Sans nouvelles de Slaves depuis 2018, Laurie Vincent et Isaac Holman n'en sont pas moins restés occupés. Le premier au travers d'une vie de famille bien remplie et de son side-project LARRY PINK THE HUMAN, le second seul et sous le pseudonyme Baby Dave. Isaac Holman, batteur / chanteur (encore un exemple venant prouver que cette formule est infaillible) et frontman détonnant de Slaves, nous présente son projet solo qui le mène sur d'autres sentiers que ceux du punk surpuissant de sa formation initiale.
Monkey Brain est le fruit d'un long passage à vide pour Holman. Ce dernier est en effet entré dans une sérieuse dépression début 2019, devant ainsi se mettre en retrait de la musique. S'en suivit la pandémie, les confinements, et c'est en bataillant avec lui-même que Holman a trouvé les ressources nécessaires pour nous offrir son premier album, en mode « fait maison » tant sa structure étonne par sa simplicité et sa sonorité toute droit sorti d'un Mac.
Déjà passé maître dans la capacité à déployer du très lourd avec peu – Slaves ne sont constitués qu'une d'une batterie et d'une guitare - l'atmosphère générale se construit autour d'un beat lourd qui, sur chaque morceau, se retrouve à marquer le pas enveloppé de samples en boucles et de volutes synthétiques comme toute droites sorties des premiers Moog et autres Bontempi.
Ce parti pris de l'épuré n'étonne pas quand on apprend que Damon Albarn a produit pas moins de la moitié du disque. On retrouve cette clarté dans la production que l'on peut apprécier sur le dernier album du leader de Blur, et ce minimalisme qui règne sur l‘intégralité des titres ne sert qu'à mettre en exergue le chant de Holman que l'on découvre tout en finesse, loin des hurlements qu'il pousse lorsqu'il opère derrière sa batterie avec Slaves.
Too Shy For Tennis, premier single dévoilé l'an passé, porte fort l'empreinte Damon Albarn tant on y retrouve le côté fait de bric et de broc de Gorillaz. 29 et Washing Machine évoquent l'electro punk des Sleaford Mods, leurs vidéos dignes d'un iPhone venant illustrer le parti pris du DIY qui règne dans le disque. On ne trouvera aucune guitare, mais ces dernières ne manquent pas car la richesse de la banque de sons ici présente apporte une réelle structure au tout, avec en prime une petite saveur à la Beastie Boys dont Mike D, pour rappel, avait produit le second album de Slaves, Take Control, en 2016. Les leçons ont été apprises.
Monkey Brain, où ce blanc qui parfois s'empare de notre cerveau, notamment quand on se rend compte que l'on a passé tout une page d'un livre sans s'en souvenir, sonne comme un pied de nez à la période trouble qu'a vécue Isaac Holman. Le résultat est un petit ovni qui convainc par sa capacité à taper juste sans s'alourdir des carcans du moment. Le challenge de se présenter au public sous un tout autre jour est relevé par Baby Dave qui sait ici faire preuve d'audace et réussit de façon très honorable à se démarquer du punk dynamitant de Slaves.