Honeytrap

Le nouvel album de Honeytrap est sorti, au moins une bonne occasion de sortir les shots de vodka et de trinquer notamment à la gloire des Dexy's Midnight Runners.

Il y a d'abord cette pochette ornée de marionnettes. Le folklore russe éclate en plein froid et laisse entendre pour les plus imaginatifs quelques compositions de Stravinsky. Visuellement, le théâtre slave est planté, offrant plusieurs pistes possibles entre tradition sibérienne et cartoon burlesque. Passée cette étape vient le moment de l'écoute. On fait vite la rencontre d'un violon, enivré, qui flirte volontiers avec des guitares et des basses délurées. Le style klezmer s'acoquine avec du rock, entamant tout deux une farandole inattendues qui donne envie de battre la mesure avec les pieds et taper des mains.
Nous sommes en 2010 et les londoniens de Honeytrap sortent leur deuxième album sur leur propre label, Crooked Teeth Recording Club. Après un premier album souvent qualifié de confus et brouillon aussi surprenant qu'un verre de Schnapps jeté en pleine figure, le quatuor semble décidé à poursuivre sur la voie du foutoir joyeusement assumé. Mais après tout, les respectés liverpuldiens de The Coral n'ont ils pas essuyé eux aussi à leur débuts des critiques sur leur style psyché-folk hallucinogène pour finalement devenir un groupe plus inventif ?

D'ailleurs, notre quatuor, dans sa folie douce, rappelle les auteurs de Dreaming Of You et de Sorrow Or The Song avec cette conviction retrouvée notamment sur Roslin Is A Cylon, où le chant ressemble à un discours délirant proclamé debout en fin de repas sur des caisses de vin. Subtile, la musique de Honeytrap bénéficie d'instrumentations riches qui fourmilles de bonnes trouvailles à chaque couplets et chaque refrains où l'on imagine les violons faire de grandes accolades à des guitares snobs qui se laissent tenter par une danse endiablée pour le dernier solo de l'acte III.
Sur des titres tels que To America, le chant conquérant fait du pied aux français de Jill is Lucky, lesquels prendraient eux aussi volontiers le large pour d'autres horizons déjantés... Les crescendo s'enflamment tandis que la voix de Sophie façon Isobel Campbel apaise et calme les ardeurs de Dan.
Vigoureux, affrontant avec fierté le froid des steppes, la folk de Honeytrapp fait penser au son aristocrate et parfois solennel de Arcade Fire. Le magnifique titre Battersea Lovers en est l'emblème. On regrette que cette mélancolie de grande tragédie ne soit pas présente d'avantage sur des titres plus fades comme le minimaliste Apparition Of Petrushka's Double. Le très Coral dans l'âme, Bookworms insuffle un bon élan à la dernière partie de l'album comme une bonne rasade d'eau de vie réchauffe l'aventurier perdu dans la Taïga.

Alors levons nos verres pour trinquer à Honeytrap et son périple fantastique !