Maven Grace

Maven Grace serait, selon les quelques histoires lues ici et là sur l'internet, une formation issue d'un amour mutuel pour Roxy Music. Un point de départ qui ne peut que garantir le succès, et c'est bien ce que l'on souhaite au groupe constitué de Mary Home, Henry Jack et Tom White. Pour les jeunes quadras et les autres fans de pop rock made in Brighton, Thomas White n'est pas un inconnu, loin de là. Le musicien touche-à-tout a à son actif une belle liste de collaborations en plus d'avoir fondé avec son frère Alex l'un des groupes le plus emblématiques de la scène post-britpop anglaise du tout début des années 2000 : The Electric Soft Parade. Après avoir mené de front la trop courte expérience Brakes avec son frangin et Eamon Hamilton, alors échappé de (British) Sea Power, le multi-instrumentiste a accompagné et produit beaucoup d'autres formations dont Sea Power, Levellers, Mystery Jets et plus récemment The WAEVE, composé de Rose Elinor Dougall et Graham Coxon.

Après cette concise biographie, il convient de relier l'anglais à Maven Grace, formé avec ses deux amis de longue date, qui nous offre en cette fin d'hiver qui ne sait plus où donner de la tête (passer de quinze à deux degrés n'est pas humain, cela obstrue les sinus de la chroniqueuse) un premier album de pop très orchestrale, qui donne des envies de printemps avec tout ce que cela implique de douceur et de lumière.
Le timbre très fin et plutôt juvénile de Mary Home qui tient le chant sur la majorité du tracklisting nous ancre dans une atmosphère très éthérée, d'où une sensation globalement apaisée lors de l'écoute. Le titre d'ouverture Me Versus The Volcano, tout en écho et reverb, avec une ligne de piano tant classique qu'électronique apporte énormément de texture à ce petit brin de voix qui ne dissimule pas une certaine fermeté lors des refrains. S'en suit Dark Blue Heaven qui voit se joindre à au micro Henry Jack, dont le chant lui aussi si fin permet d'éviter tout contraste qui viendrait casser cette sonorité toute en finesse.


Les titres se suivent et se chargent en intensité au fur et à mesure, quand When The Butterflies Come Down, Lone Stars, Lost Souls et Time Stands Still entrent en scène afin de mieux révéler les guitares jusqu'ici dissimulées habilement. Les violons apportent une couche supplémentaire d'élégance aux sonorités très aériennes, et les plus érudits d'entre vous reconnaitrons ici la patte de Tom White, oscillant toujours entre chamber pop et rock indé, évoquant les meilleures expérimentations d'une de ses nombreuses mais toujours trop courte formation The Fiction Aisle.
La fluidité est le premier ingrédient de cet album qui suit un fil conducteur lui-même au tracé plutôt irrégulier : on ne peut en effet réellement classer Maven Grace dans un répertoire donné, tant les inspirations sont multiples et l'orchestration si riche et variée. Il n'y a cependant aucune dissonance, ce qui permet de rentrer dans cet univers de la façon la plus délicate possible et sans sensation de brouillon, souvent le risque s'agissant de pop atmosphérique.


Il s'agit donc ici d'associer trois musiciens qui ne sont plus des débutants mais qui arrivent à créer un tout nouvel univers, plongeant dans leurs racines respectives pour nous offrir un mélange qui se révèle profondément touchant, voire émouvant. En ces temps de post-punk V 3.0 (d'ailleurs, à partir de quand pouvons-nous parler de post-punk ? Selon moi à la suite du concert des Sex Pistols au Fare Trade Hall de Manchester le 4 juin 1976) ou de l'avènement des playlists venant mélanger le tout-venant aux pépites injustement dissimulées dans ce flow de médiocrité, Sleep Standing Up de Maven Grace vous garantit de ressentir tout un panel d'émotions qu'on ne peut vivre qu'au travers d'une écoute pleine et entière d'un disque.