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Ibibio Sound Machine

Ibibio Sound Machine

Ibibio Sound Machine - Ibibio Sound Machine
Chronique Album
Date de sortie : 24.02.2014
Label : Soundway Records
4
Rédigé par Xavier Turlot, le 19 février 2014
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Les échanges culturels sont le fondement de la musique, et les possibilités qu’ils offrent semblent toujours un peu plus infinies. Avec le premier album d'Ibibio Sound Machine, le mélange atteint un haut degré de diversité dans les ingrédients, en rotation autour d’un axe de musique traditionnelle africaine. Impossible d’énumérer la quantité de groupe qui ont été influencés, parfois jusqu’à l’extrême, par les rythmiques et les harmonies d’Afrique. Que ce soit au Royaume-Uni ou dans le reste du monde Anglo-Saxon, nombre de musiciens y ont puisé une inspiration nouvelle, une cure de jouvence stylistique. Avec Ibibio Sound Machine, groupe de l’anglo-nigériane Eno Williams, c’est le processus inverse : un squelette traditionnel agrémenté d’innovations électroniques.

La chanteuse a voulu mettre en musique les contes ancestraux de son enfance, dans leur langue originelle (l’Ibibio), en faisant la part belle à l’électronique et aux fusions des genres presque inévitables dans le bouillonnement de la scène londonienne. Les sections rythmiques imperturbables, les parties de guitares éthérées et enlevées, comme les incantations scandées par Eno Williams nous plongent immédiatement dans une téléportation sonore efficace. Sur I’m Running, une basse lourde et tribale soutient l’ensemble sur lequel les autres instruments viennent danser ; une guitare à la frontière du funk et un synthétiseur qui balance une bouillie de sons 8bit commencent déjà à brouiller les pistes.
Le pas vers la fusion modernité/tradition est de plus en plus explicite : dico-funk ultra solide sur The Talking Fish, la ligne de basse diabolique et la batterie sortie des années 1980 corsent les choses. La guitare funk, les cuivres et les touches de synthétiseur en ébullition se marient à la perfection sur cet essai transversal. Pour les arrangements électroniques, la parcimonie dans l’emploi de la guitare est une bénédiction car elle lui laisse un champ d’expression extrêmement large. Ainsi le synthé se glisse dans chaque recoin, s’insinue dans tous les espaces laissés vides avec une fluidité qui ne quittera jamais l’album. Let’s Dance, le single du disque, exploite les mêmes recettes en mettant en avant une basse sourde surplombée par une partie électronique sautillante. Le groupe brouille en permanence la chronologie des influences qu’il emploie, de celles qui remontent à la nuit des temps jusqu’au dernier petit raffinement technologique.

Eno Williams dévoile de temps en temps des accents plus soul, laissant sa voix prendre encore plus de libertés mélodiques (The Tortoise) pour laisser vibrer les sonorités de sa langue maternelle. L’electronica sait se faire plus présente sur certains morceaux, entre basses sourdes et boîtes à rythmes patiemment ciselées : la sublime Woman Of Subsistance prouve que la formation est aussi à l’aise dans les subtilités instrumentales et la mélancolie mise en musique que dans les solides rythmiques martelantes.
Séance de magie noire sur Prodigal Son, le morceau sombre s’appuie sur une belle alchimie entre la batterie finement exécutée et toujours cette basse qui semble tellement bien ancrée qu’on penserait que les chansons ne finiront jamais. Mais ici le synthétiseur et les cuivrent offrent des teintes plus inquiétantes, mystiques et tristes, encadrant les envolées profondes de la chanteuse.

Une fois arrivés à la fin de l’œuvre, après la magnifique conclusion polyphonique en a capella, on se rend compte que le voyage offert a sa patte propre, qu’il a su trouver une touche particulière en mélangeant cette foison d’identités sonores qui bousculent les auditions confortables. Une très belle réussite pour cette formation hétéroclite que l'on aura le plaisir de voir sur scène en France au printemps.
tracklisting
    01. Voice Of The Bird
  • 02. I'm Running
  • 03. The Talking Fish
  • 04. Let's Dance
  • 05. Uwa The Peacock
  • 06. The Tortoise
  • 07. Woman Of Substance
  • 08. Prodigal Son
  • 09. Got To Move, Got To Get Out
  • 10. Ibibio Spiritual
titres conseillés
    Let's Dance, I'm Running, Woman Of Substance
notes des lecteurs