Gentle Friendly

J'aurais vraiment eu du mal à juger cet album bien étrange qu'est Ride Slow. Dissonant, parfois terrifiant, attachant dans d'autres moments, l'album du duo de Peckham Gentle Friendly donne véritablement un sentiment partagé à la première écoute, mais se révèle passionnant sur le long terme...

Naviguant entre nappes sonores énigmatiques et titres beaucoup plus accrocheurs (même si toujours fortement empreint d'un psychédélisme tendu et anxieux), Ride Slow est un album qui, il faudra le noter, possède une certaine cohérence. Ainsi on se retrouve désarçonné à la première écoute par cet amas sonore que propose le groupe, passant très souvent des pistes expérimentales rappelant tantôt les travaux de No Age ou d'un Fuck Buttons assagi, comme sur l'introduction No Infinity On, ou encore sur l'impeccable transition qu'est LA Welle.

Mais à la suite de ces titres conceptuels (qui malheureusement ne se valent pas tous), le groupe propose également des chansons beaucoup plus « basiques », comme Lovers Rock, seul titre véritablement proche de la pop, et qui démontre la diversité stylistique du groupe. Néanmoins, les arrangements sont là aussi complexes, particuliers, voir dissonants. Avec Ride Slow, Gentle Friendly n'a clairement pas voulu nous apporter un album à tubes.
Mais cela n'est en aucun point dérangeant, car comme j'ai pu déjà vous le dire, c'est la cohérence de tout l'album qui en fait sa saveur. Très loin des sourires de la pochette, le disque nous livre une atmosphère quasi-morbide, angoissante, mais qui ne sombre pour autant pas dans la musique dépressive. Une incroyable chaleur se dégage de Ride Slow, de par des titres comme Real Fighters, dont la violence est sans pareille dans l'album, ou encore le très sombre Slengteng, qu'on rapprocherait presque au mouvement shoegaze.

Néanmoins, on notera quelques imperfections dans ce Ride Slow qui se font ressentir au fil du temps. C'est par exemple du côté des influences que l'on regrettera qu'un titre comme Shrines And Shit soit presque du copier-coller d'Animal Collective, que ce soit au niveau de la voix, ou tout simplement de l'ambiance quasi-aquatique, très proche du groupe New-Yorkais. C'est aussi la présence de certaines pistes expérimentales qui sont parfois un peu en-dessous du reste de l'album, comme le final Earths Moves, qui conclue l'album avec un sentiment d'insatisfaction, comme si l'on nous avait subtilisé la vraie fin terrible et beaucoup plus nerveuse que l'album nous avait amené à espérer tout au long de l'écoute.

Malgré ces petits défauts, Ride Slow est un très bon album, d'un duo qui tend à être l'un des groupes anglais à suivre. Gentle Friendly a donc brillamment réussi ce premier essai, et risque peut-être de devenir le nouvel ami de votre bibliothèque musicale...