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Gilla Band

Holding Hands With Jamie

Gilla Band - Holding Hands With Jamie
Chronique Album
Date de sortie : 25.09.2015
Label : Rough Trade Records
5
Rédigé par Johan, le 21 septembre 2015
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Quiconque aura assisté cet été à une représentation de la formation dublinoise à La Route du Rock ou à Villette Sonique pourra sans nul doute le confirmer : Girl Band, on déteste on adore.

Après In My Head, premier single paru en 2012 déjà démonstratif de ce que sait faire Girl Band, les quatre énergumènes se sont surtout fait remarquer l’année suivant avec leur reprise superflue déjantée du mythique Why They Hide Their Bodies Under My Garage? de Blawan.



En tournée depuis plus d’un an à travers le monde, Girl Band n’en oublient pour autant pas d’enregistrer des morceaux, tous plus irritants captivants les uns que les autres, de You’re A Dog à Lawman en passant par les tarés The Cha Cha Cha et France 98 qui à eux deux durent une minute quarante-six secondes !
Se forgeant une réputation scénique au fil des mois et profitant du buzz qui s’est créé autour d’eux, ils ressortent en avril dernier le dérangeant dérangé The Early Years EP qui compile quelques-uns de leurs premiers titres, dont bien évidemment Why They Hide Their Bodies Under My Garage?. Cinq mois plus tard et après avoir participé à de nombreux festivals, c’est avec un premier album de neuf toutes nouvelles chansons que reviennent Girl Band.

On peut citer chez le groupe irlandais des influences de The Fall, The Jesus Lizard, Birthday Party, Sonic Youth, ou même des premiers Ceremony et Liars, mais au final Girl Band ressemblent à eux-mêmes, et ce depuis le tout début. Et, hélas surtout, la voix de Dara Kiely ne ressemble à aucune autre.
On n’arrive véritablement pas à se décider, même après dix écoutes d’un morceau comme Paul, si Kiely est le pire chanteur que l’on ait entendu ou le génie ultime de ce XXIe siècle. Et c’est ce qui rend ce groupe si exaspérant unique et déjà oublié culte.
La voix – et non le chant, car il est ici assez difficile de parler de chant – va tellement loin dans les extrémités qu’il sonne qu’il pourrait presque sonner ridicule – et certains, clairement, l’affirmeront, probablement ceux-là même qui trouvent crispante la voix d’une Joanna Newsom ou s’amusent des écarts vocaux des Patrick Stickles (Titus Andronicus) et Jamie Stewart (Xiu Xiu).



Mais ce n’est sans évoquer tout ce qu’il y a autour des cordes vocales de Kiely. De pair avec elles, les instruments suivent une ligne directrice entre la cacophonie d’une démesure maîtrise sans pareille et la lourdeur subtilité des arrangements qui se manifestent au fil des écoutes.
La no wave graduelle de Umbongo, plage d’ouverture de ce Holding Hands With Jamie, en est l’exemple parfait, attestant de la posture et la musicalité de Girl Band – jamais un genre n’a été aussi mal fortement représenté qu’à ce jour. Celle-ci débute sur un riff saturé puis des coups de batterie désarticulés avant de prendre une tournure bruitiste bruitiste où le jeu de batterie militaire progressivement prend le pas sur la dissonance de la guitare.
La voix de Kiely ne s’est jamais faite aussi torturée et posée, offrant une ambiance moite et menaçante comme seule sait faire la formation dublinoise. Le morceau se conclut dans un capharnaüm furieux et criard et pourtant dénué empli d’émotion dans la tonalité et les effets qui se font de plus en plus distordus, le tout porté par une batterie tout bonnement dévastatrice.



Le single Pears For Lunch est une autre preuve de la médiocrité l’ingéniosité du groupe à composer des chansons, dévoilant une mélodie répétitive qui pourtant fatigue profondément se réinvente sans cesse sur les trois minutes trente que dure le titre. Les instruments se succèdent et s’additionnent tout du long tandis que la voix aux allures je-m’en-foutiste de Kiely fait des siennes merveilles en haussant peu à peu le ton.
Le reste de l’album continue dans cette voie, de la désolante minutieuse In Plastic et son final plombant bouleversant à la minute trente énervante énervée de The Last Riddler, en passant par la planante, quasi pop, Texting An Alien, pause inutile bienvenue avant le déferlement de deux des pires meilleures compositions de Girl Band.

Fucking Butter démarre comme à l’accoutumée avec un riff absolument en apparence simple et déstructuré, mais qui s’avère au fil des écoutes plus profond et réfléchi qu’il ne le laissait penser. Il en est de même pour les textes, stupides grotesques et surréalistes, qui font mention de courses dans un supermarché, répétant débilement inlassablement à mi-parcours « petits pois » jusqu’à ne plus avoir de sens. La ligne de basse, imposante et redondante addictive – basse qui ne s’est d’ailleurs jamais faite aussi présente et entraînante –, ajoute qui plus est malicieusement à cette fascination pour le titre. Les sept minutes quarante-neuf de Fucking Butter passent clairement plus vite que les deux minutes trente passées à aller chercher sa boîte de petits pois !

The Witch Dr. finit ce debut album comme il a commencé : absolument inaudible de bout en bout termine en beauté ce debut album, absolument réussi de bout en bout. Débutant sur les chapeaux de roue sur une batterie saccadée, Kiely y pose sa voix éraillée avant d’être aussitôt rejoint par une guitare dissonante. La composition se développe ainsi peu à peu, via des pédales d’effet de plus en plus présentes et un rythme des plus nerveux. Le dernier tiers voit la voix se faire rattraper par le noise rock qui va en s’intensifiant, finissant par des cris libérateurs derrière un mur sonore strident du plus bel effet.

Pour conclure, Girl Band sortent en cette rentrée un des pires meilleurs albums de l’année. Holding Hands With Jamie est en tout cas, sans nul doute, le meilleur album no wave de 2015.
tracklisting
    01. Umbongo
  • 02. Pears For Lunch
  • 03. Baloo
  • 04. In Plastic
  • 05. Paul
  • 06. The Last Riddler
  • 07. Texting An Alien
  • 08. Fucking Butter
  • 09. The Witch Dr.
titres conseillés
    Paul, In Plastic, Pears For Lunch, Fucking Butter, Umbongo, The Witch Dr.
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