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These New Puritans

Paris, Petit Bain - 29 octobre 2025

Live-report par Jean-Christophe Gé

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Si on devait classer les albums en fonction de l'excitation qu'ils suscitent et de leur étrangeté, These New Puritans trusteraient probablement la première place avec leur Crooked Wing. Le groupe ne s'est pas produit à Paris depuis 2019, et s'ils ne sont pas venus depuis si longtemps, ce n'est pas parce qu'ils font partie de ces groupes britanniques qui oublient la France : ils ne sont tout simplement pas partis en tournée depuis la pandémie.

Samuel Barbier-Ficat ouvre le bal. Avec sa chemise bouffante et sa coupe de page, il a des allures de valet de cœur. Il se fraie un chemin jusqu'à son pupitre, perdu dans le bazar installé par les Anglais. Sa partition, déployée sur plusieurs mètres, semble vivante. Pas de micro, pas de présentation, pas de contact visuel : juste la musique, pure et brute. C'est le concept, et ça marche.
Sa musique est constituée de collages de fragments musicaux et de bruits plus ou moins franchement industriels. Les sons arrivent et disparaissent, passent par des filtres : le musicien se place en chef d'un orchestre virtuel et étrange. Le jeu de lumière est aussi simple que violent, essentiellement des flashs éblouissants. C'est une cacophonie presque douloureuse dont émerge quelques notes harmonieuses comme des pissenlits qui poussent sur une plaque de béton. Une ouverture qui va bien parfaitement bien à These New Puritans.


Alors que la lumière revient dans le Petit Bain, je peux faire l'inventaire du matériel des anglais : deux ou trois claviers, un vibraphone avec des tubes en métal, des chaînes suspendues, des percussions, plusieurs pupitres avec diverses machines et une batterie qui a l'air presque banale. Le groupe arrive sur scène en costume sombre très classe, n'oublions pas que George Barnett fait aussi le mannequin pour des grandes marques de luxe.

L'enregistrement d'une voix féminine se fait entendre, suivi de bruits blancs. C'est un peu la panique sur scène, je ne saurais dire s'il y a un problème technique ou si tout se passe comme prévu. Quand le gimmick d'intro de Infinity Vibraphones résonne il est clair que tout va bien, un riff électrique vient se poser dessus, la voix est fragile et la batterie martiale. Le mix est parfait et le morceau gagne en intensité en live. La batterie doublée par des percussions sur A Season In Hell donne tout son sens au titre où les éléments industriels contrastent avec la voix jusqu'au final où orgue se fait entendre.

I'm Already Here est présentée comme une chanson d'amour pour des gens qui n'existent pas. Sur ce morceau minimaliste, on n'entend pas le public captivé et attentif. Un concert d'une telle délicatesse mériterait d'être dans une salle classique avec des dorures et du velours rouge, ou dans une église gothique avec une réverbération naturelle. Et pourtant, dans le ventre d'une barge peint en noir, la musique prend aussi une dimension urbaine et brute qui colle avec l'intimité du morceau.


L'ambiance devient plus sombre sur V (Island Song) et sa première partie dissonante avec juste un orgue et une voix jusqu'à ce que le batteur lance vraiment le morceau dans une boucle cauchemardesque. Mieux vaut être embarqué dans le délire, sinon c'est la noyade assurée. Les premières notes de We Want War sont accueillies avec ferveur. Ce qui est un des titres les plus populaires du groupe, et pas des moins étranges, est délivré dans une version aussi intense que dépouillée. L'enchaînement avec Three Thousand comme sur Hidden, est fabuleux.

La fin du concert arrive trop vite avec Organ Eternal. Jack présente le groupe avant de quitter la scène. George se lève, semble hésiter, joue encore quelques mesures avant de partir à son tour. Otto reste seul sur scène, pris dans une boucle dont on ne sait comment il va se sortir... tout simplement en la noyant dans une longue nappe montante ! Magique.
setlist
    Bells
    Infinity Vibraphones
    A Season In Hell
    Industrial Love Song
    I'm Already Here
    Fragment Two
    V (Island Song)
    We Want War
    Three Thousand Wild Fields
    Where The Trees Are On Fire
    Organ Eternal
photos du concert
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