Quatre ans après sa venue à la Cité de la Musique dans le cadre du Days Off Festival, Anna Calvi refaisait escale à Paris en cette mi-juin, cette fois à la Gaîté Lyrique. Affichant complet depuis de nombreuses semaines, l'artiste anglaise profite de cette tournée pour révéler la quasi-totalité de son futur troisième album
Hunter, à paraître le 31 août, soit une poignée de jours après son futur passage à Rock en Seine.
Arrivant lentement sur la scène de La Gaîté Lyriques sous les clameurs du public, Anna Calvi, armée de sa guitare, démontre toute l'étendue de son talent en l'espace de deux compositions extraites de
Hunter. Elle débute tout d'abord avec
Away, une plage posée où l'on retrouve sa voix mi-angélique mi-écorchée vive, avant d'enchaîner sur
Indies Or Paradise, un long brûlot rock poisseux et énervé durant lequel elle ne fait qu'un avec son instrument, criard, dissonant, hystérique.
Elle poursuit aussitôt sur la chanson-titre, autre joyau rock intense et électrisant sur lequel elle monte dans les aigus comme jamais elle n'a pu le faire auparavant, puis sur l'incendiaire single
Don't Beat The Girl Out Of My Boy dévoilé il y a une dizaine de jours qui se clôture par une Anna Calvi qui jette sa guitare et se met à pousser de longs cris démoniaques enflammés au milieu de la salle bondée, acclamés comme il se doit par l'audience.

On se retrouve ensuite en terrain connu le temps de quelques morceaux, dont la tendre
Suzanne & I et un
I'll Be Your Man qui fait parler l'électricité et sur lequel la chanteuse donne de la voix sur un refrain toujours aussi puissant et sexy. S'ensuit une nouvelle composition,
Alpha, au riff déjà mythique et portée par les coups de batterie invulnérable de Alex Thomas, le tout aboutissant à un refrain Yeah Yeah Yeahs-que, jubilatoire et sous tension. L'anglaise finit de malmener sa guitare à genoux avant de se relever et l'achever à coup de chaussures à talon, victorieuse, en femme fatale du rock moderne.
Alternant sauvagerie insensée et intimité vibrante, c'est donc tout naturellement qu'Anna Calvi continue sur le somptueux
No More Words, debout en plein milieu de la salle de la Gaîté Lyrique, à la mélancolie profondément poignante et dont ce « shhh » susurré avec un sourire en coin suite à un sifflement restera dans les mémoires tant il est rare de la voir autrement que d'apparence sévère et inaccessible au cours de ses prestations – et même entre, un simple « merci » de sa part suscitant généralement l'engouement !
Plus loin, des morceaux tels que
Chain et
Wish semblent déjà connus, écoutés et digérés depuis des années. Contrairement à l'ensemble de
One Breath qui était plus long à appréhender, les plages de ce
Hunter frappent sur l'instant, plus heavy, plus bruts, plus rock'n'roll. A voir si elles dureront sur la longueur, mais leur impact en live est réel et galvanisant; il n'y a qu'à voir pour s'en rendre compte les hurlements répétés et pénétrants de « chain me » ou encore la prestation possédée de l'artiste sur
Wish.

Après une courte absence durant laquelle les applaudissements ne cesseront pas, Anna Calvi revient pour un rappel comprenant bien évidemment d'anciennes compositions, à savoir l'enchaînement organique de l'envoûtante
Sing To Me et d'une
Love Won't Be Leaving au pont instrumental vertigineux. Elle conclut enfin sa performance sur sa fameuse reprise frénétique du
Ghost Rider de Suicide face à laquelle il est difficile de ne pas se déhancher tout du long.
Ce ne sont ainsi donc pas les nouveaux morceaux qui affaibliront la performance scénique d'Anna Calvi, bien au contraire. Alors même que plus de la moitié du show comprend des chansons d'un album pas encore sorti et dont on a pour le moment entendu qu'un seul single, l'artiste anglaise réussit à convaincre sans mal, mettant le feu à une Gaîté Lyrique entièrement sous le charme.
On ne sortait pas ce soir-là de la salle en regrettant qu'Anna Calvi n'ait pas interprété telle ou telle chanson préférée, on en sortait convaincu qu'elle allait clairement sortir un troisième opus tout aussi parfait que ses prédécesseurs – si ce n'est mieux encore.