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La Route du Rock

Saint-Malo, du 13 au 16 août 2014

Live-report rédigé par François Freundlich le 3 septembre 2014

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Comme le souligne le documentaire IndieWay filmé lors de l'édition 2013 : « La Route du Rock c'est une famille, c'est un rituel, c'est le passage à La Mecque ». Il y règne un esprit que l'on ne retrouve pas dans les autres festivals. Pour ce troisième jour sous le soleil, l'ambiance se fait joyeuse et optimiste avec des groupes proposant une pop ensoleillée et cajoleuse.

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Mais avant cela, des félins fous sont attendus sur la scène des Remparts. Les Perfect Pussy avaient prévenu qu'ils proposaient un show à chaque fois différent, inattendu, pouvant éventuellement durer vingt minutes compte tenu de la très courte durée des morceaux. Il ne fallait donc pas arriver en retard et en effet nous voilà gâtés au niveau de la surprise. Le quintet américain porte assez bien son nom puisque la jupe très courte de la chanteuse déchainée laisse entrevoir quelques parties bien précises de son anatomie. Entre punk et hardcore, Perfect Pussy nous auront totalement débouché les oreilles en quelques secondes. Meredith Graves braille avec fureur des textes fleuris à peine audibles car masqués par des couches électriques superposées au maximum de leur volume. La demoiselle ne tient pas en place se contractant sur elle-même et concentre curieusement toute l'attention sur elle. Après une trentaine de minutes et une dizaine de chansons, leur concert fût court, très intense et sans protection.

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Le bad-boy si apprécié de ses dames fait son entrée sur la grande scène en se libérant de quelques glaires. Mac DeMarco vient tout juste de se réveiller et s'est paré de son plus beau tshirt à l'effigie des Simpsons, lui servant certainement également de pyjama. L'américain a pourtant l'air déchainé, entamant sur un Salad Days à la folk-pop déviant vers un psychédélisme alléchant, donnant l'envie de remuer la tête derrière ses lunettes de soleil. L'homme à la casquette entonne d'une voix suave ses chansonnettes entrainantes, que l'on reconnaît et retient au premier accord. Le public s'en donne à cœur joie pour un grand moment de béatitude collective, de la groovy Blue Boy à la mélancolique Brother. Mac DeMarco et son groupe sont loin de se prendre au sérieux puisqu'ils reprendront Yellow, le tube de Coldplay, dans l'hilarité générale. Le bassiste se charge des parties vocales reprises par tout le public, pour le vrai moment loufoque du festival, bien devant la fameuse chenille de la veille. Le vrai challenge aurait été d'enchainer sur Viva La Vida et de ne terminer le concert qu'avec des titres de Coldplay mais ce ne sera pas pour cette fois. La très belle Let Her Go sera jouée dans une version accélérée très réussie. Des montgolfières survoleront son concert, avec un Mac DeMarco les saluant la tête levée au ciel. Il terminera sur un crowdsurfing d'excellente facture en faisant le tour de la fosse, tout en empruntant des bières aux festivaliers. Le loufoque Mac DeMarco aura laissé son empreinte sur le fort.

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Les Magnetic Friends prolongent la bonne humeur en plaçant le titre Undone – The Sweater Song de Weezer, repris aussitôt par l'assemblée (voilà une bonne idée de groupe pour l'an prochain). Après le bad boy, le good boy puisque c'est au tour de l'anglais Baxter Dury de faire crier les filles. Le dandy n'est malheureusement plus accompagnée de la belle Madeleine Hart aux chœurs mais entame toujours ses concerts par les entêtantes Isabel et Claire. Ses deux nouvelles choristes et leurs voix juvéniles ne sont pas vraiment à la hauteur mais la voix sucrée et la classe de Baxter font leur effet immédiat. Penché sur son synthétiseur ou allongeant l'épaule face à son microphone, l'homme au costard nous revient en pleine forme après sa prestation mémorable pour l'édition hiver 2012. Les extraits de l'album Happy Soup, ce sommet de la pop des dernières années, résonnent déjà comme des classiques à l'image de l'électronique Leak At The Disco ou la tubesque Trellic. Mais Baxter Dury est venu pour présenter les titres de son prochain album comme le single psychédélique et ensoleillé Palm Trees. L'un de ses premiers tubes Cocaine Man n'est pas oublié, l'occasion pour le groupe de s'exciter sur la fin du concert. La géniale The Sun sera offerte en rappel d'un concert qui collait parfaitement à l'ambiance bucolique de ce samedi.

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La petite scène se prépare déjà à accueillir un groupe échappé de Brighton qui fait beaucoup parler de lui : TOY. Les chevelus vont proposer un son bien plus crade que sur les versions studio, jouant avant tout des morceaux de leur dernier album Join The Dots. Les groupes performant sur cette scène des Remparts sont décidément déchainés et ce n'est pas fini puisque la soirée va prendre une tournure plus excitée. Des nappes de synthés déviantes se mêlent aux amas de guitares psychédéliques et tournoyantes pour un rock cérébral et miasmatique à la fois. Entre introduction de morceaux infinis et instrumentaux à rallonge, la voix vindicative de Tom Dougall (dont on a vu la sœur à La Route du Rock 2006 avec The Pipettes) mastique des lyrics désarticulés. La longueur des morceaux n'a d'égal que celle des cheveux du bassiste que nous recroiserons dans la soirée en sosie de Towelly. On obtient au final le concert le plus perché du festival avec un groupe qui sait jouer avec le feu.

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Toujours psychédélique mais bien plus conventionnels, d'autres anglais font leur entrée dans le temple du rock indépendant : Temples. Dans la foulée du concert de Tame Impala lors de la précédente édition, le rock psychédélique teinté de refrains pop héroïques du quatuor de Kettering semble pourtant davantage plaire à des groupies venues en nombre. Il faut dire que la chevelure parfaite de James Edward Bagshaw, sosie de Jim Morrison à la voix suave et juvénile, a tout pour plaire. La différence tient également au fait qu'une légère dose de pop de stade à la Kasabian a été injectée dans certains titres comme A Question Isn't Answered et ses clappements de mains. Les riff distordus, planants et hallucinogènes s'enchainent : on semble assister à un trip Floydien intégral de claviers spatiaux et instrumentaux divagants. Si leurs compositions entêtantes tiennent la route, Temples n'ont certainement pas inventé la corde de guitare à couper le beurre. Leur prestation s'écoule sur une même ligne horizontale sans jamais vraiment décoller jusqu'au fameux single final Shelter Song. Le tapis aurait pu s'envoler plus haut, surtout après les prestations mémorables qui ont précédé.

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On va s'exciter pour terminer en beauté avec tout d'abord les Parisiens de Cheveu. Le trio électro-punk balance des assauts électriques incisifs et ultra-rapides. Les idées ébouriffées foisonnent et Cheveu semblent changer de direction toutes les trente secondes pour ne jamais nous laisser reconnaître un morceau. On pense un peu aux Pixies pour cette faculté à coincer des sonorités bizarroïdes répétées tout en braillant des textes incompréhensibles trompant son monde. Les synthés s'ébrouent, la noise se disperse, la voix du diable grogne et les stroboscopes terminent de nous désorienter. Au prochain concert de Cheveu, on prévoira un GPS puisqu'à ce stade, on ne fait plus que suivre la lumière et les bières.

Heureusement, Jamie XX est là pour nous calmer un peu. Deux ans après son passage avec The XX, le producteur va répandre une ambiance minimaliste et délicate de beats structurés et puissants. Ses productions sont bien plus cérébrales même si leurs accélérations permettent de laisser s'exprimer la danse. On reconnaîtra avec joie quelques remixes de The XX, avec notamment Sunset et ses basses sourdes. La voix de Romy Madley Croft refait son apparition dans le fort : on ferme les yeux pour mieux profiter.
Dans la lignée de cette nuit électronique, le Norvégien Todd Terje est chargé de clôturer le festival en beauté. Le DJ va insuffler une dose de fun dans la nuit du fort avec ses beats discoïdes à mi-chemin entre une house glacée addictive et les Bee-Gees dont leur You Should Be Dancing sera allègrement samplé. Le tube Inspector Nurse réchauffe les corps qui en ont grand besoin. Ajoutez un peu d'auto-dérision avec ce remix de WhItney Houston - I Wanna Dance With Somebody et la Route du Rock s'achève dans la bonne humeur. Avec plus de 26 000 entrées payantes, la Route du Rock 2014 a largement réussi son pari en s'approchant de ses records passés. Nous retiendrons la fabuleuse prestation de Portishead mais aussi de très bons moments passés avec Slowdive, Mac DeMarco, Baxter Dury, The War On Drugs ou encore Metz. Pop is alive and kicking !
artistes
    Baxter Dury
    Cheveu
    Jamie XX
    Mac DeMarco
    Magnetic Friends
    Pegase
    Perfect Pussy
    Temples
    Todd Terje
    TOY
photos du festival