Tindersticks

Toute nouvellement ouverte, la salle de la Philharmonie de Paris recevait hier soir, pour son premier concert dans un cadre musical non classique, les Tindersticks. Choix de tout premier ordre donc pour inaugurer une série d'évènements musicaux qu'on espère longue et passionnante.



Sans première partie, les anglais arrivent sur scène à 20h40. Stuart Staples murmure un petit « good evening » puis le groupe démarre avec l'impeccable Keep You Beautiful. En formation à six musiciens (guitare-voix, guitare, basse, batterie, clavier et violoncelle), les Tindersticks déploient leur musique élégante et raffinée dans la grande salle parisienne, où le son s'avère clair et léger. La voix caverneuse du leader s'immisce somptueusement dans tout l'auditoire. On a immédiatement l'impression d'écouter un disque tant l'acoustique est de haute tenue. Peut-être manque-t-il juste un tant soit peu de volume, mais ce petit défaut sera très rapidement corrigé par la suite.

Même sans actualité musicale, les britanniques vont nous faire l'honneur de nous jouer trois chansons non issues de leur répertoire. Deux émanent du répertoire de Peggy Lee, actrice et chanteuse américaine principalement dans les années 60. Seconde Chance Man tout d'abord, avec cette batterie toute en retenue sur laquelle se conjugue à merveille les notes du piano de David Boutler. Puis Johnny Guitar, magnifique joyau s'apparentant à une jolie nuit étoilée en Espagne. En guise de bonus, Into The Night de Julee Cruise, égérie de David Lynch, plus classique dans l'esprit mais une fois encore de très haute tenue, avec notamment ces tintements de xylophone qui viennent se mélanger à la guitare électrique. Il faudra toutefois attendre 2016 pour espérer retrouver les anglais sur scène avec un nouvel album.



Si le son est superbe et cristallin, l'ambiance dans la salle est un tant soit peu religieuse. Certes, pas autant que lors de leur performance à l'église Saint-Eustache en avril 2011, mais on est assez loin de l'énergie présente au cours de leur prestation à l'Olympia en octobre 2013. Peut-être est-ce dû au fait que toutes les places de la Philharmonie sont assises.

Fort heureusement cela n'entache nullement la prestation des Tindersticks, même si on aurait aimé que le public se lâche davantage, comme ce sera le cas lors du rappel après l'extraordinaire version du Trouble Everyday tirée de la B.O. du film de Claire Denis, elle-même présente dans la salle hier soir. D'une manière assez étonnante, la setlist aura essentiellement concerné deux albums : The Hungry Saw et Falling Down A Mountain. Peut-être, pour ce dernier, parce qu'il avait été tout bonnement écarté dans le choix des chansons jouées par le groupe lors de son dernier passage dans la salle du boulevard des Capucines. On ne peut en tout cas nullement accuser le groupe de donner dans la redite, même si celui-ci joue dans des conditions assez exceptionnelles. Drunk Tank, seul retour vers le premier album des anglais, a toutefois du ravir les fans de la première heure, notamment de par le jeu de guitare un tant soit peu habité de Stuart Staple, Factory Girls venant clore un set d'une petite heure.



Les six Tindersticks reviennent cependant rapidement sur scène, accompagnés par quatre violonistes pour un rappel de très haute volée. Malgré une interruption de She's Gone, suite à un raté de Stuart, les performances de My Oblivion et de Sometimes It Hurts génèrent une certaine euphorie dans le public. Les anglais donnent d'ailleurs une seconde chance (qui sera la bonne) à She's Gone après la fantastique interprétation de Trouble Everyday, comme précisé auparavant.
Après trente minutes sublimées par les cordes des violons, le groupe quitte de nouveau la scène avant un retour pour un All The Love, une fois encore tirée de The Hungry Saw, en guise d'ultime rappel. Le groupe achève par cette occasion une soirée magique où les sonorités soyeuses et harmonieuses furent omniprésentes.

On peut être rassuré, le baptême soul/rock de la Philharmonie de Paris s'est déroulé sans le moindre problème. On attend déjà avec impatience le groupe de Birmingham pour sa prochaine tournée espérée en 2016.