peu partout pendant le festival : Bird Of Prey et son électro-pop ravageuse.

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Il est déjà temps de se rendre au Parc des Expositions, non sans un détour par le pot d’ouverture lancé par la Ministre de la Culture. Les ministres de gauche viennent parler de Portishead ou Björk dans leurs discours, c'est mieux, mais les budgets ne suivent pas vraiment.
Des allemands pour ouvrir la soirée du parc expo : voilà qui n’est pas commun. Il s’agit des berlinois de Camera et leur krautrock hypnotique. Sans prendre de pincettes, ils vont immédiatement adapter nos tympans au niveau de décibels que l’on endurera pendant trois jours. On attaque donc directement le vif du sujet avec un son lourd et fort, une guitare abrasive et torturée et un synthé rappelant les dérivations expérimentales de Neu!. Le batteur est placé au centre, debout et penché en avant sur ses futs avec certainement une scoliose de plusieurs degrés. C’est rude, c’est puissant, ça démarre prudemment dans une tornade angoissante pour s’élever dans un crescendo vers des explosions instrumentales. Ces boucles lancinantes sont diaboliques, voir ésotérique lorsque le micro est utilisé comme un pendule pour créer des sonorités nous tenant en haleine et ce dès le début de soirée. Sans photo finish, Camera fut l’un des concerts les plus prenants de la soirée.

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Dirigeons nous vers le Hall 3 pour l’un des concerts les plus attendus du festival : Team Ghost. Il s’agit du projet de Nicolas Fromageau, ayant quitté M83 en 2009. On comprend pourquoi, car si Anthony Gonzalez a connu le succès que l’on connaît en misant sur la musique électronique, son acolyte apportait bien ces ambiances shoegaze disparues de M83 mais prédominantes dans ce nouveau groupe. On réalise l’écart entre les deux groupes dès les premières notes, avec des déflagrations électriques atteignant un paroxysme. Le groupe joue à un tempo très élevé alors que les trois guitares sont en permanence mélangées pour un mur du son extrêmement imposant. Elles sont relevées de quelques notes planantes d’un synthé ne se faisant remarquer que par sa dissonance. La voix est quand à elle discrète, n’intervenant que pour de brefs passages sombres et murmurés. On retrouve cette fébrilité intérieure aperçue chez The National mais aussi ces sursauts fulgurants à la My Bloody Valentine. Le concert est couronné par une éruption finale tonitruante et jouissive : nous tenons bien là le concert de cette première journée pour l’un des meilleurs groupes français du moment.

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Le californien Nick Waterhouse et son groupe s’installent sur cette même scène pour un set qui va quelque peu calmer le jeu après ces deux shows tout en puissance. Deux saxophones dont un baryton, deux choristes soul, quelques guitares rock'n'roll, voilà l’entourage de ce bluesman rétro caché derrière ses grosses lunettes. Sous ses allures de gendre idéal sosie de Buddy Holly, Nick Waterhouse ressuscite l’essence du rock 50's d’Elvis. La dizaine de musiciens transforment le Hall en un club de jazz swing et le public ne s’y trompe pas en esquissant quelques pas de danse sur les solos de piano rhythm'n'blues ou les cuivres malicieux. La voix du frontmen rappelle parfois Ray Charles, encore plus lorsque les choristes lui répondent de ces sexy « woo-hoo ». Une reprise de It de Ty Segall nous ramène néanmoins en 2012 même si Marty McFly peut débouler à tout moment pour imiter les quelques solos de guitare bien sentis émergeant de chaque morceau. Après une dernière présentation de ses acolytes californiens, Nick Waterhouse quitte la scène sur quelques enchainements rock'n'roll des plus dansants.

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Fraichement débarqués de Leeds, China Rats sont la première intervention britannique des ces Transmusicales. Ils investissent la scène sans temps mort en déployant un brit-rock dans le plus pur style classique de la Perfide Albion. Les premiers morceaux sont fortement influencés par le punk des Sex Pistols avec des compositions faciles ne payant pas de mine. Mais ces quatre là ont décidé de former un groupe avec les Arctic Monkeys comme référence et cela se voit, puisque le chanteur va se muter en Alex Turner au fur et à mesure du concert. Les intonations de sa voix n’y laissent pas planer l’ombre d’un doute. Voilà encore un groupe qui ne révolutionnera pas la musique britannique puisque les China Rats campent sur leurs acquis comme bon nombre de groupes actuels. Le concert est néanmoins correct, on passe un moment sympathique si l'on se fait à l’idée de ne pas demander autre chose que quelques bonnes chansons aux accords redondants comme (At Least Those) Kids Are Getting Fed. On cherchera l’originalité ailleurs et force est de constater que, pour une fois, elle vient bien des groupes français...

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Le concert suivant ne fait que confirmer cette impression puisque les rennais de Mermonte reviennent au bercail après avoir gagné presque tous les tremplins de nouveaux groupes cette année. On ne sait pas si c’est parce qu’ils sont une douzaine sur scène, et donc possèdent de nombreuses relations pour voter sur les réseaux sociaux, ou autre chose. Dès les premières notes, nous plaidons pour la seconde option car leur musique en mouvement perpétuel est réellement surprenante. Les deux batteurs installés face à face à l’avant de la scène donnent le ton d’une rythmique toute en puissance alors que quatre guitares s’emmêlent entre une pop lumineuse et un math-rock percutant.
Les voix se mélangent dans des chœurs entrainants alors qu’un xylophone, un violon et un violoncelle forment des orchestrations précises et limpides. A chaque nouveau titre, on ne sait plus ou donner de la tête tant les musiciens réinventent des sonorités foisonnantes en se déplaçant entre les pianos ou les percussions. Les morceaux sont essentiellement instrumentaux mais les quelques voix cachées qui les parsèment auraient gagné à être plus présentes. Le projet de Ghislan Fracapane en aura ce soir surpris plus d’un et encore plus ceux découvrant Mermonte avec ce concert des plus réussis.

C’est avec plaisir que nous avons retrouvé les Transmusicales de Rennes pour une première journée ayant déjà livré son lot de très bons concerts. Nous retiendrons les prestations tout en puissance de Team Ghost ou tout en subtilité de Mermonte pour une French Touch qui gagnerait à être connue. Nick Waterhouse et Camera ont également fait forte impression alors que l’espoir placé en China Rats ne s’est pas confirmé. Le festival continue vendredi avec l’ouverture de la Salle de la Cité et du grand Hall 9 !
artistes
    Adrien Veidt
    Botibol
    Bow Low
    Burning House
    Camera
    China Rats
    Clockwork of the Moon
    Goldwave
    How We Tried... (Olivier Mellano)
    Julien Tiné
    Licornia
    Lolito
    Madben
    Madeon
    Mermonte
    Netsky
    Nick Waterhouse
    Nin Petit
    Nunna Daul Isunyi
    Team Ghost