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Transmusicales

Rennes, du 30 novembre au 4 décembre 2011

Live-report rédigé par François Freundlich le 6 décembre 2011

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Avant d’entamer une nouvelle année musicale, un passage par les 33èmes Transmusicales de Rennes est obligatoire pour déceler les groupes qui émergeront en 2012. L’an dernier, WU LYF, Connan Mockasin, Funeral Party, Concrete Knives et bien d'autres avaient saisi le virage de 2011. Alors quelles surprises nous a réservées le mythique festival rennais ? Nous voilà partis pour quatre jours aux Transmusicales.

Après une ouverture mercredi soir par le label Kütü Folk sur lequel nous reviendrons plus tard, les Transmusicales poussent les portes de l’Ubu en début d’après-midi avec Les Spadassins pour une prestation revival English sixties. Le chanteur de Bikini Machine passe de l’anglais au français tandis que ses compères aux coupes de cheveux beatlesiennes se trémoussent joyeusement.
Les nantais de Rhum For Pauline enchainent avec une pop assez simple et plutôt répétitive. L’énergie est néanmoins là, même s’il ne faudra pas compter sur de trop fortes variations d’une composition à l’autre. On pense à Friendly Fires sur quelques passages dansants : le chanteur planant parvient à sortir le public de la torpeur en allant danser dans la fosse.
La chaude petite salle rennaise accueille ensuite Monkey & Bear, composé d’un sympathique ours armé de son clavier porté en bandoulière et de son singe bassiste hero. Comme ils le disent, ils n’ont pas de guitare mais ils jouent du rock’n’roll. Festif et fougueux, le son du synthé envahit l’espace et le quatuor parvient à nous faire danser à l’heure du thé. Leur son Game Boy Advance soutenu par une batterie binaire et une voix rappelant Animal Collective se résume en un mot : joyeux. On reconnaît même dans un titre des bruitages de Mario Bros. Cet après-midi, Monkey & Bear a en tout cas pris l’étoile d’invincibilité.

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Offrons nous une traversée du centre ville ensoleillé pour rejoindre la salle de la Cité qui, une fois n’est pas coutume, ouvre déjà ses portes en ce jeudi. La californienne Group Rhoda s’installe seule devant des synthétiseurs plus grands qu’elle pour un public encore clairsemé. Dans sa robe chatoyante, Mara Barenbaum synthétise son concentré de nappes de claviers vintages et de boîte à rythmes, déferlant dans un précipité sombre. L’écho sur sa voix aiguë, rappelant une Kate Bush sous acide, se perd dans une Cité perdue entre les faces dansantes ou dérangeantes du son.
De lourdes basses forment une base lourde et répétitive tandis que des divagations théréminesques subites perturbent une cold wave qui se voudrait minimaliste si elle n’était pas multi-couche. La voix se fait entendre par à-coups et laisse la plupart du temps les machines évoluer. La fin des morceaux est généralement coupée nette, accentuant le passage de l’angoisse des morceaux à un silence brut. On sentait la petite californienne intimidée mais Group Rhoda a su intriguer puis remuer nos organes.

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Après cette première prestation plutôt fraiche, l’atmosphère va se réchauffer avec l’anglais Michael Kiwanuka. On s’engouffre délicatement dans sa voix soul 70s pour un peu de douceur avant d’affronter une soirée qui s’annonce mouvementée. Souriant et visiblement ravi d’être là, il s’accompagne à la guitare acoustique, son groupe restant en retrait malgré de délicieux arrangements piano. Transportées par des cuivres en studio, ses chansons sont ici offertes dans des versions plus dépouillées. On pense à Curtis Mayfield et au son Motown dont il est le digne héritier.
Loin des égarements d’un Ben Harper, Michael Kiwanuka revient aux sources de la soul musique américaine malgré son attachement londonien et des parents Ougandais. Son phrasé délicat incite à fermer les yeux et se laisser enivrer. I'm Getting Ready est l’un des grands moments de ce début de soirée, l’ambiance se fait presque torride à l’écoute des classieuses mélopées laid-back. Sous le charme, le public offre un rappel au crooner qui revient seul avec sa guitare acoustique pour un instant de pure grâce sur Come With Me Brother. Un concert de vraie soul fait toujours du bien aux oreilles et Michael Kiwanuka vient de nous le rappeler.

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On quitte la salle de la Cité pour se diriger vers le Liberté malgré le concert de Bumpkin Island qui s’annonçait comme une apogée... en ayant la mauvaise idée de vouloir découvrir Saïda Baba Talibah qui ouvre les concerts de la grande salle rennaise. La canadienne se lance avec toute son énergie dans un show inspiré des groupes de hard rock des 80s comme Bon Jovi. Les solos de guitare sont lourds dans les deux sens du terme même si la guitariste au crâne semi-rasé y met du style dans la pose.
Saïda s’égosille d’une voix R’n’B plutôt irritante, qui fait d’elle le parfait opposé du bon Kiwanuka. On bascule dans le n’importe quoi musical lorsqu’elle demande au public de compter une dizaine de fois jusqu’à 17 ou encore ce qu’est le Canada. On passera sur le quart d’heure de présentation des membres du groupe et la répétition de demandes d’achat de ses disques. La programmation s’offre alors un trou d’une heure qu’un DJ essaye de combler. Profitons-en pour se reposer les oreilles avant le concert de Vinnie Who.

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Les danois débarquent en nombre sur la grande scène devant un public qui n’a pas répondu présent. Le Liberté est à moitié vide, ce qui influera sur la qualité du son qui s’en trouve affublé d’un écho plutôt malvenu toute la soirée. Pourtant, Niels Bagge et son groupe possèdent les qualités pour plaire au plus grand nombre avec une voix de fausset entre Jimmy Somerville et... Mika. Il faut bien le reconnaître, les poussées dans les aiguës sont connotées par l’anglais qui tourne en boucle sur les radios mais elles ne le devraient pas, faisons donc abstraction, d’autant plus que les chœurs des deux demoiselles sont plutôt appréciables.
On se retrouve en plein disco revival sur Remedy pour une Thuesday Night Fever très Bee Gees. Niels assure le show seul à l’avant de la scène, la parcourt tout en haranguant le public dans son poncho chamarré. Les nappes de deux synthés font ressortir une accroche pop dance chaloupée, tandis que la batterie ne lâche pas le tempo disco. C’est amusant sans être sensationnel, sans non plus atteindre l’enthousiasme de ce qu’à pu faire Scissors Sisters dans ce genre souvent kitsch.

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La question du soir était de savoir comment les Transmusicales allaient enchainer tous les groupes au programme sans changement de plateau. On tient notre réponse puisque certains artistes évolueront en solo à l’avant de la scène devant un écran géant. C’est le cas du londonien Lewis Floyd Henry, chanteur de rue mis en situation devant un mur de briques rouges projeté. Assis et recourbé sur sa guitare blues, Lewis joue sur la saturation de sa voix avec un effet qui n’est pas sans rappeler le texan Scott H. Biram dans ses œuvres. L’anglais s’accompagne aussi d’un mini kit de batterie à ses pieds pour asséner un rythme aussi effréné que ses jambes le lui permettent.
Véritable homme orchestre, Lewis envoie du rock’n’roll avec ses enchainements d’accords Hendrixiens pouvant faire passer Rennes ou Camden pour Memphis. Malmenant sa guitare dans toutes les positions possibles, il subjugue l’audience en crissant ses dents sur sa guitare, faisant raisonner le Romeo & Juliet de Prokofiev comme un hymne américain à Woodstock. Il termine sur une reprise de Protect Ya Neck du Wu Tang Clan, son chant grave devenant un rap terriblement percutant. Ses compositions ne sont pas d’une variété lui permettant d'offrir de longs shows mais son originalité fait le job.

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L’écran se lève sur l’artiste suivant, le slovène Magnifico. Très élégant dans son costume, on s’attend en le voyant à ce qu’il commence par chanter « on m’appelle le chevalier blanc ». Il n’en est rien puisqu’il s’agit d’une musique folklorique d’Europe de l’Est qui va casser l’ambiance à peine débloquée par Lewis Floyd Henry. A partir de ce concert amusant quelques secondes mais très vite fade, rien ne sera plus comme avant. La salle se vide il semble que le public soit parti à l’extérieur boire des bières.
On tient bon pour le prochain artiste en solo à l’avant de la scène. Il s’agit du néerlandais Capacocha qui arrive complètement survolté devant ses machines. Son électro-rock crade va faire danser les courageux. Paradoxalement ce soir, les artistes jouant en solo déploient bien plus d’énergie que les groupes. Capacocha le déjanté mélange des riffs répétitifs à la guitare avec des boites à rythme survoltées. Ses grimaces et ses poses sont assez impressionnantes, on peut affirmer qu’il donne de sa personne et même plus. Sa musique bruitiste parfois borderline est prolongée visuellement par des animations psychédéliques et hypnotiques sur l’écran géant. Au final, on ne sait pas trop à quoi on a assisté, mais on y a assisté.

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Le dernier groupe, attendu impatiemment, apparaît lorsque l’écran se relève, il s’agit des espagnols de We Are Standard. Un groupe d’indie rock pour finir la soirée, ça nous fait un peu plaisir après ces enchainements en demi teinte. Entre guitares pop et synthés accrocheurs, le chanteur à lunettes peine à faire entendre sa voix à l’accent espagnol sur un chant anglais plutôt exotique. Le groupe relève au final le niveau et on se laisse volontiers remuer. Le titre Last Time possède des relents de The Rapture et les choeurs sont repris par l’audience. On aurait peut-être aimé plus de folie à l’espagnole, We Are Standard restant assez posés malgré des tubes plutôt entrainants.

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Cette première journée des Transmusicales se termine donc avec une impression en demi-teinte. Après de bonnes prestations à La Cité, un Liberté plutôt vide et froid n’a pas convaincu. Quelques artistes avec plus de notoriété programmé les autres jours au Parc des Expositions ou même à l’Ubu auraient pu changer la donne de cette soirée. On attend la suite pour voir un groupe qui va enfin emballer notre système nerveux.

Cliquez ici pour retrouver plus de photos des Transmusicales 2011.
Merci à Renan Péron pour sa photo de We Are Standard.
artistes
    Les Spadassins
    Rhum For Pauline
    Monkey & Bear
    Dissonant Nation
    Dempster Highway
    St Augustine
    Hospital Ships
    Kutu Folk Records, The Band
    Group Rhoda
    Michael Kiwanuka
    Bumpkin Island
    Kosmo Pilot
    Saidah Baba Talibah
    Kosmo Pilot
    Vinnie Who
    Lewis Floyd Henry
    Magnifico
    Capacocha
    We Are standard
    Christine
    Orchestra Of Spheres