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PiL

Paris, Trianon - 6 octobre 2015

Live-report par Olivier Kalousdian

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Comme les chats ou certains politiques condamnés, Johnny Rotten (John Lydon pour les intimes) a eu plusieurs vies. La vie d'un enfant désabusé des quartiers pauvres de Londres ; celle où, tout juste post-adolescent il fut intronisé nouveau phénomène de la scène punk, alors naissante, et celle de l'après punk qui, contrairement à d'autres qui se sont noyés dans la dope et les vapeurs de colle, l'a vu rebondir et immédiatement fomenter d'autres projets artistiques, tels que Public Image Limited. Toujours dans l'ombre, qu'il le veuille ou pas, de son mentor détesté, Malcolm McLaren, celui qui hurlait « no future » dans les années 70 affiche aujourd'hui pas loin de soixante ans au compteur et continue de débiter des grossièretés !

Chaperonnés sur scène par un faux frère au look national socialiste proche des sbires marteaux de Pinky dans The Wall, Johnny Rotten et sa formation basse, guitare, batterie (Lu, Bruce et Scott) jouent ce soir sur la scène du Trianon. Ce garde fou qui ne passe pas inaperçu et dont la tache est de mettre le holà aux initiatives trop envolées des photographes de la fosse et celles, trop excitées, du public se tiendra sur le bord de la scène tout au long du concert et, d'un regard inquiet et énervé, tiendra à distance les reflex trop prégnants. Punk is dead.

Après une attente qui frise avec la stratification et la demi-heure de retard, Johnny Rotten daigne enfin entrer sur scène sous les acclamations, en français et en anglais (une grosse partie des premiers rangs), mêlées de sifflets et de hurlements d'un public qu'on n'a rarement vu si avancé dans l'âge !
Les t-shirts PiL ou Sex Pistols habillent la plupart des quinquas présents ; certains, avec un mauvais goût dû à un anachronisme trop visible sur eux et d'autres, qui ont eu la chance de ne pas subir l'alopécie précoce, dans un style décoloré, redingote noir, épingle à nourrice et creepers qui leur va encore à ravir.
Immédiatement, ce qui frappe l'oreille avertie, c'est la réinterprétation de ses propres standards et l'indéniable plaisir que garde l'enfant terrible du punk pour les crachats au sol et les hurlements incompréhensibles. Passés Double Trouble et Know Now, Johnny Rotten choisit de se débarrasser une bonne fois pour toutes du This Is Not A Love Song attendu de pied ferme par toute une salle chauffée par des pintes de bière à sept euros. Et, même dans une version qu'il se plait à ralentir, modifier ou breaker, la salle du Trianon se met à vaciller et à onduler sous les pogos et mouvements d'une foule, finalement pas encore tout à fait grabataire.

Le mid set est légèrement ennuyeux ; les expérimentations sonores de PiL de ces dernières années, exception faite du What The World Needs Now..., et de ses titres dub ont du mal à se frayer une voie dans les live du groupe (Disappointed ou Warrior). Il faudra attendre le rappel et d'anciens « standards » comme Public Image et Rise pour ressentir à nouveau la salle chavirer et transpirer, une dernière fois sous les regards amusés des balcons occupés en majorité par un public arty qu'on imagine galeriste, styliste d'avant garde ou conservateur à la cité de la musique...

Vêtu par Vivienne Westwood dans un style néo passéiste scolaire tendance fin des eighties, lunettes rondes et coupe de cheveux très stylisée en avant, l'ex nihiliste du punk (un pléonasme) est devenu un artiste contemporain à plein temps qui, très propret mais non dénué de talent, continue de feindre cette rage du monde que seul l'âge semble venir limiter.
setlist
    Double Trouble
    Know Now
    This Is Not A Love Song
    Bettie Page
    Disappointed
    The One
    Deeper Water
    Corporate
    Death Disco
    The Body
    Warrior
    Religion
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    Public Image
    Rise
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