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La Route du Rock

Saint-Malo, du 14 au 16 août 2008

Live-report rédigé par Jean-Christophe Gé le 16 août 2008

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L’arrivée à cette dix-huitième route du rock s’est faite comme pour les oiseaux de mauvais augure, et les salariés zélés de Météo France l’avaient prévue : sous la pluie. Elle a démarré très précisément à 18h30, avec un certain retard sur l’horaire annoncé par les personnes sus-mentionnées. C’est d’ailleurs bien la seule chose en retard à la Route du Rock dont l’organisation tourne comme une belle montre suisse. Ce timing correspondait en revanche parfaitement avec l’ouverture du fort : la pluie avait décidé de faire partie des festivaliers. La Route du Rock, on n'y va pas pour prendre un coup de soleil, mais pour profiter de sa programmation pointue et accessible dans une ambiance bon enfant, protégé du monde extérieur dans un fort avec douves et grosses pierres.

Musicalement, c'est un faux groupe folk qui entame les hostilités. The War On drugs nous rappellent que les chemises à carreaux ont été remise à la mode par Kurt Cobain et qu’il ne faut pas se fier à leur look de campagnards américains. Si le début de leur set nous fournit une folk US comme il y en a beaucoup en ce moment, celle-ci se transforme très rapidement au fil de morceaux plus noisy. Les guitares se dégradent et apparaît une boite à rythmes glaciale : on quitte la campagne pour New York où Suicide rencontre Sonic Youth. De New York il n'y aura en fait aucun groupe dans le fort alors que la moitié de la programmation est américaine. Encore un tour de force des programmateurs. Le concert se termine dans une semi-improvisation post-rock pour un public enthousiaste, à la grande surprise du groupe qui n’attendait pas cet accueil, donnant du « Guys you are party animals » entre presque tous les titres.

Après cette excellente mise en bouche, première pause exploration du fort. Alors que l’intermède touche à sa fin, petage de plombs ! Plus d’électricité dans le fort. La coupure ne dure qu’une minute et fort heureusement ce sera le seul incident électrique de la soirée. Il en faut plus pour retarder The Dø qui arrive avec deux stands couverts de synthés vintages et tout un tas de casseroles et outils suspendus au-dessus de la batterie. La chanteuse arbore un joli petit chapeau, un maquillage sophistiqué et une tenue soignée. L’interaction avec le public est excellente, et, là encore, cela dépasse l’attente du groupe. Olivia lève les bras en l’air et fait vibrer ses mains, à sa surprise le public suit, autant dire qu’elle va en jouer. Dan est également à fond, sautant partout avec sa basse. Après un On My Shoulders d'anthologie, la fosse est tout sourire. The Dø n’est pas le groupe d’un morceau. Si le reste de son répertoire n’a pas cette puissance, il y a de la musique et des histoires dans leurs chansons, et probablement d’autres albums qui les mèneront dans la cour de grands très occupée par des groupes Anglais.

Quand on parle des Anglais, ils ne sont jamais très loin. C’est la tête au sec qu’arrivent les Tindersticks. Point d’orage ou de déluge, cette première journée sera finalement clémente... les Bretons ont peut-être raison avec leurs histoires de micro-climats ou de marées. C’était bien la peine de prendre mes grosses chaussures qui me torturent les pieds.

Mais revenons en aux costumes et à la classe du grand groupe qui arrive sur scène. Ils sont douze, avec section à cordes et cuivres comme lors de leur tournée pour leur très bon The Hungry Saw. Contrairement à la précédente tournée, les anciens titres ont plus leur place dans la setlist, car ce soir le groupe n’est pas là pour faire sa promo. Il n’y a pas non plus de merchandising. A croire que les Tindersticks ne sont venus que pour le plaisir de rejouer à La Route du Rock, un des rares festivals qu’ils apprécient aussi en tant que spectateurs. Cette appréciation est mutuelle, même si une partie du fort est un peu déconcertée par cette musique très arrangée et moins rock. Qu’auraient-ils pensé les années où la route virait électronique ? Au bout de vingt minutes de set, le groupe quitte la scène pour résoudre un problème technique. Quand il revient, la voix de Stuart s’entend mieux et le set reprend toute son intensité. Parmi les pépites de leur show, une version avec chœur de Boobar. Dans cette orchestration plus large très rétro le morceau prend une nouvelle intensité et je comprends enfin pourquoi le groupe l'a choisi comme prochain single.

Les Breeders sont manifestement les plus attendus du festival. Même efficacité que les Pixies, deux à trois minutes par morceau, tous enchainés très vite sans le temps de dire ouf, et même (absence de) jeu de scène. Mais voilà longtemps que je n’avais pas vu un groupe aussi figé, ce qui tranche avec les autres groupes de rock à filles qui généralement aiment danser et prendre des poses sexy. Ici, c’est plutôt un groupe de garçons manqués qui, malgré une joie certaine, ne dansent pas. Le point d’orgue du concert est bien sûr Cannonball, un morceaux bien classé dans le palmarès des tubes indés des années 90, pas loin derrière ceux de Nirvana. Mais moi, au nirvana, je n’y suis pas du tout, et cette prestation, bien qu’enjouée, ne me fait pas grand chose.

Ce sera tout le contraire pour les autres américains de Cold War Kids. Ils rallument la flamme qu’avait fait jaillir The National ici l'année dernière ou Swell il y a dix ans. Leur rock imprégné de country a quelque chose à raconter et le chanteur se déhanche comme un asticot géant. Dit comme cela, ce n’est pas forcément très vendeur, mais il faut le voir pour le croire. Leur prestation est bien supérieure à celle qu’ils avaient donné à Rock en Seine, l’intimité du fort de Saint-Père et la nuit noire leur conviennent mieux. Leur premier album contient plusieurs tubes en puissance, et celui à venir semble du même niveau à en juger par le Something Is Not Right With Me très convaincant avec ses paroles très sobres : « something is not right with me » répété en boucle par le trio. A les voir hurler comme ça, il est clair que quelque chose ne tourne pas rond pour eux.

Il est très tard quand les Foals montent sur scène, pas loin de trois heures du matin. Même si j’avais très envie de les voir, même si leurs morceaux sont encore plus dansants en live, même s’ils nous remercient d’être resté éveillé pour eux, je n’en peux plus et je remonte jouer à Dude, where's my car? au son de leur génial Antidotes après seulement quatre titres...
artistes
    Magnetic Friends

    The War on Drugs

    The Dø

    Tindersticks

    The Breeders

    Cold War Kids

    Foals