Alison Goldfrapp prend goût à son escapade solo. Ce qui avait commencé comme une expérience contrainte d'isolement pendant la pandémie, s'est transformé en une exploration consciente et un exil volontaire à Stockholm. En regardant le port depuis la fenêtre de son appartement, elle nous transporte avec elle dans des clubs cosmopolites aux atmosphères fantasmées et nostalgiques. Comme elle, nous ne sommes pas dans les clubs de Londres ou d'ailleurs : nous sommes seuls avec la musique.
Pour la temporalité, les sons de synthés analogiques et l'utilisation d'accords mineures dans une musique de dancefloor nous transportent dans les années 80s. Une impression de fête triste en attendant l'apocalypse, rendue supportable par une bonne dose d'optimisme shooté à l'insouciance. Nous retrouvons sa voix éthérée et sensuelle, que ce soit avec ou sans son prénom, c'est la signature de sa discographie. En solo, la musique est étonnamment moins intime et davantage tournée vers les autres, comme s'il était plus facile de se dévoiler à tout un public qu'à un partenaire musical. Les chansons sont faciles d'accès, les mélodies accrocheuses, Alison Goldfrapp ouvre en grand les portes de son club imaginaire.
En confiance dans ce nouveau chapitre de sa carrière, elle en profite pour lancer son propre label et être totalement maîtresse de sa destinée. A la production, elle a de nouveau fait appel à Richard X (Sugababes, M.I.A., Steve Mason ou... Goldfrapp pour l'album Head First). Si The Love Invention pouvait ressembler à un galop d'essai, Flux montre une complicité renforcée entre la chanteuse et le producteur, plus à l'aise pour pousser ensemble la veine Europop.
Ni fan ni expert du genre, je suis plus à l'aise avec les morceaux plus froids et dépouillés (Reverberotic, Magma), même si je dois reconnaître des qualités pop imparables à Hey I Hello, Find Xanadu ou Ordinary Day. UltraSky est probablement la synthèse parfaite entre les deux avec une petite boîte à rythmes qui n'a l'air de rien, une débauche de nappes et d'effets électroniques et un chant dont Alison Goldfrapp a le secret.
L'album a été enregistré à Stockholm chez Stefan Storm : en plus d'avoir été charmée par le calme romantique de la ville, Alison a eu la chance d'y voir une aurore boréale. Et c'est comme si elle avait réussi à capturer en musique ce phénomène physique qui semble pourtant relever de la magie et dont le flux lumineux a donné le nom à l'album. Tout en regrettant la mélancolie de ces autres disques, on ne peut pas reprocher à la chanteuse d'être heureuse.