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La Route du Rock

Saint-Malo, du 15 au 19 février 2012

Live-report rédigé par François Freundlich le 22 février 2012

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Après le hors d’œuvre de mercredi, la 7ème Route du Rock Collection Hiver débute réellement avec ce premier soir à l’Omnibus de Saint-Malo. La programmation de ce vendredi s’annonce toute en électricité, comme un crescendo dans un rock de plus en plus incisif. Il n’y a pas de round d’observation lorsque Gauntlet Hair lance les hostilités.

Le duo de Denver s’installe en silence, arborant un look à la mode chez la jeunesse branchée et moustachue. Andy R., leader du groupe, couvre d’une guitare abrasive des rythmes électro house prolongés par une batterie puissante. Il déploie une voix criarde très (trop) saturée, prolongée par un effet de reverb également présent sur sa guitare. Le trop plein d’effet a pour conséquence une voix monocorde et se ressemblant sur toutes les chansons, alors qu’elle possède un potentiel puissant et varié.
Passé la découverte, Gauntlet Hair semblent se cacher derrière une boite à rythmes ou des effets bien trop mis en avant, afin de supprimer toute possibilité de comprendre vraiment leur musique. Cette guitare claire alliée à une voix puissante et des rythmes marqués fait parfois penser à WU LYF, mais dans une version house tournée vers un shoegaze brouillon. On a beau tenter d’entrer dans certaines mélodies prometteuses, la voix bien trop présente freine le plaisir, lorsque les chansons ne sont elles mêmes pas coupées par des problèmes techniques. Les Coloradiens décident au final de stopper leur concert après moins de trente minutes pour cause de dysfonctionnements. Les conditions n’étaient certes pas idéales mais ce premier concert ne restera pas dans les mémoires.

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Suite à l’annulation de New Build, les programmateurs ont fait appel aux normands de Kim Novak pour les remplacer au pied levé. On a tendance à croire que c’est un coup dur que de devoir remplacer un groupe international par une formation française, Kim Novak va nous prouver le contraire. En effet dès la première chanson, on est immédiatement persuadé que les protégés de Kütu Folk Records (décidément très en vue) ont pleinement leur place dans cette programmation 2012. Lorsque les Caennais débarquent, on entend aussi bien New York que la Californie dans leur son résolument tourné vers la pop américaine des années 2000. Guitares sautillantes à la Vampire Weekend, influences surf Beach Boys et voix profonde à la Interpol, le quatuor nous embarque dans des ritournelles dansantes et lumineuses.
Kim Novak possèdent en eux la fraicheur de la jeunesse alliée à l’évidence de compositions immédiates. Si le chanteur Jérémie n’avait pas lancé un « Salut Saint-Malo » un peu essoufflé, on aurait pu penser avoir une formation internationale expérimentée en face de nous. Sont-il appelés à avoir autant de succès que leurs ainés Phoenix en portant la french pop outre-Atlantique ? Leur tube laid-back Merry-Go-Round plaide en leur faveur. On ne les attendait pas à ce niveau mais Kim Novak étaient plus qu’un bouche-trou ce soir, signant l’une des meilleures performances du festival. On en ressort conquis et le sourire aux lèvres.

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La soirée est lancée alors qu’un groupe très attendu s’avance sur la scène de l’Omnibus : les américains de Caveman. Le quintet arrive tout droit de Brooklyn et va déployer sur la Route du Rock une pop synthétique et rythmée teintée de psychédélisme. Des nappes de claviers tourbillonnantes déraillent le son de ces jeunes hommes des cavernes plutôt modernes. Matthew Iwanusa fait entendre une voix limpide et attachante alors qu’il marque un rythme supplémentaire à celui de la batterie en frappant sur son tambour. On préférera néanmoins lorsqu’il le délaisse pour se saisir d’une guitare, marquant un virage plus électrique dans la performance du groupe.
Les compositions gagnent alors en profondeur en laissant de coté le rythme doublé trop marqué, faisant ainsi plus de place au synthé. L’influence folk est mise en avant sur des morceaux plus calmes ou les voix des deux chanteurs se complètent à l’unisson. On pense notamment à la sortie de Local Natives sur cette même scène lorsque des percussions plus marqués, maître mot du groupe, refont leur apparition comme sur A Country's King Of Dreams. Le moment phare du concert sera atteint pendant l’excellente Thankful, durant laquelle une parfaite cohérence est trouvée entre des guitares aériennes et un synthé rêveur, prolongés sur une fin de morceau allant du transcendantal au bruitiste.
Toujours en crescendo en enchainant des montées de batterie, des solos de guitare ou en cherchant des aiguës vocaux enchanteurs, Caveman s’affirme comme le groupe qui aura su créer une atmosphère particulière de perfection musicale dans cette soirée. Ils terminent dans un chaos bruitiste avant un rappel qui leur fait autant plaisir à eux qu’au public admiratif. les New Yorkais ont marqué de leur empreinte ce vendredi de la Route du Rock. Il sera ensuite bien difficile de leur succéder.

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Cette tâche incombe aux anglais de S.C.U.M, venus présenter un premier album remarqué. La première chose que l’on constate est leur apparente jeunesse ainsi que leur look androgyne. L’entrée en matière ne convainc pas vraiment tant leur son est brouillon : les membres du quintet donnent l’impression de jouer chacun dans leur coin sans réelle cohérence. Les deux claviéristes à la structure capillaire étrange semblent être sur une autre scène, voir une autre planète alors que le leader Thomas Cohen adopte l’attitude du chanteur à minette à la danse titubante.
Son chant de Brian Molko sous Vicodine, qui aurait décidé de chanter toujours la même chose sur un ton monocorde, est forcément pénible sur la durée. La frêle batteuse Melissa Rigby vit dans un rêve et se distingue en frappant sur ses fûts avec toute sa hargne. on espère néanmoins qu’elle ne fasse pas de syncope tant elle a l’air pâle. En effet, les S.C.U.M. ne respirent pas à proprement parler la joie de vivre : on est même plutôt soulagés que des cordes ne pendent pas des plafonds de l’Omnibus, sans quoi ils risqueraient de s’en servir. Ils avaient annoncé une annulation de leur tournée sur les réseaux sociaux, on en vient du coup à se demander s'ils n'auraient pas choisi de jouer malgré de multiples décès de proches...
Leurs synthés auraient besoin d’un bon coup de Ventoline là ou ceux de Caveman étaient si resplendissants. On ne rentrera jamais vraiment dans la bouillie sonore qu’ils nous servent, malgré un album proposant de bons moments. Le live est à retravailler pour S.C.U.M, on passe notre tour pour cette fois.

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La soirée se termine avec un dernier groupe de rock, un vrai, pour les hommes qui transpirent la bière de tous leurs poils : The Men. Dès les premiers instants, ça déménage clairement, les américains ont décidé de nettoyer la poussière laissée sur nos tympans par le groupe précédent. Ils jouent le plus fort possible, laissant exploser leurs riffs et solos de guitare sur les assauts d’un batteur punk ultra rapide (et en short). Leur tube ravageur Bataille est joué en seconde position dans une version survitaminée.
Si l'on parvient à remuer la tête sur la version studio, on risque le torticolis en tentant de les suivre ici alors que la guitare hard rock triangulaire est mise à rude épreuve. La blonde bassiste se déhanche telle une beauté du diable dans cette fureur rock’n’roll, empoignant les survivants de l’Omnibus restés jusqu’au bout. Le « Hello ? » interrogatif du chanteur, répété régulièrement entre deux titres, deviendra le gimmick pour le reste de cette Route du Rock. Il devait certainement se demander pourquoi personne ne pogotait. On aurait bien aimé un peu de subtilité ou de féminité, mais The Men ne savent qu’envoyer du bois, et ils le font bien.

C’est sur cet instant Gilette Fusion Mach 3 que s’achève cette première soirée de Route du Rock. Sans les enchainements de prestations exceptionnelles connus par le passé, on retiendra Caveman qui nous a emporté. Les frenchy de Kim Novak ont constitué la belle surprise du jour alors que les trois autres concerts sont restés en demi-teinte, voire pire pour S.C.U.M. La fin du week-end s’annonce néanmoins réussie avec un samedi pop et un dimanche classieux.

Merci à Renphotographie (renphotographie.piwigo.com) pour les visuels utilisés dans cet article.
artistes
    Gauntlet Hair
    Kim Novak
    Caveman
    S.C.U.M
    The Men