Lloyd Cole

Quatre années se sont écoulées depuis la sortie de Guesswork, le dernier véritable album studio de Lloyd Cole. Dernier véritable car, en 2020, l'écossais a sorti une parenthèse digitale entièrement électronique constituée de quatre longues plages. L'intérêt pour ce type de musique n'est pas nouveau pour l'ex-leader des Commotions. En 2001 déjà il bidouillait sur des machines, notamment sur son disque Plastic Wood. Tout cela contraste magnifiquement avec ses tournées acoustiques en solo ou duo avec Neil Clark.

On Pain est donc le successeur de l'impeccable Guesswork. On se demandait si Lloyd Cole allait poursuivre dans cette veine électronique ou s'il allait rebrancher les guitares pour ce nouvel album. Eh bien, c'est un peu un mix des deux que l'on va retrouver sur ces huit nouvelles compositions. Pour les abonnés au Patreon de l'artiste, une pré-version d'un premier morceau du disque avait déjà été dévoilée en décembre l'année dernière. The Idiot, dont la version définitive est assez proche du rough mix présenté en avant-première, oscille entre élégance électronique et pop song délicate. La voix mélancolique du chanteur fait mouche dans celle-ci où il évoque une vie de bohème entre Los Angeles et Berlin où les drogues étaient très présentes. Lloyd Cole donne donc le ton de son prochain disque, cependant tout ne sera pas aussi inspiré 80's synthétique sur On Pain. Warm By The fire, autre extrait dévoilé il y a peu, sonne peut-être comme la plus américaine de ses compositions en solo. Subtile, punchy et classieuse, celle-ci fait la part belle aux guitares avec sa mélodie haute en couleur.

L'album va donc prendre une tournure musicale plus nuancée que Guesswork. On Pain, plage d'ouverture, est planante avec son beat électronique et la voix toujours aussi envoûtante du crooner britannique. Celui-ci s'amusera à la transformer voire la robotiser au tout début de I Can Hear Everything, ce qui pourra générer un effet somme toute déstabilisant sur le fan de l'artiste qui s'interrogera sur la raison de cette petite fantaisie et se demandera jusqu'où l'artiste ira dans son expérimentation.
Fort heureusement, aucune véritable mauvaise surprise ne figure sur le disque. D'ailleurs, au bout d'une grosse minute dans la chanson, celui-ci laisse aller plus naturellement son timbre pour notre plus grand plaisir. Passé cette mini inquiétude, on a plaisir à se plonger dans You Are Here Now, une des plus belles compositions du disque. Délicate jusqu'à ses deux tiers, elle finit par s'enflammer électriquement en dernière partie. On y trouve probablement là le Lloyd Cole le plus noisy qu'on ait jamais entendu. Cette formidable progression musicale est tout simplement extraordinaire et démontre combien Lloyd Cole reste un songwriter hors du commun. Il va encore nous surprendre sur l'inattendue boucle vocale "You can't believe it, it can't be possible, but it's happening now" tout au long de la plage électronique It's Happening Now. Mais c'est davantage sur l'électro gospel de More Of What You Are et la longue et pénétrante Wolves, qui avait été déclinée dans des versions remixées avant la sortie de l'album, que Mr Malcontent nous enchante vraiment.

Ce douzième album solo de Lloyd Cole est donc une très belle extension de Guesswork sur lequel il conjugue des touches électroniques dont il a le secret avec son instrument de prédilection : la guitare. A soixante-trois ans, il continue de nous étonner et de conserver ce talent créatif qui ressort sur les huit compositions du disque. Enregistré avec deux anciens Commotions, Blair Cowan et Neil Clark, On Pain balance entre la nostalgie du passé et la modernité du futur vers lesquelles Lloyd Cole refuse de se tourner catégoriquement.