Les Transmusicales de Rennes sont de retour pour une 31ème édition résolument placée sous le signe de la découverte. Cette année, une place importante est réservée à la scène française et locale puisque ce sont une quarantaine de groupe made in France qu’a réunis Jean-Louis Brossard, le programmateur à l'oreille aiguisée. On s’attend à découvrir cette scène en ébullition dés aujourd’hui. Le festival sera également marqué par le retour dans la salle du Liberté remise à neuf d’une fort belle manière avec des groupes d’horizons différents mais qui ne manqueront pas de faire parler d’eux.
Osni a la lourde charge d’ouvrir le festival dans la petite salle du 4bis à l’heure du digestif. Malgré cela, le public a répondu présent, et à raison, car dés les premiers morceaux le quatuor nous fait vibrer dans un son shoegaze lancinant. Ils viennent de « Lille près de Manchester » et cela se ressent bien dans leurs influences telles les Stone Roses ou The Jesus & Mary Chain. Le duo de voix graves masculin/féminin se posant sur des riffs incisifs et une touche de synthé n’est pas sans rappeler les récentes sorties de The Pains Of Being Pure at Heart. L’insolente bassiste à l’attitude d’une Kim Gordon teenage nous offre plusieurs bons moments comme sur la chanson Black Cat. Si on nous avait dit qu’Osni sont le nouveau son de la scène anglo-saxonne, nous l’aurions cru sur parole, mais nous nous rendons compte que ce groupe a parfaitement digéré toutes ses influences pour nous proposer la première bonne découverte du jour, un vrai nu-gaze frenchy.
The Bird Is Yellow leur succède sur cette même scène. Ces bretons jouent à domicile et ont déjà été aperçus lors de la Tournée des Trans. Le quatuor livre un electro-rock efficace mais qui tourne assez vite en rond. Les chansons se perdent en longueur et deviennent rapidement lassantes malgré une intensité présente. Le charismatique chanteur et bassiste du groupe parvient à sauver certains passages lorsque les chœurs des autres membres ne s’en mêlent pas. On retiendra Dance With My Dog, pop song entrainante et dansante.
Le troisième groupe de cet après-midi musical sonne comme une fraîcheur power-pop dans ce monde de brutes : Misty Socks. L’appréhension est palpable sur le visage des jeunes angevins qui n’ont certainement pas la même expérience que leurs prédécesseurs mais qui vont parvenir à faire décoller du sol un public jusque là plus attentiste. Dans une tradition 90’s de trios qui pétillent, ces kids ont bien entendu l’écho des Pixies à leurs oreilles. La charmante bassiste pose sa voix aiguë sur des mélodies simples mais qui envoient des riffs de guitares des plus efficaces et accrocheurs. Sa voix répond à celle du guitariste méchu qui s’excite, danse et joue avec des rennais qui font trembler le parquet. On sent bien la cohésion entre ces trois-là et on est parfois surpris par un peu plus de subtilité sur certains morceaux, quand d’autres en manque cruellement. Tout cela présage d’un futur doré. A suivre…
La salle de l’Ubu accueille ensuite Peter Winslow. Accompagné de son groupe, le parisien livre une pop assez mollassonne qui ne décollera jamais vraiment. On s’ennuie ferme en ce début de soirée, même si les compositions studio de ce garçon ainsi que les comparaisons qui ont été faites auraient pu être prometteuses. Malgré tout on ne peut qu’attendre la suite en se disant que les groupes « découverte » de l’après-midi auraient plus enflammé un public endormi.
Tout le monde est là pour voir la curiosité de ces Transmusicales. Il est rare d’assister à une première rencontre au sein d’un groupe, cela se fait souvent dans une chambre ou une cave. Ce soir, deux univers différents vont se rencontrer pour un moment unique. Slow Joe, crooner tout juste débarqué d’Inde, n’était jamais venu en France mais chante sur les chansons du groupe lyonnais The Ginger Accident. Ils ne s’étaient jamais rencontrés, mais Joe a arrangé les chansons de Cédric de la Chapelle, guitariste. Le frêle Joe débarque sur la scène et on se demande si la sauce va vraiment prendre. Mais lorsque sa voix, étonnamment comparable à celle d’Elvis, raisonne dans le club ; tout le public tombe vite sous le charme.
De fait d’une rencontre franco-indienne, on se retrouve transporté sur le Mississipi pour un blues qui fait claquer des doigts. Après un temps d’adaptation nécessaire, un groupe prend forme sous les yeux d’un public bluffé et qui ne se fait pas prier pour acclamer la création. Les quatre du Ginger Accident forment réellement un backing-band idéal pour Joe. Le vieux bonhomme s’installe alors à une table sur la scène pour un petit passage a capella. Il donne le rythme de ses mains et de sa langue pour ne livrer que sa voix intemporelle et émouvante. Cédric vient l’accompagner à la guitare électrique uniquement pour un blues des plus mélancoliques. Avec son accent qui fleure bon les rues chaudes de Bombay, il présente ses acolytes d’un week-end et remercie chaleureusement tout le monde. Ne voulant plus quitter la scène Joe fait durer l’instant avant d’être accompagné par une accolade de Cédric. Voilà une rencontre que cette salle n’est pas prête d’oublier. Slow Joe & The Ginger Accident jouera à nouveau au parc des expositions vendredi soir.
Comment retrouver nos esprits après une telle prestation ? On a juste envie de savourer. Pour continuer la soirée sans transition, c’est le quatuor electro-punk de Brighton, Transformer, qui prend le relai. On change totalement de registre, peut-être un peu trop brusquement. Les beats electro d’un chanteur geek vont tenter de remuer un public qui n’était pas venu dans cette optique. On tourne malgré tout vite en rond et on pourra comparer Transformer à un Hot Chip du pauvre… Lorsque Johny Giles sort sa trompette pour accompagner le tout, on ne comprend pas vraiment l’intérêt à moins de masquer la faiblesse des compositions. Après un trop plein de chaleur, on a un trop plein de froideur et le choix d’enchaîner ces groupes n’était peut-être pas le plus judicieux.
Cette première journée des Transmusicales en forme de mise en bouche riche en découverte nous a fait découvrir sur la scène française en ébullition avec notamment Osni puis voyager loin, très loin avec Slow Joe & The Ginger Accident... et je ne suis pas sûr d’avoir vraiment atterri.