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La Route du Rock

Saint-Malo, du 11 au 20 février 2011

Live-report rédigé par François Freundlich le 21 février 2011

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L’Omnibus de Saint-Malo nous accueille pour une Route du Rock Collection Hiver qui promet moult péripéties. Ce vendredi sera une nuit américaine puisque cinq groupes venus du pays de ce bon vieil oncle Sam vont se succéder pour notre plus grand plaisir.

 

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Après l’annulation de Junip, c’est le duo du Maryland Wye Oak qui est chargé d’ouvrir la soirée. Et comme on en aurait presque pris l’habitude maintenant, le premier groupe en découverte fait toujours mouche à la Route du Rock. On nous prédisait un folk rassurant pour débuter, on se retrouve avec un déchainement de guitares cradingues sur fond de batterie nerveuse. Jenn Wasner, à qui l'on a visiblement prêté une guitare qui sonne plus fort que son habituelle, ne se prive pas pour s’exciter sur son instrument. Andy Stack n’en fait pas moins derrière les fûts et ces deux-là déversent leur son comme s’ils étaient quatre.
Néanmoins, un savant dosage entre tension et subtilité est apporté à chaque composition. On a subitement l’impression d’assister à une prestation des Black Keys mais avec une voix éminine chaude et sombre qui pourrait rappeler Victoria Legrand de Beach House (qui a du laisser quelque chose dans ces lieux depuis l’an dernier). La comparaison s’arrête ici puisque le son appartient bien à Wye Oak... et quel son ! D’un folk électrique bercé par l’intensité vocale de Jenn, on bascule dans des riffs tonitruants beaucoup plus lourds. Sans rien en attendre, le duo signe l’une des prestations les plus marquantes de la soirée. Nous voilà bien contents de la découverte.

 

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On traverse les États-Unis direction Portland avec le quatuor de multi-instrumentistes Tu Fawning. La chanteuse, guitariste et batteuse Corrina Repp est accompagnée de Joe Haege (Menomena, 31 Knots) qui prendra également place derrière les fûts ou à la guitare. Le groupe propose une pop électrique délicieusement rétro grâce à une claviériste ajoutant des accents cabaret sur des guitares résolument rock. Le tout est complété par un percussionniste n’hésitant pas à sortir le trombone à coulisse ou à venir faire raisonner sa trompette géante à l’avant de la scène tout en apportant une variété assez précise et originale aux arrangements.
Certains passages ne sont pas sans rappeler Arcade Fire lorsque les quatre musiciens mélangent leurs voix en chœur et que les cuivres, le violon et les percussions se font entendre. L’impression générale est néanmoins assez différente puisque le coté vintage de début de 20ème siècle est présent par de petites touches sur chaque composition, ce que l'on ressent également nettement dans la voix de Corrina. Les quatre membres se complètent parfaitement et la magie opère lorsque les voix raisonnent a capella, uniquement mélangées au son de leurs tambourins respectifs.
Ils n’hésitent pas à changer d’instrument entre chaque chanson, Corrina allant même jusqu’à chanter en jouant de la batterie sur Sad Story tout en gardant le même cachet dans sa voix à la fois enjouée et mélancolique. Un final où le tambour s’ajoute aux claves et à l’agogo avec toujours ce fond de guitares rock pour une prestation qui emporte l’auditeur et ne le lâche plus jusqu’à la fin. Le type même de concerts où l'on en veut toujours plus tant l'envie de rester dans leur monde si atypique est forte. Tu Fawning nous aura transporté ce soir.

 

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Après deux concerts en forme de montée en puissance, on attend Dean Wareham de pied ferme. Déjà aperçu au festival Art Rock l’an dernier pour son projet hommage à Andy Warhol, Dean Wareham revient cette fois aux sources de sa musique en interprétant les titres de son premier groupe : Galaxie 500. Le New-Yorkais est accompagné par sa femme et ancienne bassiste de son autre groupe Luna, Britta Phillips, ainsi que d’un batteur.
La voix aigüe et sibylline de Dean a gagné en profondeur depuis la séparation du groupe en 1991 et les fans ravis d’entendre les classiques d’un groupe précurseur l’ont bien compris. L’ambiance est beaucoup plus calme et dépouillée que celle des sets précédents puisque les chansons sont interprétées dans leur plus simple appareil pop. Dans la lignée de Lou Reed ou Alex Chilton et sa Big Star, on retrouve une certaine tradition de composition rock américaine et certains morceaux raisonnent à l’oreille comme des classiques immédiats.
On replonge dans la base, sans artifice et ça fait parfois du bien. D’un Blue Thunder aux relents de Walk On The Wild Side à un Tugboat tout en mélancolie, Dean n’a pas pris de Tranxene 200 et pousse sa voix jusqu’à des hauteurs insoupçonnées. On signalera une reprise toute en douceur de The Snow Is Falling de Yoko Ono bercée par la voix de Britta. Ce concert restera comme une pause nostalgique dans une soirée de défoulement entre souvenir pour les plus vieux et découverte pour ceux qui attendaient Cold War Kids.

 

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La tête d’affiche de la soirée est bien le quatuor californien pour une deuxième traversée des États-Unis d'est en ouest en l'espace de quatre heures... tout en restant en Bretagne. Cold War Kids semblent ravis d’être de retour après une prestation au Fort de Saint-Père à l’été 2008. Le public leur est fidèle puisqu’une majorité répond présent à la question de savoir qui était à ce premier concert.
Les Cold War Kids, quand à eux, ont un peu changé. L’accent est mis ce soir sur les nouvelles compositions et on s’en trouve un peu dérouté en ne reconnaissant que très peu leurs deux premiers albums. Ce qui marque de prime abord : le clavier. Il était la marque de fabrique et une base importante du groupe, il est ici relégué au second plan, voire complètement abandonné. La voix et le son sont quand à eux beaucoup plus lisses et se rapprochent plus d’une pop FM en comparaison avec des anciens titres plus écorchés. Hang Me Up To Dry fait toujours mouche dans son immédiateté alors que sur We Used To Vacation constitue l’une des rares apparitions de Nathan Willett au piano dont il semble parfois vouloir se libérer rapidement.
On ne pensait pas un jour vouloir faire la comparaison avec The Killers mais force est de constater que sur certains nouveaux titres à l'image de Flying Upside Down, laquelle reste néanmoins très entrainante, on semble s’en rapprocher. Très concentrés sur leurs instruments, les Cold War Kids font tout de même le boulot et font remuer joyeusement l’assemblée. Une certaine déception aura néanmoins marqué les esprits. On est frustré d’avoir perdu un peu du groupe qui avait enflammé la Route du Rock en 2008 avec Something Is Not Right With Me, qui ne sera même pas interprétée cette fois-ci. La route vers le succès leur est peut-être ouverte, mais les anciens fans suivront-ils ?

 

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Pour terminer la soirée dans un Omnibus qui s’est bien vidé, c’est Disappears de Chigago qui investit la scène. L’attraction est bien entendu derrière les fûts puisque c’est Steve Shelley, le batteur de Sonic Youth, qui officie avec le groupe. Cette batterie est résolument mise en avant pour apporter un son punk avec un Shelley impressionnant de force, de rapidité et de maîtrise. Le groupe se repose sur ce métronome car à l’avant, de la scène, on a un peu plus de mal. La bouillie sonore des guitares se mélange à un chant criard assez faux. Les compositions se ressemblent toutes beaucoup et la curieuse impression d’avoir fait le tour du groupe après deux chansons se ressent. Au moins aura-t-on pris une leçon de batterie.

Cette première soirée à l’Omnibus fût très positive pour une Route du Rock qui fait toujours salle comble mais sans trop entasser le public, ce qui permet un grand confort dans toute l’enceinte du festival. On retiendra de très bonnes prestations de Wye Oak et Tu Fawning qui ont surpris tout le monde. Les Cold War Kids étaient un peu en deçà de ce qu’on leur connaissait, tandis que Dean Wareham a réussi le pont entre les générations. Ironie du sort, nous repartons en traversant le parking couvert de boue comme pour nous rappeler que nous sommes bien à la Route du Rock. A demain pour une soirée qui promet énormément...
artistes
    Magnetic Friends
    Wye Oak
    Tu Fawning
    Dean Wareham plays Galaxie 500
    Cold War Kids
    Disappears