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Mick Jones & The Justice Tonight Band
The Stone Roses

Lyon, Nuits de Fourvière - 25 juin 2012

Live-report par Olivier Kalousdian

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Quatre-cent cinquante kilomètres de rails, une ligne de métro puis un kilomètre de côte digne des meilleures ascensions du Tour de France : nous voilà parvenus sur le mont Olympe du rock de ce lundi 25 juin 2012, la colline de Fourvières à Lyon où ont lieu, tous les ans, Les Nuits de Fourvières, étalées sur plus de deux mois.

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Un espace de verdure qui surplombe tout Lyon et sa périphérie abritant un théâtre Romain, reconstruit pierre après pierre. Des hôtesses et hôtes sur leur 31 et distribuant des coussins pour s'assoir plus confortablement, un bar à bières et quelques centaines d'Anglais surexcités ; ça y est, nous y sommes. Nous allons assister à la reformation du groupe qui a initié toute la britpop Anglaise dans les années 90. Le groupe qui, avec deux albums seulement, intégrant plusieurs hits internationaux et intemporels, a inspiré des frères Gallagher aux non moins faux frères, Damon Albarn et Graham Coxon. Un des deux champions du Madchester original, une supernova du rock : The Stone Roses !
Nulle surprise, donc, que la moyenne d'age de ce soir soit aux alentours de trente-cinq ans. Il y a des plus jeunes et des bien plus vieux aussi. Mais ça, c'était avant la dose de sérum anti-âge distillé ce soir.

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Tenue réglementaire, tee-shirt à l'effigie d'un groupe que l'on vénère (ou non), les regards masculins se croisent au niveau du torse, parité oblige, et chacun pèse le poids du groupe qu'il porte, imprimé. Qui a fait le meilleur choix ? Qui arbore le tee-shirt introuvable ou ressorti du fond des âges ? Celui de The Beatles, Happy Mondays ou The Stone Roses, tout juste acheté au merchandising et, au loin, un original arborant un portrait de Joe Strummer sur son torse... Les quadras du rock sont de sortie, et pas que dans le public.
Car, ce soir, Ian Brown et sa bande ont eu la bonne idée d'inviter Mick Jones, excusez du peu, avec des comparses aussi hétéroclites qu'un soir de victoire des bleus sur les Champs Élysée : Peter Hooton, de The Farm, originaire de Liverpool et fan de football au point qu'il ait écrit un livre sur le sujet, Pete Wylie, de Wah!, créateur du courant Rockism qui puise son énergie du coté des punks purs et durs. Un roadie des Stone Roses et quelques têtes connues mais pas encore identifiées forment également le plus large groupe de rock au monde avec dix membres dont deux choristes et pas moins de cinq guitaristes jouant simultanément. Ajoutons à cela deux invités aussi surprenants qu'inattendus, Rachid Taha et Eric Cantona, pour interpréter respectivement Rock The Casbah et Should I Stay Or Should I Go, et nous voilà devant ce qui s'apparente au lancement du Hard Rock Café Lyon. Ne manque plus que Bruce Willis.

Après avoir écumé, parfois en obligeant Joe Strummer à se retourner dans sa tombe, six titres du répertoire des Clash et autres raretés, le non groupe de Mick Jones cède sa place au quatuor de Manchester, sous une fine pluie qui inquiétera, par intermittence le public Lyonnais, mais pas les Anglais. Ian Brown, John Squire, Gary « Mani » Mounfield et Alan « Reni » Wren reçoivent à leur arrivée une ovation d'un public, souvent bien éduqué mais heureusement animé par de nombreux Anglais occupant les premières lignes de la bataille. Artillant, d'entrée, la foule à coup de gros calibres, Ian Brown, de son regard impassible et de ses traits coupés à la serpe, la quarantaine largement entamée, lance le concert avec le hit I Wanna Be Adored qui semble, pour la plupart, ressurgir de leur adolescence et de leurs soirées les plus mémorables.
Une basse lourde dont la lenteur funky donne à apprécier chaque note qui forme en soi déjà une mélodie, une batterie à double grosse caisse qui encaisse des titres de plus de dix minutes et une guitare capable de changer de sons et de mélodies plusieurs fois par morceaux, accompagnent le leader charismatique, boxeur de scène, chanteur monocorde et joueur de cymbales en lignes. Ian Brown n'a pas pris une ride.

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D'abord nonchalant et inquiétant, Ian Brown change progressivement d'attitude au cours du set. Sec comme une badine, coupe au bol rapiécée et tête de bagarreur aux faux airs d'un Liam Gallagher, Ian est précieux et avare dans ses pas de danse et sa gestuelle. Il joue des pas millimétrés et répétitifs, à la limite d'un Chas du groupe Madness. Des petits coups d'épaule, secs, remontent de son cou, tels des tics de nervosité, bien connus des Français dans les dernières années.

Certaines mauvaises langues diront que sa gestuelle lui sert, lui aussi, à masquer son stress lié à quelques manques de textes et de voix. Des paroles simples et parfois rares et une voix distillée, voire rationnée, en ce deuxième mandat, il est vrai. Mais les Stone Roses n'en ont guère besoin, autrement que pour faire chanter en chœur les festivaliers de ce soir sur les refrains de This Is The One ou She Bangs The Drums. Ian Brown est avant tout un chef de clan, un chef d'orchestre, un parrain du milieu de la scène... Sans lui, pas de Stone Roses, et sans le groupe, pas de Ian Brown.
Ce que les Stone Roses ont inventé, avec les Happy Mondays, au-delà de la britpop, c'est le rock des classes moyennes ou populaires qui n'avaient, jusque là, que peu de goût et peu de référence à cette musique. Ce mouvement leur évite d'en avoir. Dans des tenues parfois proches de celles des supporters de football, ce soir encore, Ian et son pantalon de mauvais goût ou Reni et son maillot de l'équipe du Brésil, prouvent que le rock n'a pas toujours à revêtir son costume de cuir et ses baguouzes. C'est une musique souvent écoutée sous acide ou MDMA, arrosée de bière et des concerts qui ressemblaient parfois à de vraies rave parties, dont elle est à l'origine.

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Jurant avec un public trop sage, les premiers rangs essaient d'en découdre entre eux sous les remontrances sévères de videurs qui n'ont pas l'air d'avoir les consignes les plus laxistes des festivals français. Le crowd surfing passe mal à Fourvières !
Pour leur retour, The Stone Roses nous gratifient d'un set de plus d'une heure cinquante, dix-neuf titres et l'intégralité de leur premier album éponyme. Ils donnent aux Nuits de Fourvières une raison de ne pas regretter leur très lourd cachet. Débuté sur I Wanna Be Adored, agrémenté d'un Fool's Gold anthologique de plus de treize minutes et achevé sur un I Am The Resurection ponctué d'une bataille de coussins Lyonnais fusant de toutes parts, le set de ce soir ne peut assumer aucun rappel.

Avec compréhension, il n'en sera pas demandé et, devant ces quatre là qui s'enlacent et ont l'air si ébahis et tellement heureux d'avoir réussi un tel come back sans même proposer une quelconque actualité, on se dit que Lyon et l'organisation des Nuits auront, ce soir, surclassé pas mal de villes festivalières en cet été de vaches maigres pour le rock.
setlist
    MICK JONES AND THE JUSTICE TONIGHT BAND
    Non disponible

    THE STONE ROSES
    I Wanna Be Adored
    Mersey Paradise
    (Song for My) Sugar Spun Sister
    Sally Cinnamon
    Where Angels Play
    Shoot You Down
    Bye Bye Badman
    Ten Storey Love Song
    Standing Here
    Fools Gold
    Something's Burning
    Waterfall
    Don't Stop
    Love Spreads
    Made Of Stone
    This Is the One
    She Bangs The Drums
    Elizabeth My Dear
    I Am The Resurrection
photos du concert
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