Après une première journée sous un soleil radieux, c’est un temps pour le moins menaçant que les festivaliers découvrent en ce samedi 24 août au moment de pénétrer dans le parc de Saint-Cloud alors que les plus pessimistes annoncent de nombreuses averses et des risques d’orage. Au final ? Seules quelques gouttes éparses viendront accompagner la prestation de FI/SHE/S et une pluie soutenue ponctuer les ultimes minutes du concert de Phoenix et raccompagner le public vers les transports en commun.

Bien que leurs membres soient originaires des quatre coins de la planète,
FI/SHE/S, basés en région parisienne, se sont déjà fait un nom sur les scènes françaises en 2013 lors du Printemps de Bourges ainsi que dans le cadre des prix Chorus et Adami Deezer de Talents. Les retrouver ainsi propulsés à Rock en Seine en début de journée n’est pas nécessairement une surprise, plutôt un pari... gagnant. En effet, sans concurrence directe à cette heure, le quatuor trouve le soutien nécessaire à la réussite de sa prestation au sein de laquelle se mêlent guitares tropicales, synthés aériens et mélodies tantôt psychédéliques tantôt plus légères. Si beaucoup se contentent d’écouter le concert au loin, allongés dans l’herbe, les premiers rangs se révèlent quant à eux enthousiastes, pour le plus grand plaisir d’un groupe semblant apprécier la chance qui est la sienne en ce jour.

Quelques trois quarts d’heure plus tard,
Eugene McGuinness s’apprête à prendre ses quartiers sur la Grande Scène. Sans véritable album à défendre, son
The Invitation To The Voyage ayant désormais vu le jour il y a plus d’une année, celui que beaucoup avaient découvert en tant que simple guitariste aux côtés de son ami Miles Kane va principalement s’appliquer à présenter son univers face à un public très majoritairement novice mais réceptif face aux envolées pop un brin rétro du musicien anglais.
Accompagné par trois musiciens, Eugene McGuinness fait preuve d’une belle aisance, enchaînant ses compositions sans temps morts et poussant le public à réagir implicitement de par la qualité de ses mélodies, souvent faciles d’accès et entêtantes, et une attitude très volontaire. Certes sa musique n’est sans doute pas des plus originales et ne se démarque guère de ses prédécesseurs, mais le musicien passe l’épreuve de la Grande Scène haut la main, en attendant de nous revenir sans doute dans quelques mois avec un nouvel album.

Sur la Scène de la Cascade, à 17h55, l’une des révélations françaises des derniers mois a été précédée par sa réputation :
La Femme voient ainsi un très nombreux public leur faire face. Parmi ce dernier, des fans réagissant au doigt et à l’œil à la moindre de leurs désirs, mais également de très nombreux curieux venus se faire un avis sur un groupe tout autant adoré que haï depuis ses débuts, et plus encore depuis la sortie de son album
Psycho Tropical Berlin au printemps dernier.
Indéniablement ancrée dans les années 80s, au croisement de la cold wave et de la new wave de part l’utilisation parfois simultanée de percussions électroniques et de nombreux claviers, la musique de La Femme ne laisse personne indifférent. Certains sont hypnotisés (
Sur La Planche), d’autres se gaussent à l’écoute de paroles naïves flirtant trop souvent avec le ridicule (
Le Blues De Françoise), mais les limites du groupe, notamment vocales concernant le chant de Clémence Quélennec, se font souvent trop criardes pour justifier les louanges que ces derniers ont pu recevoir dans un passé somme toute récent. Avons-nous vu évoluer aujourd’hui la relève du rock français ? Plus sûrement un énième phénomène de mode voué à disparaître à moyen terme.

Les choses sérieuses commencent une demi-heure plus tard à l’occasion du retour de
Black Rebel Motorcycle Club en France, quelques mois après deux dates à guichets fermés dans la salle du Trianon mais aussi trois ans après leur dernière prestation sur le site du festival francilien. Le trio avait offert à cette époque une spectacle resté dans les mémoires sur la Scène de la Cascade, alors que c’est à la Grande Scène que les américains s’attaquent aujourd’hui.
Si l’accueil du public ne se révèle pas aussi chaleureux qu’espéré, que Leah Shapiro s’active sobrement derrière ses futs et que Peter Hayes semble assurer le minimum syndical derrière ses lunettes de soleil, Robert Levon Been ne ménage pas ses efforts pour porter sa formation à bouts de bras, multipliant les poses guitare en main et remerciant à plusieurs reprises leurs fans ayant fait le déplacement. L’entame du concert se voit menée sur les chapeaux de roue avec
Let The Day Begin,
Beat The Devil's Tattoo ou encore
Ain't No Easy Way et son harmonica, avant de voir s’opérer un ralentissement du rythme symbolisé notamment par le dispensable
Weight Of The World ou
Lullaby. Les dernières minutes voient l’apparition des deux seules compositions tirées du premier album éponyme du groupe, à savoir les incontournables
Whatever Happened To My Rock & Roll (Punk Song) et
Spread Your Love, remaniée pour l’occasion et marquée par la descente de Robert Levon Been de la scène pour se placer au plus près du public. Sans avoir livré leur meilleure prestation, Black Rebel Motorcycle Club auront donné un coup de fouet à une journée qui aura ronronné trop longtemps.

Une petite heure après le départ du trio, deux ambiances très différentes s’offrent aux quelques 40 000 festivaliers ayant fait le déplacement en ce samedi : sur la Grande Scène,
Nine Inch Nails assurent un spectacle à l’américaine en croisant un spectacle visuel impressionnant et une puissance sonore assourdissante.
Quelques centaines de mètres plus loin, Jackson Fourgeaud, alias
Jackson and His Computer Band, s’adresse quant à lui aux amoureux des musiques électroniques en brassant les genres derrière ses machines, de la house au rock en passant par des sonorités plus hip-hop. Le résultat s’avère malgré tout en deçà des espérances avec une identité visuelle peu marquée et un ennui certain prenant le dessus minute après minute.

Alors que la nuit prend progressivement possession du Parc de Saind-Cloud, l’une des attractions électroniques du week-end est en passe de réveiller plusieurs milliers de festivaliers sur la Scène de la Cascade :
Vitalic, venu présenter son spectacle VTLZR. S’il n’est plus nécessaire de présenter Pascal Arbez, digne représentant de la « french touch » et accompagné pour l’occasion d’un claviériste et d’un batteur, le show visuel va très rapidement marquer les esprits, les éclairages associés aux effets visuels relayés par des écrans placés au centre de la scène transformant un peu plus titre après titre l’herbe en véritable dancefloor s’étendant jusqu’à la Grande Roue dominant le site. Certes un peu plus de subtilité aurait été la bienvenue, mais l’efficacité de la prestation restera une belle réussite.

A peine le français a-t-il quitté les lieux que la foule se déplace massivement vers la Grande Scène pour le tant attendu retour dans la capitale de
Phoenix. Désormais connus et respectés à l’échelle planétaire, ces derniers vont s’appliquer durant plus de 1h15 à démontrer que leur succès n’est pas usurpé, faisant preuve par la même occasion d’un enthousiasme et d’une motivation insoupçonnés jusqu’alors.
En choisissant de placer
Entertainment ainsi que
Lisztomania parmi les premiers titres de leur setlist du soir, les quatre musiciens s’assurent un succès populaire qui ne faiblira que très rarement. Accompagnés par un gigantesque écran couvrant la majeure partie du fond de la scène et sur lequel seront diffusés tout au long du concert diverses images ou vidéos, notamment de leur ville de Versailles durant
If I Ever Feel Better, les français proposent par la même occasion l'une des scénographies les plus marquantes du week-end. Une prestation impeccable marquée par le crowdsurfing final de Thomas Mars, parvenu à rallier la scène après une incartade en fosse en étant porté par le public depuis la régie son. Après des années de dur labeur, Phoenix sont enfin prophètes en leur pays.
Considérée par beaucoup comme la plus faible de cette édition 2013, cette journée du samedi 24 août aura malgré tout réservé quelques bons moments, notamment de la part de têtes d'affiches (Phoenix, Black Rebel Motorcycle Club, Vitalic, Nine Inch Nails) ayant su assumer leur statut de manière convaincante.