Dan Michaelson

En ces temps où la nuit et le froid s’abattent inexorablement, le songwriter Dan Michaelson propose de s’envelopper dans un album touchant et d’une rare beauté.

La qualité de composition de l’ancien membre d’Absentee fait frémir dès les premières notes et ce troisième album n’échappe pas à la règle. Sudden Fiction est inspiré par le désert poussiéreux du Texas où il a été composé avec un style d’écriture narratif visant à faire passer le maximum d’émotion dans très peu de texte. Son phrasé particulier découpant les vers en quelques mots, laissant des plages musicales évoluer entre eux, se marie à merveille avec ces influences. La portée et la force de sa voix grave et pénétrante s’en trouvent ainsi grandement renforcée. Ajoutons que le londonien a tout enregistré, produit et mixé de ses mains, obtenant ainsi un album personnel mais avant tout intemporel.

Les textes peuvent être lus comme une seule entité sur tous les morceaux de l’album. Il s’adresse à une même personne, lui expliquant un ressenti amoureux et livrant certains sentiments quel ’on ne parvient généralement pas à expliquer ou à exprimer. Il pourrait être l’histoire d’une rencontre, d’un amour et d’une séparation sur les trente minutes et les huit titres que compte le disque. L'ensemble est certes assez court mais ce genre d’ambiance flottante et concentrée ne peut se prolonger sur une trop longue durée, surtout en tentant résumer une vie comme en la raccourcissant. Les mots, la musicalité mais également la technique employée sont au final un message d’un temps trop court pour être suffisamment ressenti.

La mélancolie domine les ambiances profondes de Sudden Fiction. Elle est amenée par une certaine tristesse dans le violoncelle enveloppant de Gabriel Stebbing et par la lenteur d’un piano rêveur que la voix ne vient que peu souvent déranger. La voix de Dan est d’une gravité transperçante sur la superbe Breaking Falls, restant dans la fragilité mais occupant la totalité de l’espace sonore. Elle peut rappeler Johnny Cash et notamment sa reprise de Hurt dans la nostalgie ressortant des compositions. Les arrangements minimalistes sont rythmés par une guitare folk cachée dans un tempo réduit. Elle se fait néanmoins plus présente sur des titres plus enjoués comme I Lay With You ou New Ruins grâce à quelques accords majeurs sonnant comme un espoir après la noirceur de l’ouverture. Un glissement de doigts sur un manche électrique se perdant dans un écho infini est souvent la seule fulgurance tranchant avec la douceur globale de Sudden Fiction. We Clear marque l’un des plus beaux textes de l’album, d’une radieuse mélancolie amenée par des divagations de guitare country en arrière plan. L’album se termine sur une envolée de violoncelle et un retour à la nostalgie dans les textes.

Dan Michaelson a composé pour ce disque une atmosphère très particulière, à écouter seul la nuit mais néanmoins fortement déconseillé aux dépressifs... qui l’écouteront malgré tout.