Jim Noir

Jim Noir semble tout faire à l’envers. Et le monde musical l’en punit. Avec son premier album Tower Of Love, alambiqué et fiévreux, néanmoins rythmé et formidablement musical, il connaissait une heure de gloire précoce et devint l’une des chansons de fond d’été grâce à Nike. Puis plus le temps passa, plus la musique de Jim Noir se décomplexa, avec un album homonyme en forme de grande boucle post-moderne, et ce Jimmy's Show, à ce jour son album le plus accessible, le plus pop et le moins tiraillé de sonorités vastes, et d’instrumentalisations imbriquées dans des dédales luxuriantes. Pourtant, aujourd’hui, Jim Noir est peu ou prou un inconnu du grand public.

Jimmy's Show s’est dégagé des influences pop expérimentales de Beck ou Super Furry Animals des premiers albums, pour se rapprocher d’un formalisme d’orfèvre à rapprocher de The Beta Band. Jim Noir, alias Alan Roberts, semble s’en tenir désormais à une certaine quiétude mélodique. Si le multi-piste vocal est toujours de rigueur (le ludique Tea), le reste s’accommode en revanche d’une sobriété à tendance plus classique, donnant ainsi également une homogénéité globale à l’ensemble de l’album. Jimmy's Show demeure un grand terrain de jeu pour Roberts, plus que Tower Of Love n’avait été le produit d’obsessions et d’aliénations donnant ce sous-jacent psychédélisme bariolé.

Ici, Jim Noir le musicien teste les limites du formalisme, en explorant ses routines et rouages, en décortiquant ses squelettes et structures. Driving My Escort Cosworth To The Cake Circus se rallonge et s’étire et change d’allure trois fois en quelques minutes, tandis que la ritournelle de Sunny joue sur le placement couplet/refrain pour inverser l’ascendance mélodique. On remarquera également que l’album ne dispose pas réellement de temps forts, mais s’axe plutôt sur cette constance, où l’acoustique et les rythmes solaires prévalent (JJC Sports, Praise For Your Mother).

Malgré les lubies inaltérables d’un artisan de l’instrumentalisation, Jimmy's Show est un album solide à la fausse naïveté et légèreté qui devrait faire ses beaux jours. Pourtant, Jim Noir se laisse oublier, et vogue doucement vers une normalité qui l’éloigne des feux qu’il semblait connaître. A son grand amusement.