Chronique Album
Date de sortie : 20.05.2016
Label : Mute Records
Rédigé par
Clémentine Barraban, le 1er juin 2016
On Dead Waves est, à la fois, le pseudonyme et le fruit d'une collaboration entre James Chapman (Maps) et Polly Scattergood, conséquence directe de leur rencontre au Roundhouse de Londres lors du Mute Short Circuit Festival, cinq ans auparavant. Depuis, les deux chanteurs britanniques, tous deux signés sur le label Mute Records, n'ont pas démordu du projet, quitte à mettre entre parenthèses leurs actualités respectives. Le teasing de leur premier album éponyme sur les réseaux a su intriguer et attiser la curiosité sur cet improbable fusion d'univers, en particulier avec le single Blackbird et son vidéo clip somptueusement onirique. Les dix pistes pop-électroniques de On Dead Waves se rencontrent sur un esthétisme 1960 subtilement kitsch, mêlé à une morosité post-Altamont, où la voix éthérée et à bout de souffle de Scattergood s'harmonise avec les profondeurs abyssales de Chapman. A mi-chemin entre ciel et Terre.
Une guitare crasseuse introduit le sensuel Never Over et son refrain d'une simplicité troublante, révélant à la lumière du jour les qualités bluesy de la jeune femme. Plus optimiste, California possède une véritable force rétro, semblant débarquer tout droit d'un temps où la folk-psychée et le rock progressif étaient un mode de vie. Polly semble étouffer quand elle chante “Hollow are my Angels” sur le titre Hollow, accompagnée de l'ombre vocale de James, tandis qu'un même battement régulier de la batterie et de la guitare les soutiennent. Les sons d'orgue introduits au moment du pont teintent l'ensemble de couleurs 60's, dont la redondance a quelque chose de réconfortant, comme une enveloppe de bonnes vibrations.
Le sublime Inside Blue s'écoute sans modération, tant il est plaisant de se laisser porter par sa mélodie riche et envoutante, alors que Autumn Leaves, délicate reprise du classique français « Les feuilles mortes » (texte de Jacques Prévert), chanson d'amour et de nostalgie, est comme une caresse de frissons sur le bras. L'album se termine sur le sifflement solitaire de Winter's Child. D'un pas lourd, On Dead Waves scandent leur propre nom, comme une marche funeste résonnant à travers un désert du Far West, jusqu'au dernier son de cloche.
On Dead Waves est un album visuel, où chaque chanson a son propre paysage sonore, voyageant entre sombres récits et émotions enfouies. Le plus surprenant, compte tenu du travail avec la musique électronique qui a dominé les deux carrières de Scattergood et Chapman, est la quasi-absence de toute chose ressemblant à un synthé. Ces derniers ont mis au point un nouveau son à base de percussions douces, orgues et guitares, combinant leurs talents créatifs avec une poésie vulnérable et une composition brillante. Leurs voix, bien que joliment complémentaires, sont parfois trop inconsistantes et monocordes, et lissent les reliefs des mélodies, comme le ressac de la mer sur les rochers. Alors ça vaut le coup de plonger au creux de la vague, et pleinement applaudir la performance.