Cranes

Cranes est un groupe maudit. La preuve, il aura fallu une dizaine d'albums pour qu'ils soient enfin chroniqués par Sound Of Violence. Le groupe sort enfin du purgatoire, cet endroit entre enfer et paradis qui leur va trop bien. L'enfer parce qu'ils ont eu le malheur de tourner avec The Cure en 1992, et d'être très apprécié de Robert Smith ce qui leur a collé immédiatement une étiquette gothique sur le dos. Le paradis, à cause de notre Vanessa, qui a le timbre très haut perché et peu puissant, comme celui d'Alison Shaw.

Contre vents et marées ils jouent de la musique mélancolique depuis le milieu des années 80 même si leur premier véritable album est sorti en 1991. Toujours entre deux eaux, ils tirent leur nom des grues du port de Portsmouth, et dans leur musique on retrouve ce mélange de sonorités industrielles et de mélodies très romantiques et naturelles. La guitare folk y côtoie les synthés et des guitares plus électriques.

Ce n'est probablement pas un hasard si le groupe a très sobrement intitulé son album Cranes, c'est un de leurs meilleurs disques et il reprend la progression de leur trilogie magique : Wings Of Joy, Forever et Loved. Ces albums sortis entre 1991 et 1994 étaient trop rapprochés pour fidéliser leur public et pas assez différents pour élargir leur audience. S'en est suivi une longue traversée d'un désert semi expérimental avant un retour à des sources plus inspirées.

Ce disque qu'ils ont mis vingt ans à sortir est la synthèse de leur carrière. A la fois très bizarre et très accessible. Ne vous arrêtez pas à Diorama l'instrumental du début, car après une progression continue le High And low final, à peine moins étrange pour paraître normal. Hommage caché à l'Internet, les trois morceaux commençants par 'w' et éparpillés dans la tracklist sont des petits bijoux tranchants et magnifiques : Worlds, Wired et Wonderful things. A noter également la présence d'un morceau chanté dans un français incertain, Panorama qui complète bien cette curieuse galerie dramatique.