Courteeners

Courteeners demeurent cette sensation d'outre-Manche issue du fertile terreau du Grand Manchester ayant remporté tous les plus grands succès dans leur pays d'origine, remplissant de grandes arénas, inondant les bandes FM de tubes intemporels et nous pondant quelques hits devenus les nouveaux classiques tel What Took You So Long, issu du premier album St Jude. Un morceau ayant obtenu à sa sortie les louanges d'une des personnalités mancuniennes les plus exigeantes pour ne pas dire emmerdantes, le Moz lui-même. Certains chanceux se remémoreront alors la période phare de St Jude quand Courteeners se sont vu offrir de partager la scène avec Morrissey en 2009 lors de sa tournée Years Of Refusal.

Mais tout cela était il y a des siècles, un mois comptant dorénavant comme dix années dans les fils d'actualités de nos réseaux sociaux. Depuis, Courteeners, toujours menés par Liam Fray, ont proposé sept albums studios plutôt solides, sachant évoluer au grès de leurs inspirations, se laissant porter de pop douce à rock beaucoup plus costaud, souvent au sein d'un même opus. Tel a été le cas avec la fournée précédente More. Again. Forever. , disque qui, malgré quelques percées à la limite du stoner, nous avait fort agréablement surpris mais demeurait dans sa globalité très (peut être trop) sage. Qu'en est-il en 2024 ? C'est avec un nom comme sorti d'un vieux film des années 50 que Courteeners reviennent : Pink Cactus Café propose dix morceaux qui, ne maintenons pas plus le suspense, ont malheureusement échoué à nous surprendre cette fois-ci.


Le disque voit les Anglais nous servir une pop bien conventionnelle, très (majoritairement trop) surproduite, avec des lignes de guitares sans fin et des boucles de clavier synthétiques à tout va, porté par de nombreux chants en canons, structuré de rythmiques souvent trop enjouées. C'est pétillant, ça siffle même de ci-de là, tout cela nous rassure sur le niveau de bien-être des membres du groupe mais n'étanche en rien notre soif d'un rock un peu plus stylé, de celui que la formation a su nous fournir lors d'échappées brillantes comme Aftershow, Sharks Are Circling ou bien plus récemment The Joy Of Missing Out.
Ici, aucun morceau n'ose tenter le chemin de traverse, et c'est une très (bien trop) longue route dans le répertoire pop rock ultra calibré, à la production mastodonte, permettant cependant quelques associations plutôt prestigieuses comme avec DMA's, Pixey ou Brooke Coombe, qui dès le titre d'ouverture permet au disque de débuter en grandes pompes. Et pourtant, le chant de Liam Fray reste toujours parfait, aucune fausse note ni perte de puissance depuis les tous débuts, avec même une tonalité qui se réchauffe d'année en année. Il n'en est que plus regrettable que cette grande qualité soit mise au service de compositions aussi passe-partout et manquant d'âme.


Plutôt que de dresser la liste de nos déconvenues (le syndrome Coldplay fait décidément des ravages cet automne), mettons plutôt en exergue les rares pistes qui, comme très (définitivement trop) souvent dans les albums de Courteeners, sortent du lot. Sweet Surrender est une ballade pop très bien ciselée entre piano évanescent et petit riff de guitare énervé, Pink Cactus Café et ses airs presque country ont en effet un style assez cinématographique, The Beginning Of The End offre une percée psyché pop agréable et le titre de clôture Bitten By Unseen Teeth remet enfin la guitare au cœur des débats, avec ses airs à la Vaccines, soit éternellement juvéniles. Le reste du tracklisting nous est dispensable et il est fort regrettable qu'après seize années de carrière, Courteeners persistent à se cranter dans ce rôle de groupe à grosse aréna, certes avec une formule qui fonctionne à tous les coups mais qui dans son essence demeure bien trop lisse.

Avec Pink Cactus Café, Courteeners enfoncent le clou du groupe grand public avec une pop rock aux angles encore une fois trop arrondis, persistant dans un registre devenu bien trop classique pour de si bons musiciens.