En ce tout début janvier, à peine remis de deux semaines entières de mets beaucoup trop riches et se préparant à enchaîner sur un mois de galettes des rois, rien ne vaut comme gymnastique que de se lancer à la découverte d'un musicien qui nous était inconnu jusqu'alors : Skinner. Pour nombre d'entre nous, on pensera au directeur de l'école élémentaire de Springfield, pour les ados des années 90, au directeur-adjoint chargé des affaires non classées du FBI et pour les plus experts à Aaron Corcoran, jeune musicien irlandais basé à Dublin qui nous propose son premier album New Wave Vaudeville après avoir parsemé de ses meilleurs singles les plateformes de streaming tout au long de 2024.
Ces derniers rassemblés sur un même disque, nous pouvons enfin entrer dans le monde très inspiré de Skinner, et ces dix titres aux influences ouvertement non-conformistes confirment notre sentiment que la page du post-punk bileux et souvent acnéique qu'ont fièrement porté aux nues des groupes comme IDLES, Fontaines D.C. ou shame se tourne enfin. La dénomination n'étant pas près de disparaître, nous appuierons de ce fait que la belle moisson de nouveautés que notre rédaction a mis en avant toute l'année passée étoffe largement le champ des possibles de la scène british et irlandaise. Skinner vient donc baptiser 2025 en nous faisant pénétrer dans son univers très hétérogène et particulièrement barré.
Avec comme nom d'album une référence au collectif d'artistes new New-Yorkais porté entre autres par Jean-Michel Basquiat ou Keith Haring, mettant en avant les aspects les plus excentriques et colorés d'une scène qui émergeait à la toute fin des années 70 dans un contexte plutôt sombre, Skinner définit sa musique comme un espace de totale liberté où l'on peut faire ce que l'on veut en étant tout ce que l'on souhaite être, sans risque de représailles. Une philosophie qui prend bien sa source dans le message que faisaient passer ces incroyables artistes, tout en faisant reculer les frontières de l'art lui-même et qui se traduit dans ce disque par un audacieux patchwork musical piochant tout autant dans le punk brutal que dans le jazz le plus chaud, parsemant de-ci de-là les cadences pittoresques inspirées de ska et une belle couche d'indie rock issue de la scène américaine du début des années 90.
Avec un tel foisonnement d'idées, pas étonnant que la balade tout du long des dix pistes nous fasse voyager loin et surtout de façon totalement anarchique. L'entrée en matière qu'est New Wave Vaudeville en est le meilleur exemple : avec cette basse funky et ce saxohpone joyeux, Skinner nous expédie fissa sur le dancefloor, avec un côté déluré qui nous évoque d'autres joyeux drilles que sont Opus Kink. Le chant est braillard, nous incite justement à danser et l'on ne va ainsi pas se faire prier. Tell My Ma passe la cinquième avec ses hurlements, tout comme Sour Milk et son rythme qui se terminent dans un feu d'artifice de guitares et de saxophones que l'on semble être en train d'égorger.
Jesus Wore A Drag évoque de l'excellent rock lo-fi à la Pavement (avec toujours le saxophone venant pimenter le tout) et Calling In Sick est un bel hommage au meilleur de The Fall, dont Aaron se veut un grand admirateur. Ça part dans tous les sens, le timbre de voix déraille, la guitare hurle à pleins poumons et tout ce capharnaüm n'est que pur délice. Le chemin est tortueux dans le petit monde de Skinner et les angles plus que saillants, allant jusqu'à nous mener au chaos avec des shots d'une minute et quelques secondes de pur pétage de plombs avec You Live In A Shoe, que tous les plus punks d'entre nous ne renieront pas. Comment donc s'y retrouver dans cette jungle sans queue ni tête qui joue de tant d'artifices ? En écoutant plus attentivement des morceaux plus posés tels Spiralling et le très beau Here Comes The Rain, conclusion qui vient apaiser le tout et où l'on capte réellement les talents de songwritter du jeune irlandais.
Vous souhaitiez passez à la diète afin d'éliminer tous les excès de vos repas de fêtes ? Pas de chance, Skinner vous propose en ce début janvier son New Wave Vaudeville, soit un menu ultra riche mais d'une incroyable subtilité, un cocktail survitaminé et pétillant à souhait qui, lui, ne vous donnera jamais la gueule de bois. Quoi de mieux pour débuter cette nouvelle année 2025 que nous vous souhaitons la plus rock possible, pleine de bonheur à partager sur platine ou en live, toujours présents à vos côtés pour vous guider dans le meilleur du rock britannique.
tracklisting
01. New Wave Vaudeville
02. Tell My Ma
03. Sour Milk
04. Jesus Wore Drag
05. Spiralling
06. Calling In Sick
07. Geek Love
08. Doh Re Mi Fah
09. When You Live In A Shoe
10. Here Comes The Rain
02. Titre 2...
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New Wave Vaudeville, Calling In Sick, Jesus Wore A Drag